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scay ie, que du temps du Pape Formosus, et du Roy Loys le Begue, les prestres estoient encores mariez. Et leur estoit licite espouser femme legitime, posé quelle fust pucelle, et non vefue pour euiter bigamie, comme de ce nous auons touché en la seconde partie, au premier concile de Vienne. Et pour clorre le pas au propos de ce present Traicté cest que tout le monde doit prier Dieu, quil vueille reformer et renouueller son Eglise, tant au chef comme aux membres, par vn tresbon et tresgrand concile vniuersel de Leglise catholique. Car comme dit saint Gregoire, en ses œuures morales: Per nullum genus hominum Deus magis irritatur, quàm per malos sacerdotes. Laquelle reformation et renouation de Leglise faite, lunion et concorde des Princes Chrestiens sentretiendra tousiours de mieux en mieux. Et la secte des Mahomethistes, empirera et descherra tousiours iusques à la fin.

FIN.

De Peu Assez.

LE TRAICTÉ

NOMMÉ LA LEGENDE DES VENITIENS, OU
LEVR CHRONIQVE ABBREGEE.

Composee par Tean le Maire de Belges, à present Indiciaire, et Historiographe de la Royne.

PROLOGVE.

Povr ce que les Venitiens ont maintenant le vent au visage, plusieurs alleguent certaines Propheties, oracles, et vaticinations, par lesquelles ilz veulent entendre, que le terme et definement de la seigneurie des Venitiens est venu. Dont les vns disent, que depuis trois ou quatre ans en ça, sest trouué à Romme vne pierre de marbre de grand antiquité, en faisant aucuns fondemens en la maison du Cardinal de Farnesio en laquelle estoit escrit, et graué tout ce quon ha veu aduenir depuis la prinse du More, (1) iusques à maintenant. Les autres disent, que de long temps les Venitiens sauoient bien entre eux, quilz deuoient souffrir ruïne finale par vn Roy de France. Et que ceste Prophetie leur estoit representee en vn mur de leglise au palais saint Marc à Venise, auquel estoit figuré douure musaïque (2) vn Coq creuant les yeux à vn Renard denotant par le Coq,

(1) Ludovic Sforza, duc de Milan.

(2) En bas-latin musaïcum.

le Roy treschrestien: et par le Renard, la nature des Venitiens. Encores ay ie ouy dire à autres, quil y ha ia grand piece que les Venitiens auoient pour certain signe (1) que quand ilz verroient brusler ie ne scay quel clocher dune ville leur voisine, et subiette, ilz pourroient bien deslors estre asseurez de leur prochaine destruction: laquelle chose est aduenue, comme ilz disent, desia dix ans passez. Ces choses ie ne scay comment ilz les sauent, mais ie scay bien, que lan mille cinq cens et six, es festes de Pentecouste moy estant à Venise, on me dit que labbé Ioachin Calabrois, lequel auoit esprit de Prophetie, et flourissoit enuiron lan mille cent cinquante, leur auoit prefiguré leur decadence telle que nous la voyons, par deux Lyons volans, dont ilz font leurs armes, lesquelz il leur ordonna tirer en marbre, au pauement de leglise saint Marc. Lun diceux Lyons estoit pourtrait gros et enflé, et sembloit nager de tout le corps sur les ondes, excepté que les pattes de deuant estoient en terre ferme lautre auoit toute la corpulence estendue sur la terre, et les piedz de derriere seulement en leaue mais il estoit maisgre, et deffait à merueilles. Demandans les Venitiens audit abbé Ioachin la signification de celle pourtraiture: il leur respondit, que tant et si longuement quilz seroient seigneurs de la nauigation de la mer, ilz nauroient gueres de controuersie auec les Princes. Chrestiens, ains prospereroient en planté de richesses : ce qui est signifié par le premier Lyon : mais toutes et quantesfois quilz perdroient ledit nauigage, et se mettroient à vsurper en terre ferme, ilz esmouueroient contre eux lindignation des grans Princes, desquelz ilz seroient totalement deffaits, et ruez ius: laquelle chose leur estoit denotee

:

(1) Signe certain.

par le second Lyon. Or est il certain, quilz ont perdu le nauigage des espisseries par les Portugalois, qui les vont maintenant querir aux Indes. Et se sont iceux Venitiens efforcez de gaigner tousiours en terre ferme parquoy maintenant ladite Prophetie se monstreroit auersee. (1) Mais si lesdites choses ont esté prononcees desprits Prophetiques, ou non, ie nen vueil rien affermer. Bien est il vray, que ainsi que par propre curiosité ie cherche plusieurs liures, iay trouué vn passage en lepistre de Sibylle Erythree, laquelle ie recouuray à Romme lannee passee, mille cinq cens et huit, qui dit ainsi : Porrò, congregatio in aquis Adriaticis ex desolatione Ursi 1.XX. pedum coartabitur, non frangetur : donec veniant duo hirci, qui diminuant aurum eius. Mais encores ne scay ie bonnement si elle se peult approprier au temps present: ien laisse linuestigation aux plus sages. Iay encore ouy alleguer assez dautres choses seruans à ce ainsi que chacun abonde en son sens. Si comme prognostications dastrologie, apparences de signes, estranges eclipses, cometes, fulminations, tremblemens de terre, monstres, portentes, (2) et presages diuers. Mais pource que cecy pourroit parauenture donner erreur au peuple imbecille de sens, disant que la perdition des Venitiens est vne chose fatale et predestinee, à laquelle ilz ne pouuoient obuier en nulle maniere : à fin de congnoitre que cest œuure de Dieu, et non des Planettes, iouxte ce que dit Orose en son liure de Ormesta mundi (3) : Tribulationes et plaga, etsi plerunque per aëreas potestates fiant,

(1) N'est-ce pas averrée, accomplie ? Joachim a composé Prophetiæ et expositiones Sibyllarum.

(2) portenta.

(3) Par corruption du vrai titre : Orosii ou Or. moesta mundi.

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