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que de le négliger pour mal faire du neuf. Il a été soutenu à la faculté de médecine de Pa

dans une si délicate cause, se disent grands avant d'avoir rien fait, ne se mettent pas en devoir de faire autre chose que de décrier ce qu'ont fait ceux dont la réputation méritée leur trace une route si longue et si difficile pour arriver au même point.

Je suis moins injuste que ces iniques zoïles, ces frélons, dont tout le travail consiste dans le bourdonnement. Je neprétends pas, parce qu'un siècle qui commence n'a rien fait encore, qu'il ne fera rien : attendons, pour juger les siècles, qu'ils soient écoulés; pour juger les hommes, qu'ils soient passés; mais je prétends qu'un siècle qui, sous le rapport littéraire, a dignement succédé à un siècle qui ne se renouvellera jamais; qui, sous le rapport des sciences physiques (ce qui vaut bien quelque chose et est d'une utilité un peu plus générale que les chefs-d'œuvres littéraires), a laissé ce grand siècle et tous les autres siècles bien loin derrière lui, est un siècle qui occupera toujours une grande place dans l'histoire, quoiqu'il le fasse ultérieurement; à plus forte raison ne doit-on pas en parler avec une si imprudente et si ridicule légéreté, lorsque le tort, accidentel sans doute, mais très-réel et irréparable, d'être venu un peu tard, rend bien plus pénible la tâche

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ris une thèse ayant pour titre : Estne Hippocratis physiologia medico satis? Et ce

que nous avons à remplir, seulement pour nous placer au niveau de nos prédécesseurs; et que, comme le directeur général de la Bibliographie centrale, pour mettre en parallèle avec des faits on n'a que des espérances, quelque favorables qu'on se plaise à les représenter. Ce qui aurait dû surtout tempérer son ton prophétique ou emphatique, et lui rappeler qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir terrassé, c'est que ses grandes vues sur la grandeur des idées et des choses que doit, par le moyen de ses presses et de sa bouteille à l'encre, faire naître le grand siècle qui commence, ont été puisées dans le beau parallèle que le président Hainaut (petit homme du dix-huitième siècle, du siècle de l'engourdissement politique et moral, de la monotonie, du -Tepos, etc., prérogative qui n'est cependant pas dédaigner) trace des siècles d'Auguste et de Louis XIV, et dans le rapprochement que cet historien fait des qualités de ces deux princes, tous les deux, selon lui, conquérans de leur empire, l'an sur les républicains, l'autre sur les séditieux, et devenus les maîtres, quoiqu'à des titres bien différens, ajoute-t-il, puisqu'Auguste n'était qu'un usurpateur. Or, tout cet artiele est bien fait pour apprendre ce que c'est qu'un grand siècle,

pendant, s'il faut en croire les physiologistes modernes, cette physiologie, la physiologie

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un

combien ils sont rares en prenant l'un de ces deux pour type; qu'il y a une différence entre grand et mémorable; que Charlemagne, que Henri IV, que beaucoup de nos rois ont été de grands souverains, sans que leur siècle ait pu obtenir le même titre; qu'il ne suffit donc pas, pour le mériter, d'un homme supérieur, d'un événement extraordinaire, présenté à la curiosité future, et dont l'impression qui en résultera, ne sera peutêtre en rien semblable à celle qu'en auront éprouvée les contemporains; mais qu'il faut une collection, une succession de choses, non pas remarquables mais admirables, une réunion, concours d'hommes illustres, pour faire un illustre siècle, ce qui ne peut encore avoir eu lieu dans un siècle qui cominence, quoique déjà il soit à jamais mémorable; que tous les triomphes d'Alexandre n'ont pu lui procurer ce qu'il desirait le plus après les triomphes, n'ont pu faire naître un Homère pour les chanter; que, malgré qu'il soit possible, rigoureusement parlånt, que deux grands siècles se touchent, se suivent presque immédiatement, ce n'est pas du tout dans l'ordre des choses ordinaires (puisqu'à peine ou peut en citer trois bien caractérisés), ni parconséquent dans l'ordre des choses qu'on puisse

des anciens était fort peu de chose. Oui, je vcux bien en convenir pour le moment, bien que leurs écrits quand on se donne la peine

prédire avec tant d'assurance, etc. C'est pourquoi, sur des objets d'un si haut intérêt et en même *tems si éventuels, il faut donc parler avec un peu plus de circonspection et de résignation dans les décrets de la divine Providence qui, pour nous éprouver sans doute, se fait si souvent un jeu de tromper nos espérances, dérouter nos combinaisons et changer les belles déterminations prises dans notre petite sagesse; se rappeller cette sentence de l'Ecclésiaste : Vanitas vanitatum, omnia vanitas, et ne pas imiter ce papa débonnaire qui, transporté du plus heureux délire, dans les syllabes entrecoupées que bégaye le plus petit de ses gentils marmots, lit et prédit avec assurance que celui-là sera un hrand homme, le digne fils de son père, et voilà le bout de l'oreille. Mais il en est actuellement dans les beaux-arts en général, comme dans la médecine en particulier; on cherche à force de bavardage, de replis, de contours, etc. à faire perdre de vue, à faire oublier les anciens. Mais malheur si l'on y réussit! la période de ténèbres en profitera pour nous couvrir de nouveau de ses sombres et tristes voiles; pour l'éviter'il n'est qu'un moyen :

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Vos exemplaria Græca

» Nocturnd versate manu, versate diurnâ,

Hor.

de les lire avec attention, démontrent souvent le contraire; mais leur pratique, hélas ! Entre eux et nous telle est la différence, que dans la physiologie ils ne voyaient, ils ne recherchaient, ils n'étudiaient que les effets (témoin leur théorie de la respiration que la nouvelle chimie a bien pu détruire, mais n'a pas encore remplacée), (1) et qu'en pa

2.

Et, sous ce rapport, le siècle de Louis XIV le siècle qui l'a suivi, valent bien pour nous un siècle grec.

D'ailleurs, déclamer contre la fin du XVIII. siècle, n'est-ce pas déclamer aussi contre celui qui commence ? n'est-ce pas insulter autant aux têtes marquantes, aux sujets distingués qui existent actuellement? ne sont-ils pas tous des enfans de ce siècle d'exécration? La première des sociétés du monde savant, l'Institut français n'est-il pas composé d'hommes du XVIIIme siècle; et tout ce que les premières années du XIXme pourront produire de grand, d'illustre, ne sera - ce pas l'œuvre de ces hommes du siècle précédent?

(1) Je sens bien qu'une semblable assertion va être regardée par les chimistes exclusifs, comme un paradoxe, un blasphême, etc.; mais pour moi

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