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L

SÉDUCTEUR.

E SÉDUCTEUR est celui qui, dans la seule vue de la volupté, tâche avec art de corrompre la vertu, d'abuser de la foiblesse ou de l'ignorance d'une jeune personne. Si j'avois à tracer le progrès que fait un séducteur, je pourrois dire qu'à la familiarité de ses discours libres succède la licence de ses actions; la pudeur encore farouche demande des ménagemens, l'on n'ose se permettre que de petites libertés, l'on ne surprend d'abord que de légères faveurs et forcées même en apparence, mais qui enhardissent bientôt à en demander, qui disposent à en laisser prendre, qui conduisent à en accorder de volontaires et de plus grandes, c'est ainsi que le cœur se corrompt au milieu des privautés qui radoucissent, qui humanisent insensiblement la fierté, qui assoupissent la raison, qui enflamment le sang; c'est ainsi que l'honneur s'endort, qu'il s'ensévelit dans des langueurs dangereuses, où enfin il fait un malheureux naufrage.

« La prudence, dit le bramine, va parler et t'instruire: » prête l'oreille, ô fille de la beauté, et grave ces maximes » au fond de ton cœur! ainsi ton esprit embellira tes traits; >> ainsi tu conserveras, comme la rose à qui tu ressembles, » un doux parfum après ta fraîcheur.

Au matin de tes jours, aux approches de ta jeunesse » quand les hommes commenceront à prendre plaisir à » lancer sur toi des regards dont la nature te développe » sourdement le mystère, le danger t'environne; ferme » l'oreille à l'enchantement de leurs cajoleries; n'écoute »point les douceurs de la séduction.

››› Rappelle-toi les vues du créateur sur ton être; il te fit » pour être la compagne de l'homine, et non l'esclave de >> sa passion. >>

Le nom de séducteur ne se donne pas seulement à celui

des

qui attente à la pudeur, à l'innocence d'une femme ou d'une fille, mais à quiconque en entraîne un autre, par voies illicites, à une mauvaise action.

La séduction est une tromperie artificieuse que l'on emploie pour abuser quelqu'un, et le faire consentir à quelque acte ou démarche contraire à son honneur ou à ses

intérêts.

(M. de JAUCOURT.)

I

SEIGNEUR. (grand).

Ces deux expressions, grand seigneur et grand homme

ES

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n'indiquent point une même chose, il s'en faut de beaucoup; les grands seigneurs sont communs dans le monde, et les grands hommes très-rares; l'un est quelquefois le fardeau de l'état, l'autre en est toujours la ressource et l'appui. La naissance, les titres et les charges, font un grand seigneur, le rare mérite, le génie et les talens éminens, font un grand homme. Un grand seigneur voit le prince, a des ancêtres, des dettes et des pensions; un grand homme sert sa patrie d'une manière signalée, sans en chercher de récompense, sans même avoir aucun égard à la gloire qui peut lui en revenir. Le duc d'Epernon et le maréchal de Retz étoient de grands seigneurs; l'amiral de Coligny et Lanoue étoient de grands hommes.

Quand les Romains furent corrompus par les richesses des provinces conquises, on commença à voir naitre de leur avilissement l'époque du nom de grand seigneur, et le philosophe réserva le titre de grand homme à ces rares mortels qui aiment, qui servent et qui éclairent leur pays. Celui qui obtient une noble fin par de nobles moyens ; qui, disgracié, rit dans l'exil et dans les fers, soit qu'il règnes comme Antonin, ou qu'il meure comme Socrate, celui-là est un grand homme aux yeux des sages, mais les simplement grands seigneurs n'ont, par dessus les hommes ordinaires, qu'un peu de vernis qui les couvre. J'ajouterai qu'un de nos poètes, voulant peindre les grands seigneurs au lieu de dire qu'ils ne sont tels que par les caprices de la fortune et du hasard, nous les représente sous la figure

D'un léger ballou que le sort
Pousse dans l'air plus ou moins fort,
Dont il se joue à sa manière,
D'un globe de savon et d'eau
Que forme avec un chalumeau
D'un enfant l'haleine légère.

(Voyez Grand et Grandeur.)

(M. de JAUCOURT.)

NOM

SEIZE. (Les)

Oм d'une faction fameuse dans l'histoire de France. Elle se forma à Paris, en 1579, pendant la ligue. On les nomma ainsi à cause des seize quartiers de Paris qu'ils gouvernoient par leurs intelligences, et à la tête desquels ils avoient mis d'abord seize des plus factieux de leur corps. Les principaux étoient Bussi-le-Clerc, gouverneur de la Bastille, qui avoit été auparavant maître en fait d'armes ; la Bruyère, lieutenant particulier; le commissaire Louchard; Emmonot et Monnot, procureurs; Oudinet, Passart Sénaut, et ce dernier commis au greffe du parlement, homme de beaucoup d'esprit, qui développa le premier cette question obscure et dangereuse, du pouvoir qu'une nation peut avoir sur son roi : question qui, renouvelée de nos jours, a été bien fatale à la France, et a réduit, en un instant, dans l'état le plus déplorable, la plus belle et la plus antique monarchie de l'Europe. Un bourgeois de Paris, nommé la Rocheblond, commença cette ligue particulière pour s'opposer aux desseins d'Henri III qui favorisoit, disoit-on, les huguenots. Cette faction, accrue et fomentée par ceux que nous avons nommés et par beaucoup d'autres, se joignit à la grande ligue commencée à Péronne. Après la mort des Guises à Blois, elle souffla le feu de la révolte dans Paris contre Henri III, et euf, qu'on croit, bonne part au parricide de ce prince. Egalement opposée à Henri IV, elle se porta aux excès les plus étranges contre ceux qu'elle soupçonnoit être ses partisans; elle affecta même d'être indépendante du duc de Mayenne, et n'oublia rien pour faire transporter la couronne à l'infante Claire-Eugénie, fille de Philippe II, roi d'Espagne, ou à ce prince lui-même. Mais quand Paris se fut soumis à son légitime souverain en 1594, cette faction fut entièrement dissipée, soit par la retraite des principaux d'entre les seize, soit par la clémence d'Henri IV envers les autres.

ANONYME. -)

à ce

L'HOMM

SENSÉ.

HOMME SENSÉ est celui qui a l'esprit droit et juste, de l'expérience, du jugement, et qui est peu sujet à se tromper, soit qu'il parle, soit qu'il agisse. Si ce mot s'applique à une chose, cette chose supposera toutes les qualités que nous venons d'attribuer à la personne. On dit un homme sensé, une réponse sensée. L'autorité d'un homme sensé est, en certains cas, de plus grand poids que celle de vingt hommes d'esprit.

(ANONYME.)

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