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donc au temps que les voleurs m'avaient prescrit pour me recevoir dans leur troupe.

Grâces au ciel, six mois après, ce temps arriva. Le Seigneur Rolando dit à ses cavaliers: "Messieurs, il faut tenir la parole que nous avons donnée à Gilblas. Je n'ai pas mauvaise opinion de ce garçon-la ; je crois que nous en ferons quelque chose. Je suis d'avis que nous le menions demain avec nous cueillir des lauriers sur les grands chemins." Les voleurs furent tous du sentiment de leur capitaine; et, pour me faire voir qu'ils me regardaient déjà comme un de leurs compagnons, dès ce moment ils me dispensèrent de les servir. Ils rétablirent la dame Léonarde dans l'emploi qu'on lui avait ôté pour m'en charger. Ils me firent quitter mon habillement, et ils me parèrent de toute la dépouille d'un gentilhomme qu'ils avaient nouvellement volé. Après cela je me disposai à faire ma première campagne. 10

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(1.) Je pensai, etc., during the first days, I was like to sink under the sorrow that oppressed me.

(2.) Je ne faisais que, etc., I merely dragged on a lingering

existence.

(3.) Etje me mêlais, etc., and I took part in their conversation. (4.) Que je faisais le plaisant, that I was playing the wag. (5.) J'ai pris insensiblement votre esprit, I have insensibly imbibed your humour.

(6.) Pour éprouver ma vocation, in order to satisfy them of the genuineness of my call.

(7.) Car, etc., for I aspired to become a thief only.

(8.) Je m'en remis donc au temps, I resigned myself till the time the robbers had fixed.

(9.) Pour m'en charger, to invest me with it.

(10.) Après cela, etc., after which I prepared for my first campaign.

PART II.

With the assistance of a dictionary, the learner will now be able to translate the following anecdotes, the style of which is easy, and peculiarly adapted for conversation.

ANECDOTES.

1. Néron menaçant le roi Démétrius de le faire mourir, celui-ci lui répondit froidement: "La nature vous fait la même menace."

2. Quelqu'un ayant demandé à un roi de Sparte, de quelle manière on pouvait acquérir de la réputation, il répondit: "En disant bien, et faisant mieux."

3. Un savant, interrogé comment il avait fait pour acquérir tant de connaissances, répondit: "Je n'ai pas eu honte de demander ce que j'ignorais à ceux qui pouvaient m'en instruire."

4. Une personne déjà assez âgée, disait en présence de Cicéron, "qu'elle avait trente ans." "Cela est vrai," interrompit le célèbre orateur," car il y a plus de douze ans que je le lui ai entendu dire."

5. Une demoiselle disait à une de ses amies, qui promettait beaucoup, et qui donnait peu: "Vous seriez la meilleure personne du monde, si votre bourse était toujours ouverte au lieu de votre bouche.'

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6. Un borgne rencontra de bon matin un bossu qu'il connaissait, et lui dit: "Pierre, vous êtes chargé de bonne heure aujourd'hui. Il est vrai que c'est de bonne heure pour vous," lui répondit le bossu, " car vous n'avez encore qu'une fenêtre ouverte.”

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7. Un homme aimait beaucoup le vin, mais il lui trouvait deux mauvaises qualités. Mettez-y de l'eau, disait-il, vous le gâtez; n'y en mettez pas, il vous gâte.

8. Des voleurs étaient occupés à forcer la porte d'une boutique, où deux commis étaient couchés: Ceux-ci ayant entendu le bruit, l'un d'eux cria aux voleurs: "Messieurs, revenez un peu plus tard; nous ne sommes pas encore endormis."

9. Quelqu'un ayant mal parlé du Tasse en sa présence, celui-ci garda un silence, dont son ennemi même fut étonné. Une personne de la compagnie dit assez haut pour être entendue: "Il faut être fou pour ne pas parler en pareille occasion." "Vous vous trompez,' répondit le Tasse, car un fou ne saurait se taire."

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10. Un grand parleur s'étant présenté pour apprendre l'éloquence sous Isocrate, ce philosophe lui demanda le double de ce que les autres lui payaient. Comme le parleur paraissait surpris de cette différence : "C'est," répondit Isocrate, “ qu'il faut que je vous apprenne deux choses, à vous taire, et à bien parler." 11. Un Florentin se vantait d'avoir dépensé mille écus en peu de temps, à l'étude des belles lettres. Un sage, trouvant qu'il avait fort mal employé cette somme, lui dit : " Mon ami, si l'on t'en donne cent de ce que tu sais, je te conseille de les prendre sans hésiter."

12. Un gentilhomme étant arrivé de bonne heure dans une auberge, demanda à dîner; un valet lui répondit: "Monsieur, il n'est encore que neuf heures." Allez," lui dit le gentilhomme, "peu m'importe quelle heure il est à votre horloge, il est midi à mon estomac."

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13. Un des amis de Diogène lui demandait à quelle heure on devait dîner et souper (faire ses repas). "C'est selon," dit ce philosophe; " celui qui est riche, quand il veut, et celui qui est pauvre, quand il peut." 14. Un bouffon, croyant engager un gentilhomme à lui donner un habit, lui dit : Monsieur, j'ai rêvé

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cette nuit que vous me donniez un habit." Le gentilhomme lui dit plaisamment. Allez, mon ami, gardez-vous d'ajouter foi aux songes; moi, je n'y crois point du tout."

15. Un Espagnol étant en Russie, passa dans un village pendant l'hiver, et se vit poursuivi par plusieurs chiens. Il se baissa pour prendre une pierre, afin de les chasser, mais elle tenait si fort, qu'il ne put la détacher: "Oh! le maudit pays," s'écria-t-il, " où l'on attache les pierres, et où on laisse courir les chiens."

16. Un soldat ayant perdu son argent au jeu, alla trouver un de ses amis, qui reposait sur un lit. "Camarade,” lui dit-il, " dormez-vous ?" Pourquoi ? lui demanda celui-ci. "C'est que je voudrais bien que vous me prêtassiez un florin, pour prendre ma revanche." "Allez-vous-en ; je dors,” lui répondit son ami.

17. Un paysan avait long-temps marchandé une grosse montre d'argent, sans pouvoir convenir de prix avec l'horloger. Il en apperçut une* três petite, qui était à répétition, et dit, en la saisissant: "Vous me donnerez du moins cette petite-ci par-dessus le marché.”

18. Un sage avait un ami qui fut tout-à-coup élevé à une dignité. Tout le monde alla l'en féliciter; le sage seul n'y alla point. Comme on lui en témoignait de la surprise, il répondit: "La foule va chez lui à cause de sa place; moi j'irai quand il ne l'aura plus, et je crois que j'y serai seul."

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19. Un citoyen Romain vit avec surprise, en se levant, que les rats avaient rongé ses souliers. Il va bien vite trouver Caton, et lui demande avec anxiété ce que cela pouvait présager. Mon ami," lui dit Caton en riant, " ce n'est pas un prodige que les rats aient rongé vos souliers; mais c'en serait un, si vos souliers avaient mangé les rats."

20. L'empereur Charles-Quint parcourait un jour la maison d'un de ses maîtres-d'hôtel, qui était belle

et d'une grande étendue, mais dont la cuisine était fort petite. Comme le monarque lui en témoignait de la surprise: "Sire," lui répondit le maîtred'hôtel, "c'est ma petite cuisine qui a fait ma maison grande."

21. Pendant les dissentions d'Athènes, Phocion était du parti opposé à celui de Démosthène. Et comme Démosthène, en plaidant pour son parti, dit à Phocion: "Que le peuple le déchirerait, s'il entrait en fureur:" "Et toi," répondit Phocion, "s'il entrait en bon sens.'

22. Un Romain de basse extraction et de peu de mérite réprochait à Lélius, Patricien, qu'il dégénérait de ses ancêtres. " Et toi," repartit Lélius, “tu ne dégénères pas des tiens."

23. Benserade, qui était ennemi de Furetière, ayant pris un jour, pour l'offenser, sa place dans l'académie : Voici une place," dit-il, " où je dirai bien des sottises." "Courage," répliqua Furetière, "vous avez

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bien commencé."

24. Pédarette, gentilhomme Lacédémonien, postulait pour être admis au conseil des Trois cents. Se voyant exclus, il s'écria, en s'en retournant plein de joie: Grâces aux Dieux immortels! il s'est trouvé dans Sparte tant de gens qui me surpassent en mérite, qu'on n'a pas eu besoin de moi."

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25. Madame Gabriéli, célèbre cantatrice, avait demandé cinq mille ducats pour chanter deux mois à Pétersbourg. L'impératrice lui répondit: "Je ne paie sur ce pied-là aucun de mes maréchaux-de-camp."" En ce cas," repartit Madame Gabriéli, "Votre Majesté n'a qu'à fair chanter ses Maréchaux." L'impératrice paya les cinq mille ducats.

26. Un jour qu'à une audience quelques conseillers dormaient, et que d'autres parlaient un peu trop haut, Monsieur du Harlay, premier président, dit: "Si ces messieurs qui causent, ne faisaient pas plus de bruit

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