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NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE.

OUVRAGES DE LA BRUYÈRE.

I. MANUSCRITS.

Pour l'impression des Caractères et pour celle des Dialogues, nous n'avions à consulter aucun manuscrit. Il reste de la main de la Bruyère quelques lignes qu'il écrivit sur le registre des suppliques des aspirants au grade de licencié en l'université d'Orléans, les lettres, adressées au grand Condé, qui sont aujourd'hui conservées au château de Chantilly, celle de la collection de M. le comte d'Hunolstein, celle de la Bibliothèque nationale, enfin deux lettres, faisant partie des archives du château de la Davière, dont nous avons publié le texte au début de ce volume. Mentionnons quelques signatures au bas d'actes notariés (la plupart se trouvent dans l'étude de Me Lefebvre, notaire à Paris), celle qu'il mit au bas d'une plainte déposée par lui à la suite d'un vol domestique, et nous aurons cité tout ce que nous connaissons de l'écriture de notre auteur.

Les archives municipales de la ville de Paris possédaient quelques actes de baptême ou de décès signés de lui, que l'incendie allumé par la Commune en 1871 a anéantis.

La signature de la Bruyère est, en général, d'un seul mot, et avec un b minuscule; le d initial est tantôt minuscule, tantôt majuscule. Son écriture a singulièrement varié de sa jeunesse à son âge mûr: elle s'est allongée et affinée.

Les papiers qu'a laissés la Bruyère à sa mort ont été remis à son frère, l'abbé de la Bruyère, qui vivait alors à Saint-Denis.

II. IMPRIMÉS.

A. ÉDITIONS ORIGINALES.

a) Les Caractères de Théophraste, traduits du grec, avec les Caractères ou les Mœurs de ce siècle.

Imprimé en 1687 par le libraire Etienne Michallet et mis en vente vers le mois de mars 1688, le livre de la Bruyère fut, cette même année 1688, deux fois réédité à Paris. Ces trois éditions y furent suivies de six autres du vivant de l'auteur. Étudiées avec soin, les éditions originales des Caractères (nous nommons ainsi toutes celles qui furent imprimées à Paris pendant la vie de la Bruyère) nous initient, dans certaines pages, à son travail avec autant de précision, pour ainsi dire, que le feraient des manuscrits chargés de ratures ou des épreuves corrigées.

Sans nous flatter d'avoir découvert tous les cartons des neuf éditions originales, la reliure des volumes rendant parfois la recherche difficile, nous croyons pouvoir en porter le total à 104. En voici le dénombrement : 93 feuillets de second tirage qui ont remplacé autant de feuillets primitifs, 3 cartons successivement substitués à trois cartons antérieurs, enfin cinq feuillets intercalaires, dont quatre ont permis à l'auteur de donner plus d'étendue à une dissertation, et le cinquième d'ajouter au texte de nouvelles réflexions.

Il est impossible de savoir quelles variantes la plupart des cartons introduisirent dans le texte primitif ou simplement quelles fautes d'impression ils ont corrigées; nous n'en comptons que 28 pour lesquels les premières leçons nous apparaissent sûrement, quelques volumes ayant conservé les feuillets de premier tirage. De plus, en trois des cas où le feuillet primitif ne s'est point retrouvé, une contrefaçon, trop rapidement imprimée, nous révèle les mots qui ont appelé des changements.

Les corrections portent en général sur les remarques qui sont pour la première fois exposées à ce que la Bruyère appelle « l'écueil » de l'impression; aussi est-ce la première édition qui présentera les plus nombreuses traces de remaniement : nous y avons relevé jusqu'à vingt-six cartons. Parmi ces vingt-six feuillets, il en est seize que nous avons pu, grâce à l'heureuse rencontre d'un exemplaire que le hasard a fait passer sous nos yeux, comparer aux feuillets primitifs.

Deux exemples, cités plus loin, montrent que la Bruyère usa parfois d'un autre procédé que l'emploi des cartons pour introduire dans un volume sous presse une variante à laquelle il n'avait pas songé plus tôt, le remaniement de la composition sur une feuille non encore tirée ou partiellement tirée: voyez ci-après la notice de la 8o édition.

Au privilège de dix années obtenu en 1687 par Michallet pour l'impression des Caractères succéda en 1693 un nouveau privilège en faveur du même libraire, prolongeant de dix années la durée du précédent et s'étendant au discours à l'Académie.

A l'expiration de ce second privilège, en 1707, J.-B. Delespine, successeur de Michallet, en obtint un nouveau de dix-huit années, qu'il cédera en

1702 à Baritel, libraire de Lyon, et en 1714 à David, libraire à Paris. La maison David le fit renouveler en 1724, 1733 et 1744. Enfin les libraires Hochereau et Panckoucke devinrent en 1764 les titulaires du privilège des Caractères.

L'année même où Michallet imprima les trois premières éditions des Caractères, il en parut une nouvelle à Lyon, une autre à Bruxelles, et ces deux éditions ne furent pas les seules que l'on publia dans l'une et l'autre ville du vivant de la Bruyère. Les réimpressions qui furent faites à Lyon de plusieurs des éditions de Paris avaient été l'objet d'un contrat entre Michallet et un libraire lyonnais, Thomas Amaulry. Il sera dit comment Thomas Amaulry trompa le public en lui présentant les exemplaires d'une même édition avec des millésimes successifs, qui étaient inexacts. Ainsi qu'Amaulry sans nul doute, Léonard de Bruxelles reproduisit l'œuvre de la Bruyère avec l'agrément de Michallet: au-dessous du titre de la première de ses éditions est inscrit le nom de Michallet comme éditeur; sur les suivantes, 1692, 1693 et 1697, n'apparaît plus que le nom de Léonard; les deux dernières, imprimées alors que les Pays-Bas espagnols subissaient l'invasion de l'armée française, furent expurgées et perdirent les passages offensants pour Guillaume d'Orange et son allié Maximilien de Bavière, gouverneur des Pays-Bas.

Il n'est entré en France qu'un petit nombre d'exemplaires imprimés à Bruxelles, et la seule correspondance du temps où j'aie rencontré la mention des éditions de Léonard est celle de Bayle: «........ Je suis bien aise, écrivait-il à son cousin, M. de Naudis, le 29 octobre 1696, que nos cousins aient du goût pour les Essais de Morale de M. Nicole; il y a un autre livre fort propre pour donner de l'esprit aux jeunes gens et à leur affiner le goût, ce sont les Caractères de ce siècle par feu M. de la Bruyère; c'est un livre incomparable, et qui a été réimprimé huit ou neuf fois à Paris en peu de temps et à Lyon et à Bruxelles autant de fois. Il faut avoir la dernière édition, qui est la plus ample1. Ce ne sont pas des caractères faits à plaisir ; il a peint l'esprit et l'humeur et les défauts de presque toute la cour et de la ville, et plusieurs personnes en ont la clef. 2 »

Et encore, le 31 octobre 1697, s'adressant à un cousin que l'on ne nomme point : « Je conseille cette lecture (de la Connoissance de soi-même) à nos deux cousins du Carla, comme aussi celle des Caractères de ce siècle par feu M. de la Bruyère; c'est un livre qui a été admiré et qui, en très peu de temps, a été imprimé huit fois à Paris, sans compter les éditions de Lyon et de Bruxelles, qui sont en grand nombre.3 »

Sauf celles de Michallet, de Léonard, d'Amaulry, de Baritel, et enfin de David, toutes les éditions des Caractères qui parurent au dix-septième siècle ou dans les premières années du dix-huitième sont des contrefaçons.

Au tome I, page CXX, nous avons porté à 18 000 le nombre d'exemplaires des Caractères que Michallet imprima du vivant de la Bruyère : l'évaluation peut sembler élevée, les tirages d'une édition à cette époque n'atteignant que rarement le chiffre de deux mille, mais elle nous vient

1. Rappelons que la go édition dont il est ici question n'a pas plus d'étendue que la 8, dont elle est l'exacte reproduction à quelques mots près.

2. OEuvres diverses de Bayle, 1737, tome I, p. 179.

3. Ibidem, p. 182.

LA BRUYÈRE. Iv

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de Dom Bernard de Montfaucon, qui paraît assez exactement renseigné sur ce qui se passait à l'imprimerie Michallet, car il savait, au début de 1696, que la neuvième édition était sous presse. Montfaucon avait tort d'ajouter qu'elle avait reçu « quelque augmentation par ci par là » : l'auteur y avait simplement fait quelques retouches «< par ci par là ». Chacune des trois impressions d'Amaulry comptait sans doute un moindre tirage que celles de Michallet, bien que l'une d'elles ait pu fournir plusieurs émissions avec dates différentes, et d'autre part le tirage des trois premières éditions de Léonard avait dû être encore plus restreint. Du moins pouvons-nous dire que de 1688 à 1696 il fut mis en circulation de 24 000 à 30 000 exemplaires des Caractères.

LES CARACTÈRES DE THEOPHRASTE TRADUITS DU GREC. AVEC LES CARACTÈRES OU LES MOEURS DE CE SIECLE. A PARIS, Chez ESTIENNE MICHALLET, premier Imprimeur du Roy, ruẽ S. Jacques, à l'Image saint Paul. M.DC.LXXXVIII. Avec Privilege de Sa Majesté.

In-121.

PREMIÈRE ÉDITION. Les 30 premiers feuillets, non chiffrés, contiennent, avec le titre2, le Discours sur Théophraste. Les Caractères du moraliste grec commencent à la page 53, qui devrait être chiffrée 61 (nous reviendrons sur cette pagination), et finissent à la page 149; ceux de la Bruyère remplissent les pages 151 à 360. Le volume se termine par 2 feuillets non paginés; le premier, avec la signature Q, contient le privilège; le second, dont les pontuseaux sont marqués dans un autre sens que ceux du privilège et qui a été ajouté après l'impression, manque dans un certain nombre d'exemplaires. Il porte l'Errata. La plupart des fautes que signale cet Errata sont manifestement imputables à l'imprimeur. Nous le reproduisons textuellement, en faisant remarquer qu'il s'en faut que toutes les corrections désirables y aient été relevées3.

1. Le même titre, sans le nom de l'auteur, a été conservé pour toutes les éditions publiées à Paris du vivant de la Bruyère. Elles ne diffèrent les unes des autres que par l'indication du numéro de l'édition, à la suite duquel, à partir de la 4o, il est dit, dans toutes, sauf la 6e, qu'il y a eu soit revision et correction; soit, de plus, augmentation; soit, simplement, augmentation: voyez ci-après les divers titres, chacun à son rang. Entre du grec et avec il y a un point sur le titre de la 1re édition; deux points sur ceux de la 2de à la 7; une virgule sur ceux des 8e et ge. A partir de la 4o, les lignes du titre sont imprimées les unes en encre noire, les autres en encre rouge. Si nous laissons de côté les fleurons formés d'ornements typographiques, le monogramme du libraire, ainsi que les culs-de-lampe, qu'il n'y a d'intérêt à comparer entre eux que pour les exemplaires annoncés comme faisant partie de la « Seconde édition, » nous n'avons à relever, dans chacune des éditions de Michallet, que deux fleurons gravés, l'un en tête du Discours sur Théophraste, l'autre en tête des Caractères de la Bruyère. L'ensemble de ces fleurons ne présente, dans les diverses éditions, que trois types, l'un signé P. S., les deux autres P. L. S.

2. Le titre fait partie de la première feuille dans toutes les éditions originales des Caractères.

3. En dehors des fautes signalées déjà au bas des pages de notre texte et sans nous arrêter à celles qui se sont glisées dans les cartons, voici les corrections qu'on aurait pu ajouter dans l'Errata: 7 page, non chiffrée : cet ébauche; p. 168, ligne 21 sans, pour dans; p. 331, lignes 8 et 9: un, deux fois imprimé ; p. 359, ligne 2: sens, pour sons. Il y a dans la première édition des Caractères des erreurs de pagination, telles que celles des pages 131, 232, 260, 285, 288, et celles des pages 165, 168, et 273; ces trois dernières sont correctement chiffrées dans la première impression et inexactement sur les cartons.

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