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Elle est là cependant, je l'entends qui respire;
Mais, pendule éternel que sa puissance attire,
Je passe et je repasse et tâte l'ombre en vain;

Ne pourrai-je allonger cette corde flottante,
Ni remonter au jour dont la gaîté me tente?
Et dois-je dans l'horreur me balancer sans fin?

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Jeune homme sans mélancolie,
Blond comme un soleil d'Italie,
Garde bien ta belle folie.

25

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Ni les fleurs dont jamais nous rimes,
Et, qui pis est, au bout des vers

15

Nous ne dédaignons pas les rimes.

En dépit de Schopenhauer,
Ce cruel malade qui tousse,
Vivre et savourer le doux air
Nous semble une chose fort douce,

Et dans la bonne odeur des pins
Qu'on voit ombrageant les clairières,
Nous sommes les tendres lapins

Assis sur leurs petits derrières.

-Sonnailles et Clochettes, 27 novembre, 1888.

COPPÉE

(1842-1908)

"LA PETITE MARCHANDE DE FLEURS"

Le soleil froid donnait un ton rose au grésil,
Et le ciel de novembre avait des airs d'avril.
Nous voulions profiter de la belle gelée.
Moi chaudement vêtu, toi bien emmitouflée

20

25

Sous le manteau, sous la voilette et sous les gants,
Nous franchissions, parmi les couples élégants,
La porte de la blanche et joyeuse avenue,
Quand soudain jusqu'à nous une enfant presque nue
Et livide, tenant des fleurettes en main,
Accourut, se frayant à la hâte un chemin
Entre les beaux habits et les riches toilettes,
Nous offrir un petit bouquet de violettes.
Elle avait deviné que nous étions heureux
Sans doute, et s'etait dit: "Ils seront généreux.”
Elle nous proposa ses fleurs d'une voix douce,
En souriant avec ce sourire qui tousse.

Et c'était monstrueux, cette enfant de sept ans
Qui mourait de l'hiver en offrant le printemps.
Ses pauvres petits doigts étaient pleins d'engelures.
Moi, je sentais le fin parfum de tes fourrures,
Je voyais ton cou rose et blanc sous la fanchon,
Et je touchais ta main chaude dans ton manchon.
Nous fimes notre offrande, amie, et nous passâmes;
Mais la gaîté s'était envolée, et nos âmes
Gardèrent jusqu'au soir un souvenir amer.

Mignonne, nous ferons l'aumône cet hiver.

-Les Intimités, XIII, 1868.

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L'HOROSCOPE

Les deux sœurs étaient là, les bras entrelacés,
Debout devant la vieille aux regards fatidiques,
Qui tournait lentement de ses vieux doigts lassés
Sur un coin de haillon les cartes prophétiques.

25

Brune et blonde, et de plus fraîches comme un matin,
L'une sombre pavot, l'autre blanche anémone,
Celle-ci fleur de mai, celle-là fleur d'automne,
Ensemble elles voulaient connaître le destin.

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"La vie, hélas! sera pour toi bien douloureuse," Dit la vieille à la brune au sombre et fier profil.

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