Page images
PDF
EPUB
[graphic][graphic][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed]

V

NOTE SUR DEUX MANUSCRITS D'UNE RELATION DES

PLAISIRS DE L'ILE ENCHANTÉE.

Un souvenir de ces brillantes fêtes de l'Ile enchantée fut particulièrement offert à Louis XIV; il est aujourd'hui encore conservé à la Bibliothèque nationale '; c'est un magnifique volume in-folio, au-devant duquel l'artiste ou l'amateur qui l'a exécuté a mis une épître au Roi signée DE BIZINCOURT. Sur les soixante-dix-huit feuillets, en peau de vélin, encadrés d'un filet d'or, dont il se compose, a été écrite avec une rare perfection calligraphique, et illustrée de toutes sortes d'ornements, une relation succincte des trois premières journées seulement; elle est presque toute empruntée aux avant-propos du Livret de la fête donné ci-dessus (p. 234 et suivantes); on y a inséré tout au long, comme dans celui-ci, les vers de Périgny et de Bensserade, puis plusieurs autres épigrammes laudatives ou inscriptions, françaises et latines, qui ne se lisent point dans les imprimés; on y a joint en outre de petites notices énumérant les noms et dignités des seigneurs qui figurèrent dans le carrousel. Les figures coloriées des devises, les armoiries peintes, plusieurs grands dessins noirs au lavis, et surtout un portrait en miniature du Roi, d'une expression sans doute peu flattée, font tout l'intérêt de ce manuscrit on y chercherait en vain la figure ou même le nom de Molière.

[ocr errors]

Il existe encore à la même bibliothèque une sorte de reproduction de ce manuscrit, mais faite sur papier, très-librement pour les dessins, et en général avec beaucoup moins de soin et de luxe; cette copie a successivement appartenu aux bibliothèques Seguier, Coislin et de l'abbaye Saint-Germain des Prés.

M. Paul Lacroix, p. 49 de sa Bibliographie moliéresque (note au n° 195), signale un manuscrit sur papier, ayant appartenu au comte de Noailles, puis figuré dans un catalogue de 1811, et dont il regrette la disparition; mais il est probable que ce manuscrit, intitulé comme les deux de la Bibliothèque nationale, n'est qu'une autre copie, tout aussi peu précieuse, de l'exemplaire royal.

1. Manuscrits français, n° 7834. Le titre, au bas et vers l'angle droit d'un frontispice colorié, est : Les Plaisirs de l'Ile enchantée ordonnés par Louis XIV, roi de France et de Navarre. A Versailles le 6 mai 1664. » Un second titre disposé de même à l'angle gauche d'un autre frontispice, feuillet 70, porte: « Les Plaisirs de l'Ile enchantée du second et troisième jour.» La reliure, jadis verte, est aux armes du Roi et toute semée d'L couronnées et de lis. 2. Même fonds, no 16 635.

LE TARTUFFE

OU

L'IMPOSTEUR

COMÉDIE

Les trois premiers actes de cette comédie ont été représentés à Versailles pour le Roi le 12° jour du mois. de mai 1664.

Les mêmes trois premiers actes de cette comédie ont été représentés, la deuxième fois, à Villers-Cotterets, pour S. A. R. MONSIEUR, frère unique du Roi, qui régaloit Leurs Majestés1 et toute la cour, le 25° septembre de la même année 1664.

Cette comédie, parfaite, entière et achevée en cinq actes, a été représentée, la première et la seconde fois, au château du Raincy, près Paris, pour S. A. S. Monseigneur le Prince, les 29° novembre 1664 et 8° novembre de l'année suivante 1665, et depuis encore au château de Chantilly, le 20° septembre 1668*.

La première représentation en a été donnée au public dans la salle du Palais-Royal, le 5 août 1667, et le lendemain 6o elle fut défendue par Monsieur le premier président du Parlement jusques à nouvel ordre de Sa Majesté.

La permission de représenter cette comédie en public sans interruption a été accordée le 5 février 1669, et dès ce même jour la pièce fut représentée par la troupe du Ror3.

1. La Reine mère et le Roi vinrent successivement à VillersCotterets pendant le séjour qu'y firent en septembre Monsieur et Madame; mais, si l'on en croit la Gazette, aucune des Majestés n'assista à la représentation de Tartuffe. Sur l'absence du Roi cependant il reste un doute: voyez la Notice, ci-après, p. 290.

2. Sur une autre représentation, probablement encore du Tartuffe, donnée en 1668 chez Condé, à Paris, voyez ci-après, p. 293. 3. Cette petite notice historique est imprimée sur la page de titre et son verso, dans l'édition de 1682.

NOTICE.

Les éditions des œuvres de Molière ont jusqu'ici placé Tartuffe après les comédies représentées pour la première fois en 1665, en 1666 et au commencement de 1667. Toutes, avant celle de 1734, l'avaient même fait précéder des trois comédies jouées en 1668, Amphitryon, George Dandin et l'Avare. C'est que les premiers éditeurs n'ont voulu dater l'acte de naissance de Tartuffe que du jour (5 février 1669) où lui avait été ouverte la libre carrière des représentations suivies; il a paru aux autres qu'il était vraiment né dès le 5 août 1667, ayant pu se montrer alors au grand public, quoique pour disparaître aussitôt.

Ces dates de 1669 et de 1667, sous lesquelles on a tour à tour fait prendre rang à Tartuffe, sont également arbitraires. et inexactes. Pour l'étude du développement du génie de Molière, il n'est pas indifférent de constater dans quel ordre ses productions se sont réellement succédé. Il est surtout fâcheux de ne pas clairement établir que Tartuffe n'a nullement suivi, mais a comme engendré Dom Juan, qui, plusieurs mois après cette pièce, en a redoublé les coups, et qui porte la trace des luttes soutenues par le poëte contre les persécutions. Deux exemples montrent bien l'inconvénient de l'ordre adopté dans les éditions de Molière. Cailhava, parmi les beautés les plus frappantes de Dom Juan, cite « le portrait si sublime de l'hypocrisie (acte V, scène 11) nous préparant d'avance à la perfection du Tartuffe1. » La Harpe, dont l'anachronisme est encore plus clair, a dit : « Le morceau sur l'hypocrisie an

1. Études sur Molière, p. 126.

« PreviousContinue »