Page images
PDF
EPUB

selon Ducangea. Le seigneur se levait, allait à lui, et lui donnait l'accolade ou accolée ou colée, trois coups du plat de son épée sur l'épaule ou sur la nuque3, et quelquefois un coup de la paume de la main sur la joue, en disant: “Au nom de Dieu, de saint Michel et de saint George, je te fais chevalier." Et il ajoutait quelquefois: “Sois preux, hardi et loyal."

Le jeune homme ainsi armé chevalier, on lui apportait son casque, on lui amenait un cheval; il sautait dessus, ordinairement sans le secours des étriers, et caracolait en brandissant sa lance et faisant flamboyer son épée. Il sortait enfin de l'église, et allait caracoler sur la place, au pied du château, devant le peuple, avide de prendre sa part du spectacle.

GUIZOT. Histoire de la civilisation en France.

GUIZOT (François-Pierre-Guillaume),

Né à Nîmes, en 1787. Auteur vivant. Dès 1811, il publia ses Annales de l'éducation et travailla à la rédaction de plusieurs journaux. En 1812, il fut nommé professeur d'histoire moderne à la Faculté des lettres, et au retour des Bourbons, il remplit successivement les charges de secrétaire-général du département de la justice et de conseiller d'État. Élu membre de la chambre des députés en 1830, M. Guizot prit une part active aux événements de la révolution qui renversa le trône de Charles X. Sous le règne de Louis-Philippe Io1, il devint à différentes époques ministre de l'instruction publique, de l'intérieur et des affaires étrangères. Déchu de ces hautes dignités par la révolution de février 1848, M. Guizot se réfugia en Angleterre jusqu'en 1850.

Une foule d'excellents ouvrages sont sortis de la plume féconde de M. Guizot; les principaux sont: Dictionnaire des Synonymes français; Vie de Corneille et de Shakespeare; une traduction de Gibbon; Essais sur l'histoire de France; Histoire de la civilisation européenne; Histoire de la civilisation en France; Histoire de la révolution d'Angleterre, depuis l'avénement de Charles Ier jusqu'à la restauration de Charles II; Introduction à la vie de Washington, etc.; et, tout récemment (en 1849), De la démocratie en France, écrit d'une haute importance à l'époque actuelle.

M. Guizot est protestant. Il est en outre membre de l'Académie française et un de nos premiers orateurs.

Ducange (Charles Dufresne). Historien et glossateur célèbre, né en 1610, mort en 1688.

BATAILLE DE BOUVINES.

Jean Sans-Terre, menacé dans sa couronne d'Angleterre par Philippe-Auguste et par ses propres sujets, se ligua contre le roi de France avec Othon IV, empereur d'Allemagne, et les comtes de Flandre et de Boulogne. Les armées se rencontrèrent à Bouvines, village du département du Nord à deux lieues et demie de Lille, le 27 juillet 1214. Les Français terrassèrent cette ligue européenne, et fondèrent en cette journée le premier monument de leur gloire nationale.

La bataille se donna le 27 juillet, un des jours les plus chauds de l'année, sous un soleil ardent, et dura depuis midi jusqu'à la nuit. Le roi, qui avait marché toute la matinée, ne comptait pas combattre dans ce jour. Il avait pris la résolution de faire reposer ses troupes harassées, et lui-même jouissait d'un peu de fraîcheur au pied d'un frêne, lorsqu'on vint l'avertir que les ennemis paraissaient. Il entendait déjà, dans les postes avancés, le cliquetis1 des armes. Aussitôt il reprend les siennes, fait une courte prière dans une chapelle qui se trouvait près de lui; et, comme il soupçonnait des traîtres dans son camp, il imagine de les lier par une espèce de serment qu'ils auraient honte de rompre. Ce monarque fait poser son sceptre et sa couronne sur un autel portatif, à la vue de son armée; puis élevant la voix: "Seigneurs français," dit-il, "et vous, valeureux soldats, qui êtes prêts à exposer votre vie pour la défense de cette couronne, si vous jugez qu'il y ait quelqu'un parmi vous qui en soit plus digne que moi, je la lui cède volontiers, pourvu que vous vous disposiez à la conserver entière, et à nè la pas laisser démembrer par ces excommuniés." "Vive Philippe! vive le roi Auguste!” s'écrie toute l'armée; "qu'il règne, et que la couronne lui reste à jamais! nous la lui conserverons aux dépens de nos vies." Le roi prend alors son casque, monte à cheval et vole à la tête de l'armée. Les prêtres entonnent les psaumes, les trompettes sonnent, et la charge commence.

L'ordre de bataille des confédérés était de porter tous

leurs efforts contre la personne du roi, persuadés que, lui tué ou fait prisonnier, leurs projets n'éprouveraient ni obstacles, ni retardement. Ainsi trois escadrons d'élite devaient l'attaquer directement, pendant que, de chaque côté, un autre de même force tiendrait en échec ceux qui voudraient venir à son secours.

L'Empereur commandait ces trois escadrons; il marchait précédé d'un chariot qui portait l'aigle d'or sur un pal2 de même métal. Othon fond impétueusement sur la troupe royale. Le choc est soutenu avec fermeté; mais le nombre l'emporte. Philippe est renversé, et foulé aux pieds des chevaux. En vain le chevalier qui portait l'étendard auprès de lui, le haussait et le baissait pour avertir du danger où se trouvait le roi, et appeler du secours; serrés de trop près eux-mêmes par les escadrons qu'on leur avait opposés, les plus voisins du roi se soutenaient à peine, loin de pouvoir courir à son aide. Cependant ils font un effort commun, repoussent les assaillants, et attaquent à leur tour: Philippe est remonté; il tombe comme la foudre sur ses ennemis, le chariot impérial est renversé, l'aigle enlevée. Othon, trois fois démonté, saisi au corps par un chevalier français, et délivré par les siens, prend un des premiers la fuite. Les comtes de Flandre et de Boulogne, qui avaient le plus grand intérêt à ne pas tomber entre les mains du roi, entretinrent longtemps le combat, mais furent enfin faits prisonniers et présentés au roi. Après de durs reproches, il les fit charger de fers. Renaud fut enfermé dans un noir cachot, attaché à une grosse chaîne, qui lui permettait à peine d'en parcourir l'espace; et Ferrand fut traîné à la suite du roi pour servir à son triomphe.

ANQUETIL (Louis-Pierre),

ANQUETIL

Littérateur et historien distingué; né à Paris en 1723, et mort en 1808. Entr'autres ouvrages historiques, ceux qui ont le plus contribué à sa réputation sont le Précis d'histoire universelle, et l'Histoire de France depuis les Gaulois jusqu'à la mort de Louis XVI.

LES VÊPRES SICILIENNES.

Les Français étaient maîtres de Palerme, capitale de la Sicile. Charles, comte d'Anjou, frère de Louis IX, avait été, en 1263, investi du royaume de Naples et de Sicile. Les Siciliens, irrités de sa cruauté et des vexations qu'ils éprouvaient de la part des Français, se soulevèrent spontanément, et en firent un massacre général.

Le lendemain de Pâques, lundi 30 mars 1282, les Palermitains, selon leur usage, se mirent en route pour entendre vêpres à l'église de Montréal, à trois milles de leur ville. C'était leur promenade ordinaire les jours de fête, et les hommes et les femmes couvraient le chemin qui conduit à cette église. Les Français établis à Palerme, et le vicaire royal lui-même, prenaient part à la fête et à la procession. Celui-ci cependant avait fait publier qu'il défendait aux Siciliens de porter des armes pour s'exercer à les manier, selon l'ancien usage, dans ces jours consacrés au repos. Les Palermitains étaient dispersés dans la prairie, cueillant des fleurs, et saluant par leurs cris de joie le retour du printemps, lorsqu'une jeune vierge, non moins distinguée par sa beauté que par sa naissance, s'acheminait vers le temple, accompagnée de l'époux auquel elle était promise, de ses parents et de ses frères. Un Français, nommé Drouet, s'avança insolemment vers elle; et, sous prétexte de s'assurer si elle ne portait pas des armes cachées sous ses habits, il la fouilla de la manière la plus indécente. La jeune femme tomba évanouie entre les bras de son époux ; mais un cri de fureur s'élevait autour d'elle: "Qu'ils meurent! qu'ils meurent, les Français!" Et Drouet, percé de sa propre épée, fut la première victime de la rage populaire. De tous les Français qui assistaient à la fête, pas un seul n'échappa: quoique les Siciliens fussent encore désarmés, ils en égorgèrent deux cents dans la campagne, tandis que les cloches de l'église de Montréal sonnaient le service des vêpres. Les Palermitains rentrèrent dans la ville, répétant toujours le même cri: "Qu'ils meurent, les Français !" Et ils recommencèrent le carnage. Hommes, femmes, enfants,

tout ce qui appartenait à cette nation détestée, fut mis à mort. Quatre mille personnes périrent dans cette première nuit......Les habitants de Bicaro, et ensuite ceux de Corileone, se joignirent à ceux de Palerme, en scellant leur alliance du sang des Français qu'ils trouvèrent chez eux, tandis que ceux de Catalasino, gouvernés par le respectable Guillaume des Porcelets, qui n'avait pas méconnu l'humanité ou la justice, renvoyèrent avec honneur, de l'autre côté du phare, cet homme vertueux et toute sa famille.

SIMONDE DE SISMONDI. Histoire des républiques italiennes du moyen-âge.

SISMONDI (Jean-Charles-Léonard SIMONDE DE),

Né à Genève en 1773, mort en 1842. Parmi ses ouvrages, on distingue les Nouveaux éléments d'économie politique, l'Histoire des républiques italiennes, et l'Histoire des Français, travail précieux où l'auteur présente une peinture fidèle et vraie des mœurs, des idées, des sentiments du peuple français, se manifestant par ses actes. Cette manière toute nouvelle de traiter l'histoire servira de modèle aux écrivains du siècle et de l'avenir.

JEANNE DE MONTFORT.

LA guerre s'étant déclarée en Bretagne, sous Philippe VI de Valoisa, entre le comte de Montfort et Charles de Blois, le roi d'Angleterre fit passer des troupes au comte de Montfort, et le roi de France envoya le duc de Normandie soutenir la cause de son neveu. Le comte de Montfort fut fait prisonnier dans cette guerre sanglante, et laissa à sa femme le commandement de ses troupes et le soin de le venger. Alors tout le poids de la guerre tomba sur elle. Elle se retira dans Hennebon1. Le comte de Blois mit le siége

Philippe VI de Valois monta sur le trône en 1328, à la mort de son cousin Charles-le-Bel. Il mourut en 1350. C'est sous son règne, en 1346, que les Français perdirent la bataille de Crécy, dans laquelle périrent, selon quelques historiens, 30,000 hommes, et où, pour la première fois, les Anglais, commandés par Edouard III, firent usage de l'artillerie, ce qui leur assura la victoire.

b Hennebon, petite ville de Bretagne, dans le département du Morbihan.

« PreviousContinue »