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par la justice, qu'aucun intérêt vivant ne peut corrompre. Devant le tribunal de l'histoire, les conquérants descendent de leurs chars de triomphe, les tyrans n'effraient plus par leurs satellites, les princes nous apparaissent sans leur cortége, et dépouillés de la fausse grandeur que leur prêtait la flatterie...

L'amour des Grecs pour la liberté peut échauffer votre âme; mais leurs jalousies, leur légèreté, leur ingratitude, leurs querelles sanglantes et leur corruption, vous annoncent et vous expliquent leur ruine.

Si le colosse romain vous impose par sa vaste puissance, vous ne tardez pas longtemps à distinguer les vertus qui firent sa grandeur, et les vices qui amenèrent sa décadence. . . .

Partout enfin vous trouvez la preuve de cette antique maxime, qu'à la longue il n'y a d'utile que ce qui est honnête, qu'on n'est véritablement grand que par la justice, et complètement heureux que par la vertu. Le temps distribue avec équité les récompenses et les châtiments, et vous pouvez mesurer l'accroissement et la décadence des peuples sur la sévérité ou sur la dépravation de leurs mœurs. La vertu est le ciment de la puissance des nations; elles tombent dès qu'elles sont corrompues. LE COMTE DE Ségur.

.

SEGUR (Louis-Philippe, comte de),

Né à Paris en 1753, mort en 1830. M. de Ségur s'est distingué dans la carrière des armes, de la diplomatie et de la littérature. Il a lui-même décrit dans cette phrase tout ce qu'il a été: “Le hasard a voulu que je fusse successivement officier-général, ambassadeur, poëte, auteur dramatique, publiciste, historien, député, 'conseiller-d'état, sénateur, académicien et pair de France."

Les compositions historiques de cet auteur jouissent d'une brillante réputation. Nous citerons entr'autres l'Histoire de FrédéricGuillaume; le Tableau politique de l'Europe depuis 1786 jusqu'en 1796; l'Histoire de l'Europe moderne; et l'Histoire universelle ancienne et moderne, ouvrage précieux où les faits historiques sont présentés de la manière la plus intéressante et dans un style animé, pur et élégant.

PENSÉES ET MAXIMES DE DIVERS AUTEURS.

LA bonne éducation de la jeunesse est le garant le plus sûr du bonheur d'un état.

Une jeunesse studieuse amène naturellement une instruite.

virilité

Ménagez tout, fortune, instruction, amis, santé, pour la vieillesse; sa débilité ne trouve jamais assez d'appuis.

La connaissance de soi-même est le fondement de toutes les vertus.

L'ennui est entré dans le monde avec la paresse.

L'imagination galope, le jugement ne va qu'au pas. L'homme faible tremble devant l'opinion, le fou la brave, le sage la juge.

La modestie, la plus touchante des vertus, est encore la plus séduisante des parures.

Le goût est à l'esprit ce que la grâce est à la beauté. L'amour-propre est plus habile que le plus habile homme

du monde.

Les hypocrites, comme les abeilles, ont le miel à la bouche et l'aiguillon caché.

La parfaite valeur est de faire sans témoins ce qu'on serait capable de faire devant tout le monde.

La leçon de l'avenir est dans la contemplation du passé. Il faut choisir dans les meilleurs auteurs certains lieux si éclatants, qu'il soit important de ne les oublier jamais.

Qui pourrait dire, combien de siècles a vécu celui qui a beaucoup senti et médité?

La plus belle généalogie est une suite de services rendus à son pays, à l'humanité.

La vérité est comme la rosée du ciel; pour la conserver pure, il faut la recueillir dans un vase pur.

L'esprit de l'homme est un fruit sauvage, la culture seule peut le rendre doux.

Ce n'est point un grand avantage d'avoir l'esprit vif, si on

ne l'a juste. La perfection d'une pendule n'est pas d'aller vite, mais d'être réglée.

Avez-vous quelquefois réfléchi au prodige de l'énorme consommation et de la constante reproduction des grains qui sustentent les générations successives?

Le monde vu de loin est comme une riante perspective; tout le charme disparaît lorsqu'on y pénètre.

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Quand vous aurez acheté une belle chose," dit Franklin, "il vous en faudra acheter encore dix pour que tout soit uniforme."

On ne demande que quatre choses à une femme: que la vertu habite dans son cœur ; que la modestie brille sur son front; que la douceur découle de ses lèvres, et que le travail occupe ses mains.

Peut-il y avoir d'autres guerres que les guerres civiles, puisque tous les hommes sont frères?

Les personnes comblées des dons de la fortune sont comme des vaisseaux trop chargés qui risquent plus que les autres de couler à fond.

Parlez peu de vous au superlatif, afin qu'on n'en parle pas beaucoup au diminutif.

"C'est l'usage" est une mauvaise raison qui dispense d'en donner une bonne.

Le meilleur code grammatical se trouve dans les grands écrivains d'une nation.

La jeunesse en acquérant des talents se dote elle-même. S'abandonner à la colère, c'est souvent venger sur soi la faute d'un autre.

L'acception des mots s'altère, se détourne si facilement, qu'une multitude de fous se disent philosophes, oubliant que ce mot veut dire: “Ami de la sagesse."

Se glorifier de la noblesse de ses ancêtres, c'est chercher dans les racines le fruit qu'on devrait trouver dans les branches.

Tout le monde se plaint de sa mémoire, et personne ne se plaint de son jugement.

Le luxe est une divinité bizarre, à laquelle on sacrifie le nécessaire pour en obtenir le superflu.

On rirait souvent de l'homme le plus actif, si l'on savait pour quelles bagatelles il s'agite.

Les faux amis sont comme l'ombre du cadran solaire, ils s'évanouissent avec le soleil.

Entre un penseur et un érudit, il y a la même différence qui se trouve entre un livre et une table des matières.

L'amitié ne se répand point en paroles, mais elle agit sans cesse ; ces prétendus amis qui ne parlent que de leurs cœurs, ressemblent à ces poltrons qui ne parlent que de bravoure et de combats.

L'homme fort souffre sans se plaindre; l'homme faible se plaint sans souffrir.

Chaque génération nouvelle s'imagine trouver un monde.

nouveau.

Si nous ne nous flattions point nous-mêmes, la flatterie des autres ne pourrait nous nuire.

Les principes reçus dans l'enfance ressemblent à ces caractères tracés sur l'écorce d'un jeune arbre, qui croissent, qui se développent avec lui, et font partie de luimême.

Il est beau d'écrire ce que l'on pense, c'est le privilége de l'homme.

Les belles-lettres et les beaux-arts peuvent nous placer dans l'élite de la nation.

Quelque état que l'homme embrasse, le travail en fait son occupation dans la jeunesse, son soutien dans l'âge mûr, sa consolation dans la vieillesse.

Le bonheur domestique est à la longue le plus solide et le plus doux.

MAXIMES DE LA ROCHEFOUCAULD.

CELUI qui croit pouvoir trouver en soi-même de quoi se passer de tout le monde, se trompe fort; mais celui qui croit qu'on ne peut se passer de lui, se trompe encore davantage.

Un homme à qui personne ne plaît est bien plus malheureux que celui qui ne plaît à personne.

Personne n'ignore que les bons livres sont l'essence des

meilleurs esprits, le précis de leurs connaissances, et le fruit de leurs longues veilles. L'étude d'une vie entière s'y peut recueillir dans quelques heures: c'est un grand

secours.

De toutes les passions, celle qui est la plus inconnue à nous-mêmes, c'est la paresse; elle est la plus ardente et la plus maligne de toutes, quoique sa violence soit insensible, et que les dommages qu'elle cause soient très-cachés: si nous considérons attentivement son pouvoir, nous verrons qu'elle se rend en toutes rencontres maîtresse de nos sentiments, de nos intérêts et de nos plaisirs; c'est l'obstacle qui a la force d'arrêter les plus grands vaisseaux; c'est une bonace plus dangereuse aux plus importantes affaires que les écueils et que les plus grandes tempêtes.

LA ROCHEFOucauld.

LA ROCHEFOUCAULD (François duc de),

Célèbre moraliste français, né en 1619, mort en 1680. Connu principalement par ses Maximes.

INSOUCIANCE DU VULGAIRE.

LES inventions utiles, ainsi que les semences des végétaux, croissent et mûrissent sans bruit; les fruits en sont cueillis sans peine, et le vulgaire en jouit sans s'informer comment ni d'où elles viennent, et sans imaginer ce qu'elles ont coûté. BAILLY. (Voyez la page 81.)

PROGRÈS DU TEMPS.

DANS cent ans le monde subsistera peut-être encore en son entier ce sera le même théâtre et les mêmes décorations; ce ne seront plus les mêmes acteurs. Tout ce qui se réjouit sur une grâce reçue, ou ce qui s'attriste et se désespère sur un refus, tous auront disparu de dessus la scène. Il s'avance déjà sur le théâtre d'autres hommes qui vont jouer dans une même pièce, les mêmes rôles. Ils s'évanouiront à leur tour, et ceux qui ne sont pas encore un jour ne seront plus. De nouveaux acteurs auront pris leur place. LA BRUYÈRE. (Voyez la page 149.)

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