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ayons inabordé, surtout depuis trois siècles que l'on a découvert de nouvelles terres qui n'avaient jamais été abordées. Quel plaisir de réduire toute cette périphrase en un seul mot! dépeindre Colomb ou Gama, touchant, pour la première fois, des rives inabordées!» LA HARpe. C'est un nouveau mot dont notre langue s'est enrichie.

INABSTINENCE, s. f. défaut d'abstinence. « Un homme, dit La Harpe, est mort parce qu'il s'est nourri de viande pendant le cours d'une maladie qui lui prescrivait de ne vivre que de légumes et de lait. On dira que c'est l'usage de la viande qui l'a tué, et cela s'entendra. Cependant, cela n'est pas exact; car l'usage de la viande n'est pas une chose nuisible ni mortelle par ellemême : il est mort pour ne s'être pas abstenu de viande, quand il fallait s'en abstenir; c'est donc l'inabstinence de la viande qui l'a fait mourir. >>

L'usage n'a pas sanctionné ce néologisme, qui, suivant M. Laveaux, pourrait être adopté avec utilité, et sans inconvénient.

INACCOMMODABLE, adj. Affaire, procès inaccommodable. RICHELET, édit. de 1759.

INACCOUTUMANCE, s. f. insolentia, inassuetus usus. Dictionnaire de Pomey, in-4°, 1716.

Ce mot méritait bien d'être conservé, d'autant plus que nous disons inaccoutumé. Quelques auteurs l'ont rajeuni: l'inaccoutumance au mal; l'Académie aurait dû en confirmer l'usage.

INACCOUTUMÉ, ÉE, adj. qui n'a pas coutume de se faire, d'arriver.

« Le maniement des beaux esprits donne prix à la langue, non tant en l'innovant, qu'en la remplissant de plus vigoureux et divers services. Ils n'y apportent point de mots, mais ils enrichissent les leurs, appesantissent et enfoncent leur signification et leur usage; lui apprennent des mou

vemens inaccoutumés, mais prudemment et ingénieusement. » MONT. liv. III, ch. 5.

On trouve aussi ce mot dans Pasquier, liv. v1, c. 26.

« Les neiges, tombées au printems, en quantité inaccoutumée, avaient formé, dans ces monts, des amas que la chaleur de l'été avait peine à dissoudre. » RAMOND.

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Ce terme a pris, si l'on en croit les éditeurs du Dict. de Trévoux, la place d'insolite, qu'on disait autrefois. « Celui-ci, dit l'abbé Féraud a repris faveur, et il est plus d'usage aujourd'hui qu'inaccoutumé. L'Académie n'avait pas d'abord mis ce dernier dans son Dictionnaire; elle l'a inséré dans les dernières éditions. Ils sont tous deux bons à conserver, d'autant plus qu'inaccoutumé n'a pas tout-à-fait le même sens qu'insolite. »

INACHETÉ, ÉE, adj. « Nous dirions avec grâce, en poésie, des mets inapprêtés, et pourtant des mets inachetes ne nous rendraient-ils pas le dapes inemptas, si heureux dans le latín? » LA HARPE.

INACHEVÉ, ÉE, adj. « Nous sommes encore obligés de dire, en parlant de l'ancien Louvre : ce grand monument inachevé; ce qui n'est pas la même chose qu'imparfait. » LA

HARPE.

M. Chaussard dit, en parlant de La Pérouse :

Et de ses grands travaux, dont le monde est privé, Hélas! il laissera l'honneur inachevé.

Poétique secondaire, chant 11. INACTIF, IVE, adj. mot encore nouveau vers 1787. « Les spectacles inactif et lâche. » J. J. ROUSSEAU. ne serviraient qu'à rendre un peuple

M. Necker en fait un fréquent usage. Il paraît tout-à-fait établi.

INACTION, s. f. Ce mot commencait à s'employer du temps où Thomas Corneille publia ses Remarques sur Vaugelas, qui ne le permettait qu'en conversation.

Boursault l'avait employé dans son Esope à la Cour.

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« Elles ne valent pas une advertance et solicitude pénible. tom. vIII, pag. 30 ( 1793 ).

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« Oui, fais-je; mais je corrige les fautes d'inadvertance, non celles de coustume. » MONT. liv. III, ch. 5. Inadversion, pour inadvertance, ce mot n'est pas français et peut tout au plus être toléré dans des vers comme ceux de Scarron.

E quand je fais omission,
C'est par pure inadversion.

ISADVERTEMENT, adv. « Je corrigerois bien une erreur accidentale, de quoi je suis plein, ainsi que je cours inadvertement (puisque j'écris à la hate); mais, etc. » MONTAIGNE, l. 11,

ch. 5.

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Des mots pleins d'énergie et d'érudition,
Camme inintelligible, inaffectation.
Mais ce mot n'a pas fait fortune.

INAGITÉ, ÉE, adj. « On ne découvre le fond des fleuves et de la mer que quand l'eau est tranquille et inagitée. » HUBER, trad. de l'Hist. de l'art de l'antiquité, par Winckelminn, tom. II, pag. 93, in-4°.

INAIMABLE, adj. « Nous avons bien des gens inaimables, et cependant inaimable ne s'est point encore dit. VOLTAIRE.

INAMENDABLE, adj. qu'on ne peut amender, corriger.

Montaigne, liv. 11, c. 8, appelle la

difformité corporelle, « vice constant, inamendable. »

qui n'a que deux autorités, lesINAMUSABLE, adj. « Néologisme quelles me paraissent équivalentes à

rien celle de Dorat et celle de Demoustier. Leurs comédies ont pu trouver souvent le public inamusable; mais que n'étaient-elles amusantes ! » CH. NODIER, Examen critique des Dict. de la langue française. Voyez

AMUSABLE.

« Ces maudits insulaires sont bien les Jacques Rosbifs les plus inamusables!» DOrat.

INAMUSANT, TE, adj. « Il se peut qu'il y ait une nuance entre inamusant et ennuyeux; mais elle est si déliée, que je ne sais s'il y aurait un moyen de la déterminer. Ce qui n'est pas amusant est si près de l'ennui, en fait de choses qui doivent être amusantes, que bien peu

de personnes se chargeront de définir l'intermédiaire, si ce n'est peutêtre cet Anglais, à qui l'on demandait s'il s'amusait au spectacle: Je ne m'amuse ni ne m'ennuie, je suis bien. » LA HARPE.

INANITÉ, s. f, du latin inanitas (vide, inutilité, vanité). « Leur inanité leur donne poids et révé·

rence.» MONTAIGNE.

Cette marque peut-elle désigner et favorir l'inanité. » Le même. « Ils font l'énumération des peines du riche et montrent l'inanité de ses vains plaisirs. » ROUSSEAU, Emile,

liv. IV.

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dans le Dict. de Trévoux, mais avec la remarque qu'il n'est pas reçu dans l'usage ordinaire. Eh! pourquoi ne l'est-il pas ?

INAPERCEVANCE, s. f. « Bien sert à la décrépitude de nous fournir le doux bénéfice d'inapercevance et d'ignorance, et facilité à nous laisser tromper. Si nous y mordions, que seroit-ce de nous? MONTAIGNE, liv. 11, ch. 8.

INAPERÇU, UE, adj. qui n'est point aperçu, qu'on n'a pas encore aperçu.

« Une seconde lecture (l'auteur parle de Virgile) y découvre toujours un mérite inaperçu à la première. » DELILLE, trad. de l'Eneide, remarques sur le 1er liv.

Derrière le palais, il était une issue,
Une porte des Grecs encore inaperçue.

Le même, trad. de l'Eneide, liv. 1.

Ces réseaux mouvans, ces fils inaperçus, Que sous des toits déserts l'araignée a tissus.

BAOUR-LORMIAN.

Des habitans du fort Armide inaperçue
Se place, et du combat vient attendre l'issue.

Le méme, Jérusalem délivrée, ch. vII.

INAPPLICATION, s. f. Ce mot était encore nouveau du temps de Ménage, qui n'en blâme pas l'usage; et La Touche, au commencement du siècle dernier, le mettait au nombre des mots nouveaux dont on pouvait se servir sans scrupule.

INAPPRECIABLE, adj. qui ne peut être apprécié.

Pasquier a dit, liv. v, ch. 12, « une infinité de meubles précieux, impréciables. »

Le premier, qui, d'après les éditeurs du Dict. de Trévoux, n'était pas encore bien établi vers le milieu du dernier siècle, a seul été confirmé par l'usage.

INAPPRÊTÉ, ÉE, adj. qui n'est point apprêté, sans apprêt.

En parlant des animaux, Delille a dit:

Les mots inapprêtés qui forment leur repas.

Les trois Regnes de la Nature, ch, vin. La Harpe avait déjà remarqué qu'on dirait avec grâce, en poésie, des mets inapprétés. Voy. INACHETE.

INAPPRIVOISABLE, adj. qui ne peut être apprivoisé. Quelques écrivains ont employé ce néologisme.

« Le pinson, l'alouette, la linotte, le serin jasent et babillent tant que le jour dure; le soleil couché, ils fourrent leur tête sous l'aile, et les voilà endormis.

» C'est alors que le génie prend sa lampe, et que l'oiseau solitaire, sauvage, inapprivoisable, brun et triste de plumage, ouvre son gosier, commence son chant, fait retentir le bocage, et rompt mélodieusement le silence et les ténèbres de la nuit. »

DIDEROT.

Mercier a proposé inapprivoisé qui présente un autre sens. Pourquoi ne pas admettre ces deux adjectifs?

INAPTE, adj.« Devenu inapte aux affaires, le sultan en a jeté le fardeau sur des mercenaires, et les mercenaires l'ont trompé. » VOLNEY.

« On demandera peut-être, dit M. Laveaux, pourquoi inapte, lorsqu'on a inepte? Je pense que ces deux mots pourraient être employés pour exprimer deux nuances différentes. Il me semble, ajoute ce grammairien, que l'on est inepte par nature, par mauvaise constitution, et qu'on est inapte par accident, par négligence, faute d'exercice. Celui qui est inepte l'est toujours; on devient inapte, comme l'indique Volney dans la phrase citée. »

INAPTITUDE, s. f. défaut d'aptitude. Ce mot n'est pas ancien.

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« Si j'avais été fait comme autre, que j'eusse eu le talent d'emprunter et de m'endetter dans mon cabaret, je me serais aisément tiré d'affaire; mais c'est à quoi mon inaptitude égalait ma répugnance. » J. J. R. Conf. liv. IY.

IN ARTIFICIEL, ELLE, adj. contraire à artificiel; sans artifice.

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L'apologie de Socrates représente en une hardiesse inartificielle et sécurité enfantine, la pure et première impression et ignorance de nature. » MONT. liv. III, ch. 12.

Cet exemple et les autorités citées

par M. Pougens, dans son ArchéoIgie française, tom. 1, pag. 315,

vent suffisamment que l'abbé Feraud s'est trompé lorsqu'il a avance que ce mot était dû à Bossuet.

INASSIDUITÉ, s. f. « Il devint peu assidu au travail, et son inasside l'a jeté dans l'abandon qu'il éprouve.» MERcier.

Inassiduité est plus court que le defaut d'assiduité, et aussi clair. M. Laveaux pense que ce néologisme est indispensable, et nous nous rangeons de son avis.

INASSOCIABLE, adj. qui ne peut être associé.

« Mes mœurs mesmes, qui ne disconviennent de celles qui courent, à peine de la largeur d'un poulce, me rendent pourtant aucunement farouche à mon aage, et inassociable. » Host. liv. In, ch. 9.

INASSORTI, IE, adj. « On dirait bien un composé de choses inassorties; ce qui est fort différent de mal assorties. » LA HARPE.

INASSOUPI, IE, adj. « Un poète s'emparera volontiers des yeux inaspis, pour peu qu'il ait à parler d'Argus. » LA HARPE.

INASSOUVI, IE, adj. qui n'est point assouvi.

Sa rage inassouvie,
Qui des vainens poursuit encor la vie,
De la cite fait un vaste tombeau.

PARNY, les Rosecroix, ch. 1.
Puisqu'on dit assouvi, pourquoi
dirait-on pas inassouvi? C'est un

isme qu'il est bon d'admettre, parce qu'il est sonore, parce qu'il est nanalogie avec les autres mots de

notre langue, et qu'il épargne ces cirnocutions toujours longues et touFrs embarrassantes pour le poète : un'est point assouvi, qu'on ne peut, qu'on ne saurait assouvir, etc.

INASSURABLE, adj. qui ne peut

tre assuré.

Le néologisme, proposé par Mer, n'a point été reçu. « On disait In poete dramatique, connu par achute de plusieurs de ses pièces, te la dernière qu'il venait de don

ner avait paru réussir à la première représentation, mais que le succès en était encore inassuré. Quelqu'un répondit: Vous verrez qu'à la seconde il est inassurable. »

INATTAQUABLE, adj. Un officier s'excusait devant le marquis de Feuquières de n'avoir pas attaqué un poste, parce qu'il l'avait jugé inattaquable. Monsieur, lui dit le marquis, ce mot-là n'est pas français. »

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Il ne l'est pas dans le sens que lui donnait M. de Feuquières, car il est inconnu à nos braves; mais il se trouve aujourd'hui dans les dictionnaires de notre langue.

INATTENDU, UE, adj. Ce mot n'est pas fort ancien. « Une épithète bien choisie fait une impression vive et inattendue. » DE LA MOTTE, Disc. sur la Poésie.

<< Tout ce qui est inattendu saisit toujours. » VOLTAIRE.

Un bras inattendu porte un coup plus certain.
GRESSET, Edouard .

Des termes rapprochés l'hymen inattendu. CHENIER, Essai sur les princ. des arts, ch. 1. f. « Serait-ce un tort de dire: L'inattente de tout secours força les assiégés à capituler? » LA

INATTENTE

HARPE.

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S.

INATTENTIF, IVE, adj. qui n'a point d'attention.

Ce mot, quoique moins ancien que le suivant, est tout-à-fait établi. INATTENTION, s. f. défaut d'at

tention.

Ce mot, est-il dit dans le Dictionnaire de Trévoux, édit. de 1743, quoique nouveau, commence à être

fort usité.

INCARNÉ, ÉE, adj. M. Du Bucq, dont les traits, tantôt profonds, tantôt précieux, avaient un grand succès pelait les mots « la pensée incarnée. » dans la société de Mine Necker, apA laquelle des deux dénominations appartient celui-ci ?

INCENDIAIRE, adj. et s. « Tel propos qui est incendiaire d'un côté de la Seine, est patriotique à l'autre

IMPRIS, SE, adj. qui n'est pas, qui n'a pas été pris.

J'ai trouvé jusqu'ici le destin favorable,
Je suis encore impris, mais non pas imprenable.
Poème de Cartouche, ch. 1.

L'autorité n'est pas d'un grand poids; mais cette expression ne forcerait point à recourir à une périphrase.

IMPROBATEUR, m. IMPROBATRICE, f. s. et adj. mot encore plus nouveau que le suivant. On commençait, en 1787, à dire, et l'on dirait bien aujourd'hui : un murmure improbateur.

IMPROBATION, S. f. La marquise de Lambert est un des premiers écrivains qui aient employé ce mot. Il parait par les critiques du temps, qu'il n'était pas encore bien établi.

J'aurais de la répugnance, dit le P. Bouhours, à me servir d'improbation avec les sieurs de Montbrigny et de Chanteresne. » Doutes sur la langue française.

Nicole avait dit : « Il faut peu se' soucier de l'improbation des hommes. »

Et Mme de Sévigné, en parlant de lui: «C'est une perfection un peu au-dessus de l'humanité, que l'indifférence qu'il veut de nous pour l'estime ou l'improbation des hom

mes. »

IMPROBITÉ, s. f. Ce mot, que l'on croit né de la révolution, est d'une date beaucoup plus ancienne, car il se trouve déjà dans Charron : « Il est très-dangereux, dit-il, de juger de la probité ou improbité d'un homme par les actions, etc. » Sagesse, liv. 11, ch. 3.

Les journalistes de Trévoux ont dit qu'il n'était pas inhabile à devenir régnicole, mais qu'il n'était pas naturalisé.

La Harpe, qui l'approuve, dit qu'il a dù passer naturellement dans notre langue; il remarque seulement que si improbitas signifie, en latin, méchanceté, il n'exprime, en français, que la privation de la probité.

IMPROMPTU, s. m. ce qui se fait sur-le-champ, sans préméditation.

Ce mot est emprunté du latin in promptu (sur-le-champ). On trouve dans les auteurs de cette langue, in promptu esse (être tout prêt), in promptu habere (avoir én main); aussi s'est-il d'abord écrit in-promptu :

Ils pensoient tous qu'il devoit faire des in-promptu sur tout ce qu'on disoit.» MOLIÈRE, Critique de l'Ecole des femmes, sc. 11.

Ce nom a été donné particulièrement à une petite pièce de poésie assez semblable au madrigal ou à l'épigramme, mais dont le caractère propre et distinct est d'être faite sans préparation sur un sujet qui se présente. Nous voulons que, ces sortes de pièces soient le fruit d'un heureux moment, et qu'elles aient toujours un air simple, aisé, naturel, qui garantisse qu'elles n'ont point été faites à loisir c'est pourquoi nous per-mettons quelques licences dans ces sortes d'ouvrages en faveur de leur amusement passager. Le comte Hamilton en a prescrit les règles dans les vers suivans, où il définit l'impromptu :

Un certain petit volontaire,
Enfant de la table et du vin,
Difficile et peu nécessaire,
Vif, entreprenant, téméraire,
Etourdi, négligé, hadin,
Jamais rêveur ni solitaire,
Quelquefois délicat et fin,

Mais tenant toujours de son père.

Un des plus heureux impromptus est celui que fit le marquis de SaintAulaire pour la duchesse du Maine qui, en jouant, lui ordonna de lui dire son secret :

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