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Quel

que soit le plaisir que cause la vengeance, C'est l'acheter trop cher que l'acheter d'un bien Sans qui les autres ne sont rien.

mmmmmmmmmmmmu

FABLE XIV.

LE RENARD ET LE BUSTE.

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Les grands, pour la plupart, sont masques de théâtre;
Leur apparence impose au vulgaire idolâtre.
L'âne n'en sait juger que par ce qu'il en voit:
Le renard, au contraire, à fond les examine,
Les tourne de tout sens; et, quand il s'aperçoit
Que leur fait n'est que bonne mine,

Il leur applique un mot qu'un buste de héros
Lui fit dire fort à propos.

C'étoit un buste creux, et plus grand que nature.
Le renard, en louant l'effort de la sculpture:
<< Belle tête, dit-il; mais de cervelle point. »

Comme il étoit venu s'en retourna chez soi.
Où seroit le biquet, s'il eût ajouté foi
Au mot du guet que, de fortune,
Notre loup avoit entendu ?

Deux sûretés valent mieux qu'une;
Et le trop en cela ne fut jamais perdu.

mmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.

FABLE XVI.

LE LOUP, LA MÈRE, ET L'ENFANT.

Ce loup me remet en mémoire

Un de ses compagnons qui fut encore mieux pris :
Il y périt. Voici l'histoire :

Un villageois avoit à l'écart son logis.
Messer loup attendoit chape-chute à la porte;
Il avoit vu sortir gibier de toute sorte,
Veaux de lait, agneaux et brebis,
Régiment de dindons, enfin bonne provende.
Le larron commençoit pourtant à s'ennuyer.
Il entend un enfant crier :

La mère aussitôt le gourmande,
Le menace, s'il ne se tait,

De le donner au loup. L'animal se tient prêt,
Remerciant les dieux d'une telle aventure,
Quand la mère, apaisant sa chère géniture,
Lui dit : Ne criez point; s'il vient, nous le tûrons.
Qu'est-ce ci! s'écria le mangeur de moutons:
Dire d'un, puis d'un autre ! Est-ce ainsi que l'on traite
Les gens faits comme moi? me prend-on pour un sot?
Que quelque jour ce beau marmot
Vienne au bois cueillir la noisette...
Comme il disoit ces mots, on sort de la maison :
Un chien de cour l'arrête; épieux et fourches fières
L'ajustent de toutes manières.

Combien de grands seigneurs sont bustes en ce point! Que veniez-vous chercher en ce lieu ? lui dit-on.

mmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm

FABLE XV.

LE LOUP, LA CHÈVRE, ET LE CHEVREAU.

La bique, allant remplir sa traînante mamelle,

Et paître l'herbe nouvelle,
Ferma sa porte au loquet,
Non sans dire à son biquet:
Gardez-vous, sur votre vie,
D'ouvrir que l'on ne vous die,
Pour enseigne et mot du guet :
Foin du loup et de sa race!
Comme elle disoit ces mots,
Le loup, de fortune, passe;
Il les recueille à propos,
Et les garde en sa mémoire.
La bique, comme on peut croire,
N'avoit pas vu le glouton.

Dès qu'il la voit partie, il contrefait son ton,

Et d'une voix papelarde,

Il demande qu'on ouvre, en disant : Foin du loup!
Et croyant entrer tout d'un coup.

Le biquet soupçonneux par la fente regarde :
Montrez-moi pate blanche, ou je n'ouvrirai point,
S'écria-t-il d'abord. Pate blanche est un point
Chez les loups, comme on sait, rarement en usage.
Celui-ci, fort surpris d'entendre ce langage,

Aussitôt il conta l'affaire.

Merci de moi! lui dit la mère;

Tu mangeras mon fils! L'ai-je fait à dessein
Qu'il assouvisse un jour ta faim?

On assomma la pauvre bête.

Un manant lui coupa le pied droit et la tête :
Le seigneur du village à sa porte les mit;

Et ce dicton picard alentour fut écrit:

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Chacun se dit ami; mais fou qui s'y repose: Rien n'est plus commun que ce nom, Rien n'est plus rare que la chose.

FABLE XVIII.

LE VIEILLARD ET SES ENFANTS.

Toute puissance est foible, à moins que d'être unie : Écoutez là-dessus l'esclave de Phrygie.

Si j'ajoute du mien à son invention,

C'est pour peindre nos mœurs, et non point par envie;
Je suis trop au dessous de cette ambition.
Phèdre enchérit souvent par un motif de gloire;
Pour moi, de tels pensers me seroient malséants.
Mais venons à la fable, ou plutôt à l'histoire
De celui qui tâcha d'unir tous ses enfants.

Un vieillard près d'aller où la mort l'appeloit,
Mes chers enfants, dit-il (à ses fils il parloit),
Voyez si vous romprez ces dards liés ensemble;
Je vous expliquerai le nœud qui les assemble.
L'ainé les ayant pris, et fait tous ses efforts,
Les rendit, en disant : Je le donne aux plus forts.
Un second lui succède, et se met en posture,
Mais en vain. Un cadet tente aussi l'aventure.
Tous perdirent leur temps; le faisceau résista :
De ces dards joints ensemble un seul ne s'éclata.
Foibles gens, dit le père, il faut que je vous montre
Ce que ma force peut en semblable rencontre.
On crut qu'il se moquoit; on sourit, mais à tort:
Il sépare les dards, et les rompt sans effort.
Vous voyez, reprit-il, l'effet de la concorde :
Soyez joints, mes enfants; que l'amour vous accorde.
Tant que dura son mal, il n'eut autre discours.
Enfin se sentant près de terminer ses jours,

Mes chers enfants, dit-il, je vais où sont nos pères;
Adieu :
:: promettez-moi de vivre comme frères;
Que j'obtienne de vous cette grace en mourant.
Chacun de ses trois fils l'en assure en pleurant.
Il prend à tous les mains; il meurt. Et les trois frères
Trouvent un bien fort grand, mais fort mêlé d'affaires.
Un créancier saisit; un voisin fait procès :
D'abord notre trio s'en tire avec succès.
Leur amitié fut courte autant qu'elle étoit rare.
Le sang les avoit joints; l'intérêt les sépare:
L'ambition, l'envie, avec les consultants,
Dans la succession entrent en même temps.
On en vient au partage, on conteste, on chicane:
Le juge sur cent points tour à tour les condamne.
Créanciers et voisins reviennent aussitôt,
Ceux-là sur une erreur, ceux-ci sur un défaut.
Les frères désunis sont tous d'avis contraire :
L'un veut s'accommoder, l'autre n'en veut rien faire.
Tous perdirent leur bien, et voulurent trop tard
Profiter de ces dards unis et pris à part.

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Un païen, qui sentoit quelque peu le fagot,
Et qui croyoit en Dieu, pour user de ce mot,
Par bénéfice d'inventaire,

Alla consulter Apollon.

Dès qu'il fut en son sanctuaire :

Ce que je tiens, dit-il, est-il en vie ou non?
Il tenoit un moineau, dit-on,
Près d'étouffer la pauvre bête,
Ou de la lâcher aussitôt,

Pour mettre Apollon en défaut.
Apollon reconnut ce qu'il avoit en tête :
Mort ou vif, lui dit-il, montre-nous ton moineau,
Et ne me tends plus de panneau;

Tu te trouverois mal d'un pareil stratagème :
Je vois de loin; j'atteins de même.

FABLE XX.

L'AVARE QUI A PERDU SON TRÉSOR.

L'usage seulement fait la possession.
Je demande à ces gens de qui la passion
Est d'entasser toujours, mettre somme sur somme,
Quel avantage ils ont que n'ait pas un autre homme.
Diogène là-bas est aussi riche qu'eux;

Et l'avare ici-haut comme lui vit en gueux.
L'homme au trésor caché, qu'Ésope nous propose,
Servira d'exemple à la chose.

Ce malheureux attendoit
Pour jouir de son bien une seconde vie;
Ne possédoit pas l'or, mais l'or le possédoit.
Il avoit dans la terre une somme enfouie,
Son cœur avec, n'ayant autre déduit
Que d'y ruminer jour et nuit,

Et rendre sa chevance à lui-même sacrée.
Qu'il allât ou qu'il vînt, qu'il bût ou qu'il mangeât,
On l'eût pris de bien court à moins qu'il ne songeât
A l'endroit où gisoit cette somme enterrée.
Il y fit tant de tours, qu'un fossoyeur le vit,
Se douta du dépôt, l'enleva sans rien dire.
Notre avare un beau jour ne trouva que le nid.
Voilà mon homme aux pleurs: il gémit, il soupire,
Il se tourmente, il se déchire.

Un passant lui demande à quel sujet ses cris.—
C'est mon trésor que l'on m'a pris.—
Votre trésor ! où pris?-Tout joignant cette pierre.—
Eh! sommes-nous en temps de guerre
Pour l'apporter si loin? N'eussiez-vous pas mieux fait
De le laisser chez vous en votre cabinet

Que de le changer de demeure?

Vous auriez pu sans peine y puiser à toute heure.-
A toute heure, bons dieux ! ne tient-il qu'à cela?
L'argent vient-il comme il s'en va?

Je n'y touchois jamais.-Dites-moi donc, de grace,
Reprit l'autre, pourquoi vous vous affligez tant?
Puisque vous ne touchiez jamais à cet argent,
Mettez une pierre à la place;
Elle vous vaudra tout autant.

FABLE XIX.

L'ORACLE ET L'IMPIE.

Vouloir tromper le ciel, c'est folie à la terre.
Le dédale des cœurs en ses détours n'enserre
Rien qui ne soit d'abord éclairé par les dieux :
Tout ce que l'homme fait, il le fait à leurs yeux,
Même les actions que dans l'omore il croit faire.

FABLE XXI.

L'OEIL DU MAÎTRE.

Un cerf, s'étant sauvé dans une étable à bœufs, Fut d'abord averti par eux

Qu'il cherchât un meilleur asile.
Mes frères, leur dit-il, ne me décelez pas :
Je vous enseignerai les pâtis les plus gras;
Ce service vous peut quelque jour être utile,
Et vous n'en aurez point regret.
Les bœufs, à toute fin, promirent le secret.
Il se cache en un coin, respire, et prend courage.
Sur le soir on apporte herbe fraîche et fourrage,
Comme l'on faisoit tous les jours:

L'on va, l'on vient, les valets font cent tours,
L'intendant même; et pas un d'aventure

N'aperçut ni cor, ni ramure,

Ni cerf enfin. L'habitant des forêts

Rend déjà grace aux bœufs, attend dans cette étable
Que, chacun retournant au travail de Cérès,
Il trouve pour sortir un moment favorable.
L'un des bœufs ruminant lui dit : Cela va bien;
Mais quoi! l'homme aux cent yeux n'a pas fait sa revue:
Je crains fort pour toi sa venue;
Jusque-là,
, pauvre cerf, ne te vante de rien.
Là-dessus le maître entre et vient faire sa ronde.

Qu'est-ce ci? dit-il à son monde;

Je trouve bien peu d'herbe en tous ces râteliers.
Cette litière est vieille : allez vite aux greniers.
Je veux voir désormais vos bêtes mieux soignées.
Que coûte-t-il d'ôter toutes ces araignées?
Ne sauroit-on ranger ces jougs et ces colliers?
En regardant à tout il voit une autre tête
Que celles qu'il voyoit d'ordinaire en ce lieu.
Le cerf est reconnu : chacun prend un épieu;
Chacun donne un coup à la bête.
Ses larmes ne sauroient la sauver du trépas.
On l'emporte, on la sale, on en fait maint repas,
Dont maint voisin s'éjouit d'être.

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Sans goûter le plaisir des amours printanières.
A toute force enfin elle se résolut
D'imiter la nature, et d'être mère encore.
Elle bâtit un nid, pond, couve, et fait éclore,
A la hâte le tout alla du mieux qu'il put.
Les blés d'alentour mûrs avant que la nitée
Se trouvât assez forte encor

Pour voler et prendre l'essor,

De mille soins divers l'alouette agitée
S'en va chercher pâture, avertit ses enfants
D'être toujours au guet et faire sentinelle.

Si le possesseur de ces champs

Vient avecque son fils, comme il viendra, dit-elle, Écoutez bien: selon ce qu'il dira,

Sitôt

Chacun de nous décampera.

que l'alouette eut quitté sa famille, Le possesseur du champ vient avecque son fils. Ces blés sont mûrs, dit-il : allez chez nos amis Les prier que chacun, apportant sa faucille, Nous vienne aider demain dès la pointe du jour. Notre alouette de retour

Trouve en alarme sa couvée.

L'un commence : Il a dit que, l'aurore levée,
L'on fit venir demain ses amis pour l'aider.
S'il n'a dit que cela, repartit l'alouette,
Rien ne nous presse encor de changer de retraite ;
Mais c'est demain qu'il faut tout de bon écouter.
Cependant soyez gais; voilà de quoi manger.
Eux repus, tout s'endort, les petits et la mère.
L'aube du jour arrive, et d'amis point du tout.
L'alouette à l'essor, le maître s'en vient faire
Sa ronde ainsi qu'à l'ordinaire.

Ces blés ne devroient pas, dit-il, être debout.
Nos amis ont grand tort; et tort qui se repose
Sur de tels paresseux, à servir ainsi lents.
Mon fils, allez chez nos parents
Les prier de la même chose.
L'épouvante est au nid plus forte que jamais.
Il a dit ses parents, mère ! c'est à cette heure...
Non, mes enfants; dormez en paix :
Ne bougeons de notre demeure.
L'alouette eut raison, car personne ne vint.
Pour la troisième fois, le maître se souvint
De visiter ses blés. Notre erreur est extrême,
Dit-il, de nous attendre à d'autres gens que nous.
Il n'est meilleur ami ni parent que soi-même.
Retenez bien cela, mon fils. Et savez-vous

Ce qu'il faut faire? Il faut qu'avec notre famille
Nous prenions dès demain chacun une faucille :
C'est là notre plus court; et nous achèverons
Notre moisson quand nous pourrons.
Dès-lors que ce dessein fut su de l'alouette;
C'est ce coup qu'il est bon de partir, mes enfants!
Et les petits, en même temps,
Voletants, se culebutants,
Délogèrent tous sans trompette.

FIN DU LIVRE QUATRIÈME.

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A M. LE C. D. B.

Votre goût a servi de règle à mon ouvrage :
J'ai tenté les moyens d'acquérir son suffrage.
Vous voulez qu'on évite un soin trop curieux,
Et des vains ornements l'effort ambitieux;
Je le veux comme vous: cet effort ne peut plaire.
Un auteur gâte tout quand il veut trop bien faire.
Non qu'il faille bannir certains traits délicats:
Vous les aimez, ces traits; et je ne les hais
Quant au principal but qu'Ésope se propose,
J'y tombe au moins mal que je puis.
Enfin, si dans ces vers je ne plais et n'instruis,
Il ne tient pas à moi; c'est toujours quelque chose.
Comme la force est un point

Dont je ne me pique point,

Je tâche d'y tourner le vice en ridicule,

pas.

Ne pouvant l'attaquer avec des bras d'Hercule.
C'est là tout mon talent; je ne sais s'il suffit.
Tantôt je peins en un récit

La sotte vanité jointe avecque l'envie,
Deux pivots sur qui roule aujourd'hui notre vie :
Tel est ce chétif animal

Qui voulut en grosseur au bœuf se rendre égal.
J'oppose quelquefois, par une double image,
Le vice à la vertu, la sottise au bon sens,
Les agneaux aux loups ravissants,

La mouche à la fourmi; faisant de cet ouvrage
Une ample comédie à cent actes divers,

Et dont la scène est l'univers.

Hommes, dieux, animaux, tout y fait quelque rôle, Jupiter comme un autre. Introduisons celui

Qui porte de sa part aux belles la parole: Ce n'est pas de cela qu'il s'agit aujourd'hui.

Un bûcheron perdit son gagne-pain,
C'est sa cognée; et la cherchant en vain,
Ce fut pitié là-dessus de l'entendre.
Il n'avoit pas des outils à revendre :
Sur celui-ci rouloit tout son avoir.
Ne sachant donc où mettre son espoir,
Sa face étoit de pleurs toute baignée:
O ma cognée! ô ma pauvre cognée !
S'écrioit-il Jupiter, rends-la-moi;
Je tiendrai l'être encore un coup de toi.
Sa plainte fut de l'Olympe entendue.
Mercure vient. Elle n'est pas perdue,
Lui dit ce dieu; la connoîtras-tu bien?
Je crois l'avoir près d'ici rencontrée.
Lors une d'or à l'homme étant montrée,
Il répondit: Je n'y demande rien.
Une d'argent succède à la première;
Il la refuse. Enfin une de bois.
Voilà, dit-il, la mienne cette fois :
Je suis content si j'ai cette dernière.
Tu les auras, dit le dieu, toutes trois :
Ta bonne foi sera récompensée.
En ce cas-là je les prendrai, dit-il.
L'histoire en est aussitôt dispersée;
Et boquillons de perdre leur outil,
Et de crier pour se le faire rendre.
Le roi des dieux ne sait auquel entendre.
Son fils Mercure aux criards vient encore;
A chacun d'eux il en montre une d'or.
Chacun eût cru passer pour une bête
De ne pas dire aussitôt : La voilà!
Mercure, au lieu de donner celle-là,
Leur en décharge un grand coup sur la tête.

Ne point mentir, être content du sien,
C'est le plus sûr : cependant on s'occupe
A dire faux pour attraper du bien.
Que sert cela? Jupiter n'est pas dupe.

mmmmmmmmm

FABLE II.

LE POT DE TERRE ET LE POT DE FER.

Le pot de fer proposa

Au pot de terre un voyage.
Celui-ci s'en excusa,
Disant qu'il feroit que sage
De garder le coin du feu :
Car il lui falloit si peu,
Si peu, que la moindre chose
De son débris seroit cause:
Il n'en reviendroit morceau.
Pour vous, dit-il, dont la peau
Est plus dure que la mienne,
Je ne vois rien qui vous tienne.
Nous vous mettrons à couvert,
Repartit le pot de fer :
Si quelque matière dure
Vous menace,
d'aventure,
Entre deux je passerai,
Et du coup vous sauverai.
Cette offre le persuade.
Pot de fer son camarade
Se met droit à ses côtés.

Mes gens s'en vont à trois pieds
Clopin clopant comme ils peuvent,
L'un contre l'autre jetés

Au moindre hoquet qu'ils treuvent.

mmmm

Le pot de terre en souffre; il n'eut pas fait cent pas,
Que par son compagnon il fut mis en éclats,
Sans qu'il eût lieu de se plaindre.

Ne nous associons qu'avecque nos égaux;
Ou bien il nous faudra craindre
Le destin d'un de ces pots.

Rien qui vaille! hé bien! soit, repartit le pêcheur : Poisson, mon bel ami, qui faites le prêcheur, Vous irez dans la poêle; et, vous avez beau dire Dès ce soir on vous fera frire.

Un Tiens vaut, ce dit-on, mieux que deux Tu l'auras: L'un est sûr, l'autre ne l'est pas.

mmmmmmmmmmmmmmmm

FABLE IV,

LES OREILLES DU LIÈVRE.

Un animal cornu blessa de quelques coups
Le lion, qui, plein de courroux,
Pour ne plus tomber en la peine,
Bannit des lieux de son domaine
Toute bête portant des cornes à son front.
Chèvres, béliers, taureaux, aussitôt délogèrent;
Daims et cerfs de climat changèrent:
Chacun à s'en aller fut prompt.

Un lièvre, apercevant l'ombre de ses oreilles,
Craignit que quelque inquisiteur
N'allât interpréter à cornes leur longueur,
Ne les soutînt en tout à des cornes pareilles.
Adieu, voisin grillon, dit-il; je pars d'ici :
Mes oreilles enfin seroient cornes aussi;
Et quand je les aurois plus courtes qu'une autruche,
Je craindrois même encor. Le grillon repartit:
Cornes cela! vous me prenez pour cruche!
Ce sont oreilles que Dieu fit.

On les fera passer pour cornes,

Dit l'animal craintif, et cornes de licornes.
J'aurai beau protester; mon dire et mes raisons
Iront aux Petites-Maisons.

mmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmın

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FABLE V.

LE RENARD AYANT LA QUEUE COUPÉE.

Un vieux renard, mais des plus fins, Grand croqueur de poulets, grand preneur de lapins, Sentant son renard d'une lieue,

Fut enfin au piége attrapé.

Par grand hasard en étant échappé,

Non pas franc, car pour gage il y laissa sa queue;
S'étant, dis-je, sauvé sans queue, et tout honteux,
Pour avoir des pareils (comme il étoit habile),
Un jour que les renards tenoient conseil entre eux :
Que faisons-nous, dit-il, de ce poids inutile,
Et qui va balayant tous les sentiers fangeux ?
Que nous sert cette queue? Il faut qu'on se la coupe :
Si l'on me croit, chacun si résoudra.

Votre avis est fort bon, dit quelqu'un de la troupe ;
Mais tournez-vous, de grace, et l'on vous répondra.
A ces mots il se fit une telle huée,

Que le pauvre écourté ne put être entendu.
Prétendre ôter la queue eût été temps perdu :
La mode en fut continuée.

FABLE VI.

LA VIEILLE ET LES DEUX SERVANTES.

Il étoit une vieille ayant deux chambrières: Elles filoient si bien, que les sœurs filandières

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