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Un chat, contemporain d'un fort jeune moineau,
Fut logé près de lui dès l'âge du berceau :
La cage et le panier avoient mêmes pénates.

Le chat étoit souvent agacé par l'oiseau ;
L'un s'escrimoit du bec, l'autre jouoit des pattes.
Ce dernier toutefois épargnoit son ami,
Ne le corrigeant qu'à demi :

Il se fut fait un grand scrupule

D'armer de pointes sa férule.

Le passereau, moins circonspec.
Lui donnoit force coups de bec.
En sage et discrète personne.

Maître chat excusoit ses jeux;

Entre amis il ne faut jamais qu'on s'abandonne
Aux traits d'un courroux sérieux.

Comme ils se connoissoient tous deux dès leur bas âge,
Une longue habitude en paix les maintenoit ;
Jamais en vrai combat le jeu ne se tournoit :
Quand un moineau du voisinage

S'en vint les visiter, et se fit compagnon

Du pétulant Pierrot et du sage Raton.
Entre les deux oiseaux il arriva querelle;
Et Raton de prendre parti.

Cet inconnu, dit-il, nous la vient donner belle.
D'insulter ainsi notre ami!

Le moineau du voisin viendra manger le nôtre !
Non, de par tous les chats! Entrant lors au combat,

Il croque l'étranger. Vraiment, dit maître chat,

Les moineaux ont un goût exquis et délicat !

Cette réflexion fit aussi croquer l'autre.

Quelle morale puis-je inférer de ce fait?

Sans cela, toute fable est un œuvre imparfait.

J'en crois voir quelques traits; mais leur ombre m'abuse.

Prince, vous les aurez incontinent trouvés.

Ce sont des jeux pour vous, et non point pour ma muse. Elle et ses sœurs n'ont pas l'esprit que vous avez.

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Un homme accumuloit. On sait que cette erreur

Va souvent jusqu'à la fureur.

Celui-ci ne songeoit que ducats et pistoles.

Quand ces biens sont oisifs, je tiens qu'ils sont frivoles. Pour sûreté de son trésor,

Notre avare habitoit un lieu dont Amphitrite

Défendoit aux voleurs de toutes parts l'abord.

Là, d'une volupté selon moi fort petite,

Et selon lui fort grande, il entassoit toujours :
Il passoit les nuits et les jours.

A compter, calculer, supputer sans relâche;
Calculant, supputant, comptant comme à la tàche,
Car il trouvoit toujours du mécompte à son fait.
Un gros singe, plus sage, à mon sens, que son maître,
Jetoit quelque doublon toujours par la fenêtre.

Et rendoit le compte imparfait :

La chambre, bien cadenassée,

Permettoit de laisser l'argent sur le comptoir.
Un beau jour dom Bertrand se mit dans la pensée
D'en faire un sacrifice au liquide manoir.

Quant à moi, lorsque je compare

Les plaisirs de ce singe à ceux de cet avare,
Je ne sais bonnement auxquels donner le prix :
Dom Bertrand gagneroit près de certains esprits,
Les raisons en seroient trop longues à déduire.
Un jour donc l'animal, qui ne songeoit qu'à nuire,
Détachoit du monceau tantôt quelque doublon,
Un jacobus, un ducaton,

Et puis quelque noble à la rose ;

Eprouvoit son adresse et sa force à jeter
Ces morceaux de métal, qui se font souhaiter
Par les humains sur toute chose.

S'il n'avoit entendu son compteur à la fin
Mettre la clef dans la serrure,

Les ducats auroient tous pris le même chemin,
Et couru la même aventure ;

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Un homme accumuloit. On sait que cette erreur
Va souvent jusqu'à la fureur.

Celui-ci ne songeoit que ducats et pistoles.

Quand ces biens sont oisifs, je tiens qu'ils sont frivoles. Pour sûreté de son trésor,

Notre avare habitoit un lieu dont Amphitrite

Défendoit aux voleurs de toutes parts l'abord.

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