Son père, un bon bourgeois; lui, sans autre mérite : Matière infertile et petite. Le poëte d'abord parla de son héros. De Castor et Pollux; ne manque pas d'écrire Faisoit les deux tiers de l'ouvrage. N'en donna que le tiers, et dit fort franchement Venez souper chez moi; nous ferons bonne vie. Mes parents, mes meilleurs amis; Simonide promit. Peut-être qu'il cut peur De perdre, outre son dû, le gré de sa louange. Chacun étant en belle humeur, Un domestique accourt, l'avertit qu'à la porte N'en perd pas un seul coup de dent. Ces deux hommes étoient les gémeaux de l'éloge. Tous deux lui rendent grâce; et, pour prix de ses vers, Et que cette maison va tomber à l'envers. Un pilier manque; et le plafonds, Ne trouvant plus rien qui l'étaie, Tombe sur le festin, brise plats et flacons, Ce ne fut pas le pis: car, pour rendre complète Une poutre cassa les jambes à l'athlète, Pour la plupart estropiés. La renommée eut soin de publier l'affaire. Chacun cria : Miracle! On doubla le salaire Que méritoient les vers d'un homme aimé des dieux. Il n'étoit fils de bonne mère Qui, les payant à qui mieux mieux, Pour ses ancêtres n'en fît faire. Je reviens à mon texte et dis premièrement, Enfin, qu'on doit tenir notre art en quelque prix. Les grands se font honneur dès lors qu'ils nous font grâce : Jadis l'Olympe et le Parnasse Étoient frères et bons amis. Un malheureux appeloit tous les jours La Mort à son secours. O Mort! lui disoit-il, que tu me sembles belle! Viens vite, viens finir ma fortune cruelle! La Mort crut, en venant, l'obliger en effet. Elle frappe à sa porte, elle entre, elle se montre. Que vois-je! cria-t-il : ôtez-moi cet objet ! Qu'il est hideux! que sa rencontre Me cause d'horreur et d'effroi ! N'approche pas, ô Mort! ô Mort, retire-toi! Mécénas fut un galant homme; Il a dit quelque part Qu'on me rende impotent, Ne viens jamais, ô Mort! on t'en dit tout autant. Ce sujet a été traité d'une autre façon par Ésope, comme la fable suivante le fera voir. Je composai celle-ci pour une raison qui me contraignoit de rendre la chose ainsi générale. Mais quelqu'un me fit connoître que j'eusse beaucoup mieux fait de suivre mon original, et que je laissois passer un des plus beaux traits qui fût dans Ésope. Cela m'obligea d'y avoir recours. Nous ne saurions aller plus avant que les anciens : ils ne nous ont laissé pour notre part que la gloire de les bien suivre. Je joins toutefois ma fable à celle d'Ésope, non que la mienne le mérite, mais à cause du mot de Mécénas, que j'y fais entrer, et qui est si beau et si à propos, que je n'ai pas cru le devoir omettre. |