Le phaéton d'une voiture à foin Vit son char embourbé. Le pauvre homme étoit loin Près d'un certain canton de la Basse-Bretagne, On sait assez que le Destin Adresse là les gens quand il veut qu'on enrage. Pour venir au chartier embourbé dans ces lieux, Le voilà qui déteste et jure de son mieux, Pestant, en sa fureur extrême, Tantôt contre les trous, puis contre ses chevaux, Il invoque à la fin le dieu dont les travaux Hercule, lui dit-il, aide-moi; si ton dos A porté la machine ronde, Ton bras peut me tirer d'ici. Sa prière étant faite, il entend dans la nue Hercule veut qu'on se remue, Puis il aide les gens. Regarde d'où provient Ote d'autour de chaque roue Ce malheureux mortier, cette maudite boue. Prends tonc pic, et me romps ce caillou qui te nuit ; Tes chevaux aisément se sont tirés de là. Aide-toi, le Ciel t'aidera. Le monde n'a jamais manqué de charlatans : Fut en professeurs très-fertile. Tantôt l'un en théâtre affronte l'Achéron, Et l'autre affiche par la ville Un des derniers se vantoit d'être En éloquence si grand maître, Un manant, un rustre, un lourdaud; Oui, messieurs, un lourdaud, un animal, un âne . Et veux qu'il porte la soutane. Le prince sut la chose; il manda le rhéteur. Un fort beau roussin d'Arcadie; J'en voudrois faire un orateur. Sire, vous pouvez tout, reprit d'abord notre homme. On lui donna certaine somme. Il devoit au bout de dix ans Mettre son âne sur les bancs; Sinon il consentoit d'être en place publique Guindé la hart au col, étranglé court et net, Et les oreilles d'un baudet. Quelqu'un des courtisans lui dit qu'à la potence Vulgairement nommés larrons. Le roi, l'àne, ou moi, nous mourrons. |