Auguste. Oui, je vous unirai, couple ingrat et perfide, Il faut bien satisfaire aux feux dont vous brûlez, SCÈNE III. 1660 AUGUSTE, LIVIE, CINNA, MAXIME, ÆMILIE, FULVIE. Auguste. Mais enfin le ciel m'aime, et ses bienfaits nouveaux Ont enlevé Maxime à la fureur des eaux. Approche, seul ami que j'éprouve fidèle. Maxime. Honorez moins, seigneur, une âme criminelle. Auguste. Ne parlons plus de crime après ton repentir, Maxime. 1665 De tous vos ennemis connaissez mieux le pire: 1670 C'est ma jalouse rage à qui vous le devez. Un vertueux remords n'a point touché mon âme; Pour perdre mon rival, j'ai découvert sa trame. Euphorbe vous a feint que je m'étais noyé, 1675 De crainte qu'après moi vous n'eussiez envoyé : Et pensais la résoudre à cet enlèvement Sous l'espoir du retour pour venger son amant; 1680 Mais, au lieu de goûter ces grossières amorces, Si je puis m'en punir après l'avoir puni. Auguste. En est-ce assez, ô ciel! et le sort, pour me nuire, 1685 1690 A-t-il quelqu'un des miens qu'il veuille encore séduire ? Aime Cinna, ma fille, en cet illustre rang, Te rendant un époux, je te rends plus qu'un père. Emilie. Et je me rends, seigneur, à ces hautes bontés; 1695 1700 1705 1710 1715 Je recouvre la vue auprès de leurs clartés: 1720 Et pour preuve, seigneur, je n'en veux que moi-même : Puisqu'il change mon cœur, qu'il veut changer l'État. 1725 Ma haine va mourir, que j'ai crue immortelle ; Cinna. Seigneur, que vous dirais-je après que nos offenses Auguste. Cesse d'en retarder un oubli magnanime; 1730 Et tous deux avec moi faites grâce à Maxime: 1735 Reprends auprès de moi ta place accoutumée; 1740 Maxime. Je n'en murmure point, il a trop de justice; Cinna. Souffrez que ma vertu dans mon cœur rappelée 1745 Mais si ferme à présent, si loin de chanceler, Puisse le grand moteur des belles destinées, Livie. Ce n'est pas tout, seigneur: une céleste flamme Après cette action vous n'avez rien à craindre: 1750 1755 1760 1765 1770 Que nous leur offrirons sous de meilleurs auspices; 1780 EXAMEN DE CINNA. Ce poëme a tant d'illustres suffrages (1) qui lui donnent le premier rang parmi les miens, que je me ferais trop d'importants ennemis si j'en disais du mal: je ne le suis pas assez de moi-même pour chercher des défauts où ils n'en ont point voulu voir, et accuser le jugement qu'ils en ont fait, pour obscurcir la gloire qu'ils m'en ont donnée. Cette approbation si forte et si générale vient sans doute de ce que la vraisemblance s'y trouve si heureusement conservée aux endroits où la vérité lui manque, qu'il n'a jamais besoin de recourir au nécessaire. Rien n'y contredit l'histoire, bien que beaucoup de choses y soient ajoutées; rien n'y est violenté par les incommodités de la représentation, ni par l'unité de jour, ni par celle de lieu. Il est vrai qu'il s'y rencontre une duplicité de lieu particulier (2). La moitié de la pièce se passe chez Æmilie, et l'autre dans le cabinet d'Auguste. J'aurais été ridicule si j'avais prétendu que cet empereur délibérât avec Maxime et Cinna s'il quitterait l'empire ou non, précisément dans la même place où ce dernier vient de rendre compte à Æmilie de la conspiration qu'il a formée contre lui. C'est ce qui m'a fait rompre la liaison des scènes au quatrième acte, n'ayant pu me résoudre à faire que Maxime vînt donner l'alarme à Æmilie de la conjuration découverte, au lieu même où Auguste en venait de recevoir l'avis par son ordre, et dont il ne faisait que de sortir avec tant d'inquiétude et d'irrésolution. C'eût été une impudence extraordinaire, et tout à fait hors du vraisemblable, de se présenter dans son cabinet un mo |