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NOTES

DU TOME SIXIÈME

L'AVARE.

L'Avare, bien qu'étant une des meilleures pièces de Molière, n'obtint pas tout d'abord le succès dont il était digne. On a cherché, sans pouvoir la déterminer exactement, la raison de l'indifférence avec laquelle fut accueilli ce chefd'œuvre. Cette fois l'auteur n'avait pas contre lui, comme lors du Tartuffe, la coalition de ceux qui se sentaient atteints par les traits de sa satire. L'avarice n'était pas le défaut du moment; bien au contraire, l'exemple de la prodigalité du roi avait entraîné tout son entourage, et quelque peu aussi la bourgeoisie, et la pièce de l'Avare vint bien plutôt flatter un penchant de Louis XIV que combattre un vice qui était contraire à ses goûts.

On a voulu que le public se trouvât quelque peu dérouté d'assister à une pièce en prose, habitué qu'il avait été par Molière à entendre des pièces en vers. Il est vrai que la cabale, toujours prête à le trouver en défaut, lui fit le reproche de n'avoir pas versifié l'Avare, et l'opinion a paru s'accréditer qu'il ne le fit pas parce qu'il n'en eut pas le temps. Nous nous refusons néanmoins à voir dans l'Avare un simple canevas destiné à devenir une pièce en vers. On sent, ce nous semble, en le lisant, qu'il a été conçu et écrit Molière. VI.

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pour rester en prose, et l'on y trouve de ces traits vifs, piquants et concis qui ne sauraient s'accommoder de la forme poétique.

Nous aimons mieux attribuer, avec M. Louis Lacour, le peu de succès de l'Avare à la légèreté du public d'alors, qui, quelque peu semblable, en cela, à celui d'aujourd'hui, cherchait plutôt dans le théâtre un objet de divertissement qu'un sujet d'étude, et dut se montrer assez froid devant une pièce qui était la peinture sérieuse et approfondie d'un des vices du cœur humain. Sans doute elle abonde en traits comiques, mais la gaieté qu'ils peuvent faire naître dans l'esprit du spectateur est troublée par le spectacle attristant de la dégradation profonde dans laquelle est tombé Harpagon, qui a perdu tout sentiment de sa dignité, et ne sait plus se faire respecter de personne, ni de ses enfants, ni même de ses domestiques.

On devait aussi, tout naturellement, jeter à la face de Molière l'accusation de plagiat, puisqu'il a emprunté quelques situations de sa pièce à l'Aulularia de Plaute. Mais Plaute lui-même n'a pas été l'inventeur du sujet qu'il a traité, et, en présence d'un chef-d'œuvre tel que l'Avare, nous avouons ne pas accorder grande importance à la question de savoir si Molière a plus ou moins imité Plaute, ou s'il a plutôt été puiser aux mêmes sources que lui.

L'Avare fut joué pour la première fois le 9 septembre 1668, et, dans l'espace de trois mois, il obtint péniblement vingt représentations sur le théâtre du Palais-Royal et deux à la cour. L'édition originale, sur laquelle nous avons fait notre réimpression, est de 1669.

Page 5, ligne 12. Je retranche mon chagrin..., c'est-àdire « je borne mon chagrin à la crainte du blâme ». 30. Pas fort accommodées, pas fort à leur aise. On trouve plusieurs exemples de cette locution chez les écrivains du temps.

10,

12, 9. Var. de 1682 « Pour achever nostre confidence » (nous supprimé).

P. 15, l. 17. Au lieu de fouillez, que donne notre texte, nous avons cru devoir imprimer fouilliez.

16, 23. La barrette était un petit bonnet plat. « Parler à la barrette de quelqu'un », c'est le réprimander.

17, 14. Sans te fouiller, c'est-à-dire : sans que j'aie à te fouiller.

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32. Louis Béjart, qui jouait le rôle de la Flèche, était alors boiteux des suites d'une blessure qu'il avait reçue au pied en séparant deux de ses amis qui se battaient sur la place du Palais-Royal. L'allusion de Molière à cet accident fit que tous les acteurs de province qui jouèrent depuis le rôle de la Flèche se crurent obligés de boiter.

19, 22. Feindre s'employait alors dans le sens d'hésiter. 21, 17. Constitution seul se prenait dans le sens de constitution de rente ou de dot.

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25. Var. « Que sçay-je, moy? »

22, 13. Au denier douze, c'est-à-dire à raison d'une livre d'intérêt pour douze de capital, ce qui équivaut à plus de huit pour cent.

24, 27. Considerable, c'est-à-dire à considérer.

26, 14. Le texte original donne mariez, avec un seul i; mais nous n'avons pas cru devoir suivre cette faute.

33, 28. La répétition du pronom on, tenant la place de deux sujets différents, forme ici une amphibologie que le sens, d'ailleurs, dissipe facilement.

37, 18. Var. « ma mere estant morte ».

38, 3. Au denier dix-huit, un peu plus de cinq pour

cent.

13. Le denier cinq, vingt pour cent.

19. Au denier quatre, vingt-cinq pour cent.

39, 15. Pavillon, tour de lit plissé par en haut, et qu'on suspend au plancher.

16. Molet, petite frange à garnir Is meubles. Ce

mot paraît faire ici double emploi avec les franges, qui sont aussi mentionnées.

P. 39, 1. 21. Gombaut et Macée, deux personnages d'une pastorale, dont les amours ont souvent servi de sujet à des tapisseries.

31. Fourchette, instrument fourchu sur lequel on appuyait le mousquet pour tirer.

41, 10. Vilanie, venant de vilain, s'est écrit ainsi avant de devenir vilenie.

49, 13. Régulièrement il faudrait « me mesler »>, mais nous avons suivi le texte.

26. C'est à tort que plusieurs éditeurs ont mis un point d'interrogation après qui a fait réponse. Harpagon ne pose pas ici de question à Frosine, dont il continue la phrase, le qui se rapportant à la mère de Mariane.

50, 4. Molière écrit toujours regale.

- 32. Orge est bien au singulier, sans doute parce qu'orgemondez ne forme qu'un mot prenant seulement le signe du pluriel à la syllabe finale.

51, 31. Dot était alors des deux genres, mais c'était pourtant le féminin qui prévalait.

52, 22. Entendu n'est pas accordé dans notre texte. Les règles de l'accord du participe n'étaient pas encore bien fixées du temps de Molière.

54, 10. Poule laitée, synonyme d'homme sans vigueur. 58, 13. Ne point, qui est en trop, se trouve bien dans

le texte.

59, 14. Siquenilles, pour souquenilles, qu'on trouve dans les éditions suivantes.

25. Var. :

<< reverence de parler ».

60, 11. Dans l'édition de 1682, Harpagon répond à Élise Ouy, nigaude, avant de s'adresser à Cléante.

:

23. Fedeine est bien imprimé avec un e. Ce n'est peut-être qu': ne faute.

P. 62, 1. 12. L'épée de chevet est celle que l'on met la nuit sous son chevet, dont on se sert habituellement, et, par métaphore, le mot ou la phrase qu'on a toujours à la bouche. C'est dans le même sens qu'on emploie cheval de bataille. 29. Factoton est écrit ici comme on le prononçait. 63, 15-21. Ce passage est comme suit dans l'édition de 1682.

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MAISTRE JACQUES.

Hé bien, il faudra quatre grands potages bien garnis et cinq assiettes d'entrées. Potages: bisque, potage de perdrix aux choux verts, potage de santé, potage de canars aux navets. Entrées fricassée de poulets, tourte de pigeonneaux, rys de veau, boudin blanc et morilles.

HARPAGON.

Que diable! voila pour traitter toute une ville entiere !
MAISTRE JACQUES.

< Rots dans un grandissime bassin en pyramide, une grande longe de veau de riviere, trois faisans, trois poulardes grasses, douze pigeons de voliere, douze poulets de grain, six lapreaux de garenne, douze perdreaux, deux douzaines de cailles, trois douzaines d'ortolans. >>

Nous n'avons pas besoin de faire remarquer combien il a été maladroit d'ajouter ici ces longues énumérations de plats, que l'avare Harpagon ne peut laisser faire à maître Jacques sans lui fermer la bouche. Aussi n'avons-nous reproduit cette addition que parce qu'elle nous a paru donner un curieux échantillon des menus de l'époque.

65, 10. Après « garny de marons »>, l'édition de 1682 ajoute Là, que cela foisonne.

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29. Var. « que des fantosmes ou des façons de chevaux. >>

66, 4. Var. : « de travailler beaucoup et de manger de

mesme. >>

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23. Faire besoin, c'est-à-dire être utile.

67, 7. Gratter, flatter, parce que c'est, en effet, chercher

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