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CHANSON

Dont les vers sont dans le goût de ceux de Chapelain.

Droits et roides rochers dont peu tendre est la cime,
De mon flamboyant cœur l'âpre état vous savez.
Savez aussi, durs bois par les hivers lavés,
Qu'holocauste est mon cœur pour un front magnanime [a].

RÉPONSE

A des couplets satiriques de Linière.

Linière apporte de Senlis

Tous les mois trois couplets impies.

A quiconque en veut dans Paris,
Il en présente des copies;

de le renier auprès de Chapelain, qui étoit le dispensateur des récompenses décernées par le gouvernement. Voyez le tome Ior, p. 87,

note c.

[a] Brossette a mis ce quatrain dans une note, sous ce vers de la quatrième satire, au sujet de Chapelain :

Mais bien que ses durs vers d'épithètes enflés, etc.
(Tome I, page 139. ]

Il le cite également, dans une lettre du 20 septembre 1700, t. IV, page 372. Pour en faire mieux sentir la dureté, Despréaux le chantoit sur l'air d'une chanson fort tendre du ballet de la naissance de Vénus:

Rochers, vous êtes sourds, vous n'avez rien de tendre, etc.

Dans le III volume du Parallèle des anciens et des modernes, Perrault rapporte ce quatrain d'une manière un peu différente.

Mais ses couplets tout pleins d'ennui
Seront brûlés, même avant lui [a].

PARODIE

De cinq vers de Chapelle.

Tout grand ivrogne du Marais
Fait des vers que l'on ne lit guère.
Il les croit pourtant fort bien faits;
Et quand il cherche à les mieux faire,
Il les fait encor plus mauvais [b].

[a] Brossette rapporte ce couplet dans une note, sous le vers suivaut du deuxième chant de l'Art Poétique:

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Et fournir, sans génie, un couplet à Linière.

Voyez ce tome-ci, page 214, note a.

[b] L'édition de 1740 est la première où l'on ait inséré cette parodie. On y lit en note le passage suivant du Bolæana, n. LXXIII : Chapelle donnoit le ton aux beaux esprits. On prenoit son attache « pour débiter des vers prétendus anacreontiques, où régnoient, disoit-on, les plus heureuses négligences et le plus beau naturel. » Voyez les vers de cet épicurien, page 70 de ce volume, note b.

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IMPROMPTU

▲ une dame qui demandoit à l'auteur un quatrain sur la prise de Mons [a].

Mons étoit, disoit-on, pucelle,

Qu'un roi gardoit avec le dernier soin [b].

Louis-le-Grand en eut besoin :

Mons se rendit [c], vous auriez fait comme elle.

[a] « M. Despréaux étoit dans une compagnie de dames où l'on parloit de la prise de Mons. Comme il se levoit pour sortir, une « de ces dames l'arrêta par le bras, et lui dit: Monsieur, vous ne sor« tirez point d'ici que vous ne nous ayez fait un petit quatrain sur << une nouvelle conquête de notre grand monarque. M. D... fit ce qu'il « put pour s'en défendre; mais voyant qu'il n'y gagnoit rien, il lui « demanda quartier pour un moment. Et voici de quoi il la paya sur « l'heure etc. » (Menagiana, 1715, tome 2, page 409.)

[b] Dans l'édition de M. Daunou, la première où l'on ait inséré cette épigramme, on lit:

Qu'un roi gardoit avec le plus grand soin.

Nous avons suivi le texte donné par La Monnoye.

[c] Mons se rendit le 9 avril 1691. Voyez sur le siège de cette place, qui n'avoit jamais été prise, la lettre de Racine à Despréaux, tome IV, page 118. D'Alembert dit au sujet de ce quatrain : « La sévérité dont Despréaux se piquoit dans ses vers ne lui permettoit

M

guère les impromptus; il en faisoit pourtant quelquefois, et même

« d'assez heureux. » (Note 18 sur l'éloge de Despréaux.)

ÉPIGRAMME

Contre Perrault et ses partisans.

Ne blâmez pas Perrault de condamner Homère,
Virgile, Aristote, Platon [a].

Il a pour lui monsieur son frère,
G..., N... [b], Lavau[c], Caligula [d], Néron,
Et le gros Charpentier [e], dit-on.

ÉPITAPHE

De M. Arnauld, docteur de Sorbonne [ƒ].

Au pied de cet autel de structure grossière,
Gît sans pompe, enfermé dans une vile bière,
Le plus savant mortel qui jamais ait écrit;

[a] Il mourut à quatre-vingt-un ans révolus, le 17 mai 347 avant J.-C. « Je ne donne pas cette date comme certaine, dit Barthélemy : <«< on sait que les chronologistes se partagent sur l'année et sur le « jour; mais il paroît que la différence ne peut être que de quelques mois.» (Voyage du jeune Anacharsis en Grèce, 1799, tome V, page 143.)

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[b] Saint-Mare ne forme aucune conjecture sur celui qui est désigné par G...; mais il ne doute pas que N... ne veuille dire Nevers.

[c] Nous avons parlé de cet académicien au sujet de la réception de Saint-Aulaire, tome IV, page 577, note a. Colbert lui ayant offert le choix des graces qu'il pouvoit lui procurer, il lui demanda celle qui dépendoit le moins de ce grand ministre, une place à l'académie françoise.

[d] Voir sur Caligula le tome III, page 5, note a.

[e] Voir sur Charpentier le tome Io, page 47, note 1.

[f] Avant d'être publiée par Brossette, cette épitaphe le fut dans les œuvres posthumes de M. Boileau Despréaux, imprimées en 1711,

Arnauld, qui, sur la grace instruit par Jésus-Christ,
Combattant pour l'Église, a, dans l'Église même,
Souffert plus d'un outrage et plus d'un anathème.
Plein du feu qu'en son cœur souffla l'esprit divin,
Il terrassa Pélage, il foudroya Calvin,

De tous les faux docteurs confondit la morale.
Mais, pour fruit de son zèle, on l'a vu rebuté[a],
En cent lieux opprimé par leur noire cabale,
Errant, pauvre, banni, proscrit, persécuté[b];
Et même par sa mort leur fureur mal éteinte
N'auroit jamais laissé ses cendres en repos,
Si Dieu lui-même ici de son ouaille sainte

A ces loups dévorants n'avoit caché les os [c].

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petit volume que nous avons cité, tome I, page 355, note a. Le Brun la trouve « bien versifiée, mais un peu longue. [a] Ce vers étoit ainsi dans la première composition: Cependant pour tout fruit de tant d'habileté, etc.

[b] Il fut errant, banni, trahi, persécuté.

(Première composition. )

[] L'éditeur des œuvres posthumes de Despréaux ajoute à cette épitaphe la note suivante: « On n'a jamais su où M. Arnauld étoit a mort et enterré; mais par ses ordres et fort secrètement son cœur « fut porté à Port-Royal-des-Champs. » Brossette se borne à dire : « M. Arnauld mourut en Flandre le 8 août 1694, âgé de quatrevingt-deux ans et demi. » Dans une lettre du 13 septembre 1717, écrite à J.-B. Rousseau qu'il consulte sur ses remarques, il s'exprime en ces termes : « Un des amis intimes de M. Despréaux, qui avoit «vu mourir M. Arnauld, m'a appris toutes les circonstances de sa <«< mort, le lieu de sa sépulture et tout le reste; mais je n'ai pas cru « devoir en parler dans mon commentaire [a]. » Rousseau lui répond

[a] Lettres de Rousseau sur différents sujets de littérature, t. II, p. 206.

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