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cun goût, qui croit que la Clélie [a] et nos [b] opéras sont les modèles du genre sublime; qui trouve Térence fade, Virgile froid, Homère de mauvais sens, et qu'une espèce de bizarrerie d'esprit [c] rend insensible à tout ce qui frappe

[a] Voyez sur le roman de Clélie, le tome Io, satire X, page 281,

notes I et a.

[b] « Et les opéras sont les modèles du genre sublime ;........ » (Édit. de 1693 et de 1694.) Dans la première de ces deux éditions, l'auteur avoit écrit opéras avec s. Perrault lui en ayant fait le reproche, il n'osa pas insister à cet égard dans sa VIII® Réflexion critique, et fit usage de la remarque dans l'édition de 1694. Voyez le tome III, page 259, note b. Jean-Baptiste Rousseau n'approuvoit pas cette docilité. « M. Despréaux, dit-il, passe trop aisément condamnation. «L's est aussi nécessaire au pluriel d'opéra, qu'à tous les autres pluriels de la langue. Ou ce mot est considéré comme latin, et dans ce cas il ne doit point être employé au singulier; ou il est naturalisé françois, et alors il est assujetti aux lois de la langue. « D'ailleurs on prononce en parlant opéras, quidams, factums; ce qui est une marque qu'il faut les écrire ainsi. » ( Lettres sur différents sujets de littérature, tome 2, page 190.)

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[c] « Qu'il a, dit-on, commune avec toute sa famille, ...." Ces mots se trouvent dans l'édition de 1693 seulement. Despréaux les supprima dans les éditions postérieures, parceque Perrault en avoit paru vivement blessé, dans sa réponse, n. XII. « Cet endroit, monsieur, est trop fort, lui dit-il, et excède toutes les libertés et toutes les licences que les gens de lettres prennent dans leurs disputes. Ma famille est irréprochable, et elle l'est à un point que je lui fe« rois tort si je me donnois la peine de la justifier de votre calomnie. « On n'y trouvera que des gens de bien, des gens de bon sens, of

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ficieux, bienfaisants et aimés de tout le monde. De quatre frères « que j'ai eus, et dont je suis le moindre et le dernier en toutes

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choses, vous n'avez connu que celui qui étoit médecin et de l'aca

démie des sciences, etc., etc. »

Ce que Despréaux entendoit par cette espèce de bizarrerie d'esprit

ordinairement les hommes. Mais ce n'est pas ici le lieu de lui montrer ses erreurs. On le fera peut-être plus à propos, un de ces jours, dans quelque autre ouvrage [a].

Pour revenir à Pindare, il ne seroit pas difficile d'en faire sentir les beautés à des gens qui se seroient un peu familiarisé le grec; mais comme cette langue est aujourd'hui assez ignorée de la plupart des hommes, et qu'il n'est pas possible de leur faire voir Pindare dans Pindare même, j'ai cru que je ne pouvois [b] mieux justifier ce grand poëte qu'en tachant de faire une ode en françois à sa manière, c'est-à-dire pleine de mouvements et de transports, où l'esprit parût [c] plutôt entraîné du démon de la poésie que guidé par la raison. C'est le but que je me suis proposé [d] dans l'ode qu'on va voir. J'ai pris [e] pour sujet la prise de Namur, comme la plus grande action de guerre qui se soit faite de nos jours, et comme la matière la plus propre à échauffer l'imagination d'un poëte. J'y ai jeté, autant que 'j'ai pu [ƒ], la magnificence des mots; et, à l'exemple des anciens poëtes dithyrambiques, j'y ai employé[g] les figures les plus audacieuses, jusqu'à y faire un astre de la plume

étoit sans équivoque. Il crut néanmoins devoir developper sa pensée dans sa première Réflexion critique sur Longin. Voyez le t. III, page 164, note b.

[a] C'est ce qu'il exécuta, sans aucun retard, dans ses Réflexions critiques sur quelques passages du rhéteur Longin.

[b] « « On a cru qu'on ne pouvoit mieux justifier ce grand poëte qu'en faisant une ode en françois à sa manière, etc. » (Édition de 1693.)

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c] « Où l'on parût plutôt entraîné.... (Édit. de 1693.) d] « C'est le but qu'on s'est proposé..... » ( Édit. de 1693.) [e] « On a pris pour sujet.....» (Édit. de 1693.)

[ƒ] « On y a jeté, autant qu'on a pu, etc. » (Édit. de 1693.)

[g] On y a employé..... (Edit. de 1693.)

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blanche que le roi porte ordinairement à son chapeau, et qui est en effet comme une espèce de comète fatale à nos ennemis, qui se jugent perdus dès qu'ils l'aperçoivent. Voilà le dessein de cet [a] ouvrage. Je ne réponds [b] pas d'y avoir réussi; et je ne sais [c] si le public, accoutumé aux sages emportements de Malherbe [d], s'accommodera de ces saillies et de ces excès pindariques. Mais, supposé que j'y aie échoué, je m'en consolerai du moins [e] par le commencement de cette fameuse ode latine d'Horace [f],

Pindarum quisquis studet æmulari, etc.

où Horace donne assez à entendre que s'il eût voulu luimême s'élever à la hauteur de Pindare, il se seroit cru en grand hasard de tomber [g].

Au reste, comme parmi les épigrammes qui sont imprimées à la suite de cette ode, on trouvera encore une autre petite ode de ma façon, que je n'avois point jusqu'ici insérée dans mes écrits, je suis bien aise, pour ne me point brouiller avec les Anglois d'aujourd'hui, de faire ici ressouvenir le lecteur que les Anglois que j'attaque dans ce petit poëme, qui est un ouvrage de ma première jeunesse, ce sont les Anglois du temps de Cromwel.

J'ai joint aussi à ces épigrammes un arrêt burlesque

[a] « De ce petit ouvrage.. » (Édit. de 1693.)

[b] « On ne répond pas..... » (Édit. de 1693.)

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[c] « Et on ne sait pas si le public, etc. » (Édit. de 1693.)

[d] Despréaux avoit exprimé le même jugement sur Malherbe, dans des vers qu'il supprima. Voyez le tome IV, page 174, note a. [e] « Mais, supposé qu'on y ait échoué, on s'en consolera du moins.... » ( Édition de 1693.)

[f] Livre IV, ode II.

[g] Ce discours se termine ici, dans les éditions antérieures à celle de 1701.

donné au Parnasse, que j'ai composé autrefois, afin de prévenir un arrêt très sérieux, que l'université songeoit à obtenir du parlement, contre ceux qui enseigneroient dans les écoles de philosophie d'autres principes que ceux d'Aristote [a]. La plaisanterie y descend un peu bas, et est toute dans les termes de la pratique; mais il falloit qu'elle fût ainsi, pour faire son effet, qui fut très heureux, et obligea, pour ainsi dire, l'université à supprimer la requête qu'elle alloit présenter.

Ridiculum acri

Fortiùs ac meliùs magnas plerumque secat rès [b].

[a] Nous avons donné la première édition de l'Arrêt burlesque; elle n'avoit jamais été recueillie. Voyez le tome III, page 119, note g. [b] Horace, livre I, satire X, vers 14-15.

Souvent une raison vaut moins qu'une saillie.
(M. Daru.)

ODE

SUR LA PRISE DE NAMUR [a].

Quelle docte et sainte ivresse
Aujourd'hui me fait la loi?
Chastes nymphes du Permesse,
N'est-ce pas vous que je voi?
Accourez, troupe savante;
Des sons que ma lyre enfante
Ces arbres sont réjouis (1).
Marquez-en bien la cadence;
Et vous, vents, faites silence:
Je vais parler de Louis [b].

[a] Louis XIV commandant en personne prit la ville de Namur le 5 juin 1692, après sept jours de tranchée, et le vieux château se rendit le 30 du même mois. Racine, qui accompagnoit le roi, donnoit à Despréaux tous les détails de ce siège mémorable. Voy. le tome IV, pages 141—–161. L'Ode sur la prise de Namur parut dans les premiers jours d'août 1693. Voyez la lettre de Racine du 6 de ce mois, tome IV, page 205.

(1) L'idée de prêter du sentiment aux arbres est heureuse; mais l'expression n'est pas aussi heureuse que l'idée : réjouis est triste à l'oreille, et le verbe sont est sans action. Un poëte plein d'ivresse doit avoir un style plein de mouvement. ( Le Brun.) * Observation incontestable.

[6] Après cette première strophe il y en avoit une dans laquelle

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