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RECUEIL

DES

84

B69

ORAISONS

FUNEBRES,

PRONONCÉES

Par Melfire JACQUES-BENIGNE BOSSUET;
Évêque de Meaux.

NOUVELLE ÉDITION,

Revue avec fein, & confidérablement augmentée.
Prix, 3 livres relié.

32166

BIBLIOTECA UNIVERSIT

DONACIÓN DEL FICTI

BR. D. J. F. CAMAUTO
1894

MADRID.

CHEZ

A PARIS,

LES ASSOCIÉ S.

M. DCC. LX X X V.

Avec Approbation, & Permiffion.

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ÉLOGE HISTORIQUE

DE

M. BOSSUET, ÉVÊQUE DE MEAUX (1).

J's

ACQUES-BENIGNE BOSSUET naquit à Dijon, le 27 de Septembre 1627. Sa famille, diftinguée dans la robe, a toujours occupé les premieres places dans les Parlemens de Dijon & de Metz. C'eft une foible gloire pour M. de Meaux; un homme de ce mérite n'emprunte aucun éclat de fa naiffance.

Confacré à l'Eglife dès l'enfance, il commença de bonne heure à le former aux vertus qu'exigeoit fa deftination; & l'on vit la raison & la fageffe fe développer en lui avant le tems.

Il fit fes premieres études à Dijon, chez les Jéfuites avec beaucoup de diftinction. Au fortir des Humanités, il vint faire à Paris, fes cours de Philofophie & de Théologie. Quoiqu'il fût fort jeune quand il commença celui de Philofophic, il fe rendit bientôt auffi favant que fes Maîtres.

Tout accoutumé que l'on étoit à fes progrès, on fut encore furpris de ceux qu'il fit en Théologie. Son génie s'y déploya tout entier: fa facilité & fon goût pour cette fcience, annoncerent dès-lors un défenfeur à l'Eglife, & lui confirmerent à lui-même fa vocation. Jamais Docteur ne fut revêtu de ce titre avec plus d'applaudiffement, & ne le reçut auffi avec plus de zèle. C'est la coutume, qu'en le récevant, on s'engage aux pieds des autels à défendre toute fa vie le facré dépôt de la Religion: mais fouvent les cérémonies, à mefure qu'elles s'éloignent de leur inftitution, dégénerent on fimple fpectacle, & ne font plus accompagnées de la ferveur & des fentimens

(1) Note de l'Editeur. Cet Eloge eft copié d'après le Journal des Savans, du lundi 8 Septembre 1704. Nous n'avons fait qu'y ajouter quelques notes, pour rendre compte de ce qui regarde les ouvrages de M. Boffuet, qui n'ont été publiés que depuis la mort.

A

qui les ont fait établir. M. l'Abbé Boffuet joignit à celleci tout l'efprit des inftituteurs: il se dévoua à la vérité avec l'ardeur d'un homme qui l'aimoit uniquement, jufques là qu'il demanda à Dieu avec larmes d'en pouvoir être le martyr. Il fut d'abord Archidiacte, & enfuite Doyen de l'Eglife de Metz.

Les Religionnaires de cette ville offrirent à fon zèle les premieres occafions de fe fignaler. Il travailla à les défabufer des fauffes idées qu'on leur donnoit de la foi catholique. De fubtils Docteurs à leur tête n'oublioient rien pour la leur rendre odieufe. Le plus confidéré nommé Paul Ferry, célèbre déjà par quelques livres de controverfe, venoit d'en mettre au jour un nouveau fous le titre de Catéchisme général de la Réformation: ily etaloit, avec affez d'artifice, les prétendues erreurs de l'Eglife Romaine, pour montrer qu'il avoit été néceffaire de la réformer, Notre Archidiacre, ( il n'avoir alors que cette dignité), réfuta ce livre par un ouvrage que l'on peut regarder comme un excellent effai de la méthode tant admirée depuis, dans le fameux livre de l'Expofition. Dieu bénit fes premiers travaux, & le fruit en fubfifte encore dans les familles qui fe convertirent. Quelques Miniftres mêmes augmenterent par leur réunion à l'Eglife, le triomphe de la vérité, M. Boffuet la fervoit également par fa doctrine, & par fon élo

quence,

On fait avec quel éclat il parut dans la chaire. Les Oraifons funèbres qu'on a de lui, font autant de chefsd'oeuvre. Ce n'eft pas à nous à décider s'il a laiffé derriere lui nos plus grands Maîtres dans ce genre. On trouvera peut-être dans quelqu'un de fes concurrens une exactirude plus fcrupuleufe, quelque chofe de plus fini & de plus recherché; mais l'art qui s'y fait par-tout fentir décéle le travail de l'Orateur. Dans M. Boffuet l'éloquence n'est pas un fruit de l'étude; tout eft naturel en lui, & tout y eft au- deffus de l'art; ou plutôt, de la Sublimité même de fon génie, & de fes lumieres, naît fans effort & fans recherche, un art fupérieur à celui dont nous connoiffons les foibles regles. De-là ces tours nobles, ces grands traits, ces expreffions vives & har dies, cette force, en un mot, à laquelle rien ne réfiste. A cette mâle & vigoureufe éloquence, il joignoit dans fes fermons l'avantage que lui donnoit une fcience profonde; c'eft d'être plein, folide, inftructif; il vouloit que la Re igion fut connue & ne gagrât le cœur qu'après

avoir éclairé l'efprit. Sage, mais animé d'un zèle audeffus des fauffes confidérations de la chair & du fang, on le vit remplir à la Cour, toutes les obligations d'un Prédicateur apoftolique ; & ce courage, fi rare même dans les premiers fiécles de l'Eglife, lui attira l'admiration du Public, & lui acquit la haute eftime dont le Roi l'a toujours honoré,

En 1669, il reçut de Sa Majefté des témoignages de cette eftime, & fut fait Evêque de Condom; mais peu de temps après le Roi lui en donna des marques plus particulieres & plus éclatantes, en lui confiant l'éducation de Monteigneur le Dauphin. Ce choix, qui avoit été prévenu par le jugement du public, fut univerfellement applaudi. Notre Prélat, délicat fur fes devoirs, ne pouvant accorder la réfidence avec l'emploi dont le Roi le chargeoit, ne balança pas à quitter l'Evêché ; démarche qui fit redoubler les applaudiffements, & confirma l'attente & la joie publique fur l'instruction du jeune Prince mife en de fi bonnes mains.

Dégagé des devoirs qu'exige le gouvernement d'un Diocèfe, il fe donna tout entier à ceux que la Providence l'appelloit à remplir. Les foins du Précepteur, & les progres du Difciple se répandirent dans toute l'Europe avec un éclat extraordinaire. Innocent XI, qui venoit d'être élevé fur le Saint Siége, voulut en être plus particuliérement informé. M. de Condom lui en rendit un compte exact; & fi fes lettres font données quelque jour au public, celle qu'il écrivit à Sa Sainteté fur ce fujet, fera lue avec étonnement (1): on y verra les plus grandes idées que l'on puiffe fe former fur l'inftruction d'un Prince, tracées dans le fimple récit de l'éducation de Monfeigneur. Le Pape en fut frappé; les Brefs que M. de Condom reçut de lui à cette occafion, font remplis des plus grands éloges, & des plus fortes marques d'eftime & d'affection. Če feroit ici le lieu de faire noître les ouvrages qu'il a compofés pour l'ufage particulier du Prince, & qui ne font pas imprimés. Nous ne faurions intéreffer d'avantage le public; mais il faudra lui dérober une partie de la fatisfaction qu'il attend de

con

(1) Note de l'Editeur. Cette lettre a été publiée en 1709, en latin & en françois, par M. l'Abbé Boffuet, depuis Evêque de Troyes, à la tête de l'édition qu'il donna après la mort de M. fon Oncle, de l'excellent ouvrage intitulé: La Politique tirée des paroles de l'Ecriture Sainte, compofé pour M. le Dauphin. Elle a été depuis réimprimée bien des fois,

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