Vous me feriez entrer en quelque défiance; Mais je m'étonne fort que vous l'osiez blâmer', Ayant quelque intérêt vous-même à l'estimer. CLORIS. Je l'estimai jadis, et je l'aime et l'estime MÉLITE. Le pousser à me faire une infidélité, CLORIS. Me le faut-il pousser où son devoir l'oblige? MÉLITE. Quoi! le devoir chez vous oblige aux trahisons 3! CLORIS. Quand il n'en auroit point de plus justes raisons, VAR. Mais je m'étonne fort que vous l'osez blâmer, Vu que, pour votre honneur, vous devez l'estimer. * VAR. Après cela jugez si je le peux hair, Puisque sa trahison m'est un grand témoignage MÉLITE. Vraiment, c'est un pouvoir dont vous usez fort mal, 3 VAR. Quoi! son devoir l'oblige à l'infidélité! CLORIS. N'allons point rechercher tant de subtilité. La parole donnée, il faut que l'on la tienne. MÉLITE. Cela fait contre vous; il m'a donné la sienne. CLORIS. Oui, mais ayant déja reçu mon amitié, Sur un vœu solennel d'être un jour sa moitié', MÉLITE. De grace, excusez-moi, je vous prends pour une autre, Et c'étoit à Cloris que je croyois parler. CLORIS. Vous ne vous trompez pas. MÉLITE. Donc, pour mieux me railler", La sœur de mon amant contrefait ma rivale? CLORIS. Donc, pour mieux m'éblouir, une ame déloyale Que je ne sais que trop ce que vous me cachez. Jusqu'aux moindres discours dont votre passion MÉLITE. Moi, suborner Philandre! Ah! que m'osez-vous dire! VAR. Sur un serment commun d'être un jour sa moitié. 2 VAR. Doncques, pour me railler, CLORIS. Doncques, pour m'éblouir, une ame déloyale. CLORIS. La pure vérité. MÉLITE. Vraiment, en voulant rire, Vous passez trop avant; brisons là, s'il vous plaît. CLORIS. Vous en croirez du moins votre propre écriture'. Tenez, voyez, lisez. MÉLITE. Ah, dieux! quelle imposture! Jamais un de ces traits ne partit de ma main. CLORIS. Nous pourrions demeurer ici jusqu'à demain MÉLITE. Tout beau, mon innocence Veut apprendre de vous le nom de l'imposteur2, Pour faire retomber l'affront sur son auteur. CLORIS. Vous pensez me duper, et perdez votre peine. VAR. Vous en voulez bien croire, au moins, votre écriture. 2 VAR. Veut savoir paravant le nom de l'imposteur, CLORIS. Vous voulez m'affiner; mais c'est peine perdue, La chose étant si claire, à quoi bon la nier? MÉLITE. Ne vous obstinez point à me calomnier; Je veux que, si jamais j'ai dit mot à Philandre.... CLORIS. Remettons ce discours: quelqu'un vient nous surprendre; SCÈNE III. LISIS, MÉLITE, CLORIS. LISIS, à Cloris. Préparez vos soupirs à la triste nouvelle 2 Plaindre un frère au cercueil par son manque de foi. MÉLITE. Quoi, son frère au cercueil! LISIS. Oui, Tircis, plein de rage De voir que votre change indignement l'outrage, Maudissant mille fois le détestable jour Que votre bon accueil lui donna de l'amour, VAR. C'est le brave Lisis, qui, tout triste et pensif, 2 VAR. Pouvez-vous demeurer auprès d'une personne Dedans ce désespoir a chez moi rendu l'ame'; Et mes yeux désolés.... MÉLITE. Je n'en puis plus; je pâme. CLORIS. Au secours! au secours! SCÈNE IV. CLITON, LA NOURRICE, MÉLITE, LISIS, CLORIS. CLITON. D'où provient cette voix? LA NOURRICE. Qu'avez-vous, mes enfants? CLORIS. Mélite, que tu vois.... LA NOURRICE. Hélas! elle se meurt; son teint vermeil s'efface; LISIS, à Cliton. Va querir un peu d'eau; mais il faut te hâter. CLITON, à Lisis. Si proches du logis, il vaut mieux l'y porter. CLORIS. Aidez mes foibles pas; les forces me défaillent, 1 VAR. Dedans ce désespoir a rendu sa belle ame. MÉLITE. Hélas! soutenez-moi; je n'en puis plus, je pâme. |