ÉRASTE. Je veux qu'elle ait en soi quelque chose d'aimable; PHILANDRE. Qu'elle le soit ou non, je n'examine pas Si des deux l'une ou l'autre a plus ou moins d'appas. J'aime l'une ; et mon cœur pour toute autre insensible... ÉRASTE. Avise toutefois, le prétexte est plausible. PHILANDRE. J'en serois mal voulu des hommes et des dieux. ÉRASTE. On pardonne aisément à qui trouve son mieux. PHILANDRE. Mais en quoi git ce mieux? ÉRASTE. En esprit, en richesse 2. PHILANDRE. Ole honteux motif à changer de maîtresse ! ÉRASTE. En amour. VAR. Mais la peux-tu juger à l'autre comparable? PHILANDRE. Cloris m'aime, et si je m'y connoi', Rien ne peut égaler celui qu'elle a pour moi. ÉRASTE. Tu te détromperas, si tu veux prendre garde L'une... PHILANDRE. Adieu: des raisons de si peu d'importance Ne pourroient en un siècle ébranler ma constance 2. (Il dit ce vers à Cliton tout bas.) Dans deux heures d'ici tu viendras me revoir. CLITON. Disposez librement de mon petit pouvoir. ÉRASTE, seul. Il a beau déguiser, il a goûté l'amorce ; I VAR. Ma Cloris m'aime si chèrement, ÉRASTE. Tu le verras assez, si tu veux prendre garde. * VAR. N'ont rien qui soit bastant d'ébranler ma constance. Ainsi je suis deux fois vengé du ravisseur, Ce sonnet que pour toi j'ai promis d'entreprendre. MÉLITE, au travers d'une jalousie, cependant qu'Éraste Que font-ils là tous deux? qu'ont-ils à démêler? Du moins les compliments, dont peut-être ils se jouent, Sont des civilités qu'en l'ame ils désavouent. TIRCIS 3. J'y donne une raison de ton sort inhumain. Il dit ce dernier vers comme à l'oreille de Cliton, et tous deux rentrent, chacun de leur côté. (Édition de 1633.) 1 VAR. Elle paroît au travers d'une jalousie, et dit ces vers cependant qu'Éraste lit le sonnet tout bas. 3 Il montre du doigt à Éraste la fin de son sonnet. (1633.) A ce charmant objet dont ton ame est blessée'. Une autre fois, Tircis ; quelque affaire pressée TIRCIS, seul. La belle humeur de l'homme ! O dieux, quel personnage! Ses regards pleins de feu s'entendent avec moi; VAR. A ce divin objet dont ton ame est blessée. VAR. Feignant de lui rendre son sonnet, il le fait choir, et Tircis le ramasse. 3 Mélite se retire de la jalousie, et descend. (Édition de 1633.) 4 VAR. Que d'un petit coup d'œil l'aise m'est cher vendue! SCÈNE VIII. MÉLITE, TIRCIS. MÉLITE. Hé bien! qu'avez-vous fait de votre compagnie? TIRCIS. Je ne puis rien juger de ce qui l'a bannie: MÉLITE. Sans doute il m'aura vue, Et c'est de là que vient cette fuite imprévue'. TIRCIS. Vous aimant comme il fait, qui l'eût jamais pensé? MÉLITE. Vous ne savez donc rien de ce qui s'est passé? TIRCIS. J'aimerois beaucoup mieux savoir ce qui se passe, Et la part qu'a Tircis en votre bonne grace. MÉLITE. Meilleure aucunement qu'Éraste ne voudroit. VAR. Et c'est de là que vient cette fuite impourvue. Aucunement s'employoit alors dans le sens de peut-être, en quelque sorte. Il a perdu cette signification. |