Pratiquez vos conseils, ou ne m'en donnez pas. TIRCIS. J'ai connu mon erreur auprès de vos appas; ÉRASTE. Ainsi donc, par l'issue ' Mon ame sur ce point n'a point été déçue? TIRCIS. Si tes feux en son cœur produisoient même effet, Crois-moi, que ton bonheur seroit bientôt parfait. MÉLITE. 3 Pour voir si peu de chose, aussitôt vous dédire, Me donne à vos dépens de beaux sujets de rire; Mais je pourrois bientôt à m'entendre flatter Concevoir quelque orgueil qu'il vaut mieux éviter. Excusez ma retraite. ÉRASTE. Adieu, belle inhumaine, De qui seule dépend et ma joie et ma peine 4. 1 VAR. Ainsi ma prophétie Est, à ce que je vois, de tout point réussie. TIRCIS. Si tu pouvois produire en elle un même effet. * Crois-moi que. Cette locution étoit usitée du temps de Corneille, et se retrouve dans la plupart des poëtes de son temps. On disoit même croire quelqu'un de quelque chose. Mais ce verbe ne reçoit plus aujourd'hui qu'un régime direct. 3 VAR. Mais, outre qu'il m'est doux de m'entendre flatter, 4 VAR. De qui seule dépend et mon aise et ma peine. MÉLITE. Plus sage à l'avenir, quittez ces vains propos, SCÈNE III. ÉRASTE, TIRCIS. ÉRASTE. Maintenant, suis-je un fou? mérité-je du blâme? Que dis-tu de l'objet? que dis-tu de ma flamme? TIRCIS. Que veux-tu que j'en die? elle a je ne sais quoi ÉRASTE. Confesse franchement qu'elle a su te ravir, TIRCIS. En effet, ayant vu tant et de tels appas, 1 VAR. Mais ta muse, du moins, s'en lairra suborner, A de puissants efforts pour de si belles choses? Que je ne rime point, je ne le promets pas. ÉRASTE. Tes feux n'iront-ils point plus avant que la rime1? TIRCIS. Si je brûle jamais, je veux brûler sans crime. ÉRASTE. Mais si, sans y penser, tu te trouvois surpris? TIRCIS. Quitte pour décharger mon cœur dans mes écrits. ÉRASTE. Ainsi, ce cœur d'acier qui me tient sous sa loi TIRCIS. Me prépare le ciel de nouveaux châtiments ÉRASTE. Adieu. Je suis content, j'ai ta parole en gage, VAR. Garde aussi que tes feux n'outre-passent la rime. 2 VAR. Si jamais ce penser entre dans mon courage. TIRCIS, seul. En matière d'amour rien n'oblige à tenir ; SCÈNE IV. PHILANDRE, CLORIS. PHILANDRE. Je meure, mon souci, tu dois bien me haïr; CLORIS. Ne m'épouvante point; à ta mine, je pense PHILANDRE. Sache donc qu'il ne vient sinon de trop CLORIS. d'amour. J'eusse osé le gager qu'ainsi par quelque ruse PHILANDRE'. Ton adorable objet, mon unique vainqueur, VAR. Mais n'importe, sachons.... PHILANDRE. Ton bel œil, mon vainqueur. 2 VAR. Je recherche par où tu me pourras déplaire. J'examine ton teint dont l'éclat me surprit, Les traits de ton visage, et ceux de ton esprit; Mais je n'en puis trouver un seul qui ne me charme '. CLORIS. Et moi, je suis ravie, après ce peu d'alarme, PHILANDRE. Ta beauté te répond de ma persévérance, CLORIS. Voilà fort doucement dire que, sans ta foi, PHILANDRE. Je traiterois trop mal une telle maîtresse VAR. Mais je n'en puis trouver un seul qui ne me plaise. CLORIS. Et moi, dans mes défauts, encor suis-je bien aise VAR. De quoi rendre constant l'homme le plus volage. CLORIS. Tu m'en vas tant conter de ma perfection, PHILANDRE. S'il est permis d'en prendre à l'égal du mérite, |