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Pour m'en faire raison, l'avoit réduite en poudre!
Allons voir ce miracle, et désarmer nos mains,
Si le ciel a daigné prévenir nos desseins.
Destins, soyez enfin de mon intelligence,

Et vengez mon affront, ou souffrez ma vengeance.

SCÈNE III.

FLORIDAN.

Quel bonheur m'accompagne en ce moment fatal!
Le tonnerre a sous moi foudroyé mon cheval,
Et, consumant sur lui toute sa violence,
Il m'a porté respect parmi son insolence.
Tous mes gens, écartés par un subit effroi,
Loin d'être à mon secours, ont fui d'autour de moi,
Ou déja dispersés par l'ardeur de la chasse,
Ont dérobé leur tête à sa fière menace.

Cependant seul, à pied, je pense à tous moments
Voir le dernier débris de tous les éléments,
Dont l'obstination à se faire la guerre

Met toute la nature au pouvoir du tonnerre.
Dieux, si vous témoignez par-là votre courroux,
De Clitandre ou de moi lequel menacez-vous?
La perte m'est égale; et la même tempête
Qui l'auroit accablé tomberoit sur ma tête.

Il m'a porté respect parmi son insolence.
Hola! quelqu'un à moi. Tous mes gens écartés,
Loin de me secourir, suivent de tous côtés
L'effroi de la tempête, ou l'ardeur de la chasse.
Cette ardeur les emporte, ou la frayeur les glace.

Pour le moins, justes dieux, s'il court quelque danger',
Souffrez que je le puisse avec lui partager.
J'en découvre à la fin quelque meilleur présage;
L'haleine manque aux vents, et la force à l'orage;
Les éclairs, indignés d'être éteints par les eaux,
En ont tari la source et séché les ruisseaux,
Et déja le soleil de ses rayons essuie
Sur ces moites rameaux le reste de la pluie;
Au lieu du bruit affreux des foudres décochés,
Les petits oisillons, encor demi-cachés2....
Mais je verrai bientôt quelques uns de ma suite;
Je le juge à ce bruit.

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VAR. Pour le moins, dieux, s'il court quelque danger fatal,
Qu'il en ait, conime moi, plus de peur que de mal.

› Vers supprimés:

Poussent en tremblotant, et hasardent à peine
Leur voix, qui se dérobe à la peur incertaine
Qui tient encor leur ame, et ne leur permet pas
De se croire du tout préservés du trépas.
VAR. J'aurai bientôt ici quelques uns de ma suite.

PYMANTE.

Songe à mourir;

Tout l'univers ici ne te peut secourir.

FLORIDAN.

L'égorger à ma vue! ô l'indigne spectacle!

Sus, sus, à ce brigand opposons un obstacle.

Arrête, scélérat!

PYMANTE.

Téméraire, où vas-tu?

FLORIDAN.

Sauver ce gentilhomme à tes pieds abattu.

Traitre,

DORISE, à Pymante'.

n'avance pas; c'est le prince.

PYMANTE, tenant Dorise d'une main, et se battant de l'autre.

N'importe;

Il m'oblige à sa mort, m'ayant vu de la sorte.

FLORIDAN.

Est-ce là le respect que tu dois à mon rang?

PYMANTE.

Je ne connois ici ni qualité ni sang.

Quelque respect ailleurs que ta naissance obtienne2, Pour assurer ma vie, il faut perdre la tienne.

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'VAR. Quelque respect ailleurs que ton grade s'obtienne.

Si mon débile bras ne dédit point mon cœur,

J'arrêterai le tien.

PYMANTE.

Que fais-tu, misérable?

DORISE.

Je détourne le coup d'un forfait exécrable.

PYMANTE.

Avec ces vains efforts crois-tu m'en empêcher'?

FLORIDAN.

Par une heureuse adresse il l'a fait trébucher.

Assassin, rends l'épée.

SCÈNE V.

FLORIDAN, PYMANTE, DORISE; TROIS VENEURS, portant en leurs mains les vrais habits de Pymante, Lycaste, et Dorise.

2

PREMIER VENEUR.

Écoute, il est fort proche;

C'est sa voix qui résonne au creux de cette roche,
Et c'est lui que tantôt nous avions entendu.

FLORIDAN désarme Pymante, et en donne l'épée à garder à Dorise. Prends ce fer en ta main.

PYMANTE.

Ah cieux! je suis perdu.

'Dorise, s'embarrassant dans ses jambes, le fait trébucher. (1632.)

Il saute sur Pymante, et deux veneurs paroissent chargés des vrais habits de Pymante, Lycaste, et Dorise. (1632.)

SECOND VENEUR.

Oui, je le vois. Seigneur, quelle aventure étrange', Quel malheureux destin en cet état vous range?

FLORIDAN.

Garrottez ce maraud; les couples de vos chiens
Vous y pourront servir, faute d'autres liens.
Je veux qu'à mon retour une prompte justice
Lui fasse ressentir par l'éclat d'un supplice,
Sans armer contre lui que les lois de l'état,
Que m'attaquer n'est pas un léger attentat:
Sachez
que, s'il échappe, il y va de vos têtes.

PREMIER VENEUR.

Si nous manquons, seigneur, les voilà toutes prêtes 2.
Admirez cependant le foudre et ses efforts
Qui dans cette forêt ont consumé trois corps 3;
En voici les habits, qui, sans aucun dommage,
Semblent avoir bravé la fureur de l'orage.

FLORIDAN.

Tu montres à mes yeux

de merveilleux effets 4.

VAR. Le voilà. Monseigneur, quelle aventure étrange
Et quel mauvais destin en cet état vous range?

LE PRINCE.

Garrottez ce maraud; faute d'autres liens,

Employez-y plutôt les couples de vos chiens.

2 VAR. En ce cas, monseigneur, les voilà toutes prêtes.
3 VAR. Qui dans cette forêt ont consommé trois corps.
4 VAR. Tu me montres vraiment de merveilleux effets.

Ces habits, que n'a point approchés le tonnerre,
Connoissez-les, mon prince, et voyez devant vous.

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