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se dédire. En tout cas, elle est mon coup d'essai; et d'autres que moi ont intérêt à la défendre, puisque, si elle n'est pas bonne, celles qui sont demeurées au-dessous doivent être fort mauvaises.

ARGUMENT.

Éraste, amoureux de Mélite, la fait connoître à son ami Tircis, et, devenu puis après jaloux de leur hantise, fait rendre des lettres d'amour supposées, de la part de Mélite, à Philandre, accordé de Cloris, sœur de Tircis. Philandre, s'étant résolu, par l'artifice et les suasions d'Éraste, de quitter Cloris pour Mélite, montre ces lettres à Tircis. Ce pauvre amant en tombe en désespoir, et se retire chez Lisis, qui vient donner à Mélite de fausses alarmes de sa mort. Elle se pâme à cette nouvelle, et, témoignant par-là son affection, Lisis la désabuse, et fait revenir Tircis, qui l'épouse. Cependant Cliton, ayant vu Mélite pâmée, la croit morte, et en porte la nouvelle à Éraste, aussi bien que de la mort de Tircis. Éraste, saisi de remords, entre en folie; et remis en son bon sens par la nourrice de Mélite, dont il apprend qu'elle et Tircis sont vivants, il lui va demander pardon de sa fourbe, et obtient de ces deux amants Cloris, qui ne vouloit plus de Philandre après sa légèreté.

ACTEURS.

ÉRASTE, amoureux de Mélite.
TIRCIS, ami d'Éraste, et son rival.
PHILANDRE, amant de Cloris.

MÉLITE, maîtresse d'Éraste et de Tircis.
CLORIS, sœur de Tircis.

LISIS, ami de Tircis.

CLITON, voisin de Mélite.
LA NOURRICE de Mélite.

La scène est à Paris.

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Je te l'avoue, ami, mon mal est incurable 2;

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Voyez dans la Vie de Corneille, placée à la tête de ce volume, l'historique de Mélite. Cette pièce, qui portoit dans l'origine le double titre de Mélite, ou les Fausses Confidences, n'obtint pas d'abord tout le succès qu'elle méritoit; et le public fut long-temps à reconnoître la supériorité avec laquelle Corneille avoit traité son sujet.

Fontenelle en fait remonter la première représentation à l'année 1625; mais nous ne croyons pas devoir adopter cette date, et nous suivons les frères Parfait, qui fixent cette première représentation à l'année 1629. Voici nos raisons:

Mairet, dans sa préface des Galanteries du duc d'Ossone, après avoir cité Rotrou, Scudéri, Corneille et du Ryer, ajoute qu'il vient de les nommer suivant l'ordre du temps où ils sont entrés dans la carrière dramatique; et Rotrou, qui a devancé Corneille dans cette carrière, et que Corneille appeloit son père, n'a donné l'Hypocondriaque, sa première pièce, qu'en 1628.

VARIANTE. Parmi tant de rigueurs, n'est-ce pas chose étrange

Je n'y sais qu'un remède, et j'en suis incapable:
Le change seroit juste, après tant de rigueur;
Mais, malgré ses dédains, Mélite a tout mon cœur;
Elle a sur tous mes sens une entière puissance;
Si j'ose en murmurer, ce n'est qu'en son absence,
Et je ménage en vain dans un éloignement
Un peu de liberté pour mon ressentiment:
D'un seul de ses regards l'adorable contrainte
Me rend tous mes liens, en resserre l'étreinte,
Et par un si doux charme aveugle ma raison,
Que je cherche mon mal et fuis ma guérison.
Son œil agit sur moi d'une vertu si forte,
Qu'il ranime soudain mon espérance morte,
Combat les déplaisirs de mon cœur irrité,
Et soutient mon amour contre sa cruauté;
Mais ce flatteur espoir qu'il rejette en mon ame
N'est qu'un doux imposteur qu'autorise ma flamme',
Et qui, sans m'assurer ce qu'il semble m'offrir,
Me fait plaire en ma peine, et m'obstine à souffrir.

Que rien n'est assez fort pour me résoudre au change?
Jamais un pauvre amant ne fut si maltraité,

Et jamais un amant n'eut tant de fermeté.

Mélite a sur mes sens une entière puissance;

Si sa rigueur m'aigrit, ce n'est qu'en son absence,

Et j'ai beau ménager dans un éloignement

Un seul de ses regards l'étouffe et le dissipe;
Un seul de ses regards me séduit et me pipe,
Et d'un tel ascendant maîtrise ma raison,
Que je chéris mon mal, et fuis ma guérison.

VAR. N'est rien qu'un vent qui souffle et rallume ma flamme,
Et reculant toujours ce qu'il semble m'offrir.

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