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du climat; chaque pays, chaque degré de température a ses plantes particulières; on trouve au pied des Alpes celles de France et d'Italie, on trouve à leur sommet celles des pays du nord; on retrouve ces mêmes plantes du nord sur les cimes glacées des montagnes d'Afrique. Sur les monts qui séparent l'empire du Mogol du royaume de Cachemire, on voit, du côté du midi, toutes les plantes des Indes, et l'on est surpris de ne voir de l'autre côté que des plantes d'Europe, C'est aussi des climats excessifs que l'on tire les drogues, les parfums, les poisons, et toutes les plantes dont les qualités sont excessives : le climat tempéré ne produit au contraire que des choses tempérées : les herbes les plus douces, les légumes les plus sains, les fruits les plus suaves, les animaux les plus tranquilles, les hommes les plus polis sont l'apanage de cet heureux climat. Ainsi la terre fait les plantes; la terre et les plantes font les animaux; la terre, les plantes et les animaux font l'homme; car les qualités des végétaux viennent immédiatement de la terre et de l'air; le tempérament et les autres qualités relatives des animaux qui paissent l'herbe tiennent de près à celles des plantes dont ils se nourrissent; enfin les qualités physiques de l'homme et des animaux qui vivent sur les autres animaux autant que sur les plantes, dépendent, quoique de plus loin, de ces mêmes causes, , dont l'influence s'étend jusque sur leur naturel et sur leurs mœurs. Et ce qui prouve encore mieux que tout se tem

père dans un climat tempéré, et que tout est excès dans un climat excessif, c'est que la grandeur et la forme, qui paroissent être des qualités absolues, fixes et déterminées, dépendent cependant, comme les qualités relatives, de l'influence du climat la taille de nos animaux quadrupèdes n'approche pas de celle de l'éléphant, du rhinocéros, de l'hippopotame; nos plus gros oiseaux sont fort petits, si on les compare à l'autruche, au condor, au casoar; et quelle comparaison des poissons, des lézards, des serpents de nos climats avec les baleines, les cachalots, les narvals qui peuplent les mers du nord, et avec les crocodiles, les grands lézards et les couleuvres énormes qui infestent les terres et les eaux du midi? Et si l'on considère encore chaque espèce dans différents climats, on y trouvera des variétés sensibles pour la grandeur et pour la forme; toutes prennent une teinture plus ou moins forte du climat. Ces changements ne se font que lentement, imperceptiblement; le grand ouvrier de la nature est le temps : comme il marche toujours d'un pas égal, uniforme et réglé, il ne fait rien par sauts; mais par degrés, par nuances, par succession, il fait tout; et ces changements, d'abord imperceptibles, deviennent peu peu sensibles, et se marquent enfin par des résultats auxquels on ne peut se méprendre.

à

L'HOMME.

Tour marque dans l'homme, même à l'extérieur, sa supériorité sur tous les êtres vivants; il se soutient droit et élevé, son attitude est celle du commandement, sa tête regarde le ciel et présente une face auguste sur laquelle est imprimé le caractère de sa dignité; l'image de l'âme y est peinte par la physionomie; l'excellence de sa nature perce à travers les organes matériels, et anime d'un feu divin les traits de son visage; son port majestueux, sa démarche ferme et hardie, annoncent sa noblesse et son rang; il ne touche à la terre que par ses extrémités les plus éloignées, il ne la voit que de loin, et semble la dédaigner; les bras ne lui sont pas donnés pour servir de piliers d'appui à la masse de son corps, sa main ne doit pas fouler la terre, et perdre par des frottements réitérés la finesse du toucher dont elle est le principal organe; le bras et la main sont faits pour servir à des usages plus nobles, pour exécuter les ordres de la volonté, pour saisir les choses éloignées, pour écarter les obstacles, pour prévenir les rencontres et le choc de ce qui pourroit nuire, pour embrasser et retenir ce qui peut plaire, pour le mettre à portée des autres sens.

Lorsque l'âme est tranquille, toutes les parties du visage sont dans un état de leur repos; portion, leur union, leur ensemble, marquent

pro

encore assez la douce harmonie des pensées, et répondent au calme de l'intérieur; mais lorsque l'âme est agitée, la face humaine devient un tableau vivant où les passions sont rendues avec autant de délicatesse que d'énergie, où chaque mouvement de l'âme est exprimé par un trait, chaque action par un caractère, dont l'impression vive et prompte devance la volonté, nous décèle et rend au-dehors par des signes pathétiques les images de nos secrètes agitations.

C'est surtout dans les yeux qu'elles se peignent et qu'on peut les reconnoître : l'œil appartient à l'âme plus qu'aucun autre organe; il semble y toucher et participer à tous ses mouvements; il en exprime les passions les plus vives et les émotions les plus tumultueuses, comme les mouvements les plus doux et les sentiments les plus délicats; il les rend dans toute leur force, dans toute leur pureté, tels qu'ils viennent de naître; il les transmet par des traits rapides qui portent dans une autre âme le feu, l'action, l'image de celle dont ils partent; l'œil reçoit et réfléchit en même temps la lumière de la pensée et la chaleur du sentiment; c'est le sens de l'esprit, et la langue de l'intelligence.

LES SENS.

LES

sens sont des espèces d'instruments dont il faut apprendre à se servir: celui de la vue, qui paroît être le plus noble et le plus admirable, est

le

en même temps le moins sûr et le plus illusoire; ses sensations ne produiroient que des jugements faux, s'ils n'étoient à tout instant rectifiés par témoignage du toucher; celui-ci est le sens solide, c'est la pierre de touche et la mesure de tous les autres sens, c'est le seul qui soit absolument essentiel à l'animal, c'est celui qui est universel et qui est répandu dans toutes les parties de son corps: : cependant ce sens même n'est pas encore parfait dans l'enfant au moment de sa naissance; il donne à la vérité des signes de douleur par ses gémissements et ses cris, mais il n'a encore aucune expression pour marquer le plaisir; il ne commence à rire qu'au bout de quarante jours, c'est aussi le temps auquel il commence à pleurer; car auparavant les cris et les gémissements ne sont point accompagnés de larmes. Il ne paroît done aucun signe des passions sur le visage du nouveau né, les parties de la face n'ont pas même toute la consistance et tout le ressort nécessaires à cette espèce d'expression des sentiments de l'âme : toutes les autres parties du corps, encore foibles et délicates, n'ont que des mouvements incertains et mal assurés; il ne peut pas se tenir debout, ses jambes et ses cuisses sont encore pliées par l'habitude qu'il a contractée dans le sein de sa mère, il n'a pas la force d'étendre les bras ou de saisir quelque chose avec la main; si on l'abandonnoit, il resteroit couché sur le dos sans pouvoir se re

tourner.

En réfléchissant sur ce que nous venons de

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