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à la logique, être ou spinosiste ou chrétien; contempler stoïquement la Divinité et redouter de lui demander raison de tant de besoins physiques, intellectuels et moraux qui ne trouvent pas sur la terre leur satisfaction, ou travailler avec joie et confiance, non pas seulement pour la nourriture qui périt, mais pour celle qui subsiste éternellement (1). Quant à cette multitude de systèmes qui, bariolés de mille couleurs, empruntent et au spinosisme et au christianisme un fonds d'idées, mais qui refusent d'arborer franchement un étendard; qui, au contraire, s'affublent de quelques lambeaux qu'ils arrachent à la robe du Christ, pour faire mieux passer, sous cette apparence d'esprit chrétien, les rêves de leurs propres conceptions, on devrait une bonne fois y renoncer; ces tours de force chez quelques-uns, de ruse chez quelques autres, devraient enfin avoir leur terme. Les hommes d'honneur ne comprendront-ils pas que si c'est le seul triomphe de la vérité que l'on ambitionne, on doit hardiment afficher de part et d'autre ses prétentions, et qu'il est indigne de placer sous l'égide de ses adversaires ce qu'on lui cache d'hostilités? Comme en définitive, c'est le système qui répondra le mieux aux besoins incessans de la nature humaine qui prévaudra, c'est à exposer largement les remèdes que l'on propose que devront s'appliquer les défenseurs des deux systèmes. Quant à la forfanterie d'avancer que les maîtres d'école et les femmes seront les seuls à s'asseoir désormais sur les bancs des églises chrétiennes (2), il faudrait, quand

(1) Paroles du Christ.

(2) Strauss, vers la fin du 2 tome de sa dogmatique.

on s'exprime ainsi, se montrer un peu plus conséquens, ne pas attendre, comme vous le dites, qu'on vous chasse de l'Eglise, parce que, de notre temps, on ne chasse plus personne, et que la liberté étant la seule discipline mise en vigueur, les rationalistes hégeliens, comme les autres, devraient user de cette liberté pour réunir leurs adeptes et se préserver de tout contact avec des gens dont on méprise au fond du cœur toutes les croyances. Plus que jamais l'âme humaine s'agite dans tous les rangs, dans toutes les conditions; plus que jamais les hommes de science et d'examen se dépouillent de leurs vieux préjugés pour étudier ce que le christianisme a de vraiment conforme à notre nature d'homme; ne viendront-ils donc jamais ces personnages revêtus du noble caractère du génie et de la vertu, qui feront disparaître les nombreux malentendus qui ont si longtemps désuni la science et la foi, la philosophie et la religion, et qui démontreront que toute vérité étant essentiellement moralisante, toute idée chrétienne, doit, par cela seul qu'elle est vraie, avoir sa racine dans quelque fibre du cœur humain? Et comment résister à une telle démonstration ? comment, surtout, refuser alors d'abattre les barrières qui séparent encore les chrétiens des diverses communions? comment enfin les hommes de cœur ne réserveraient-ils pas tout leur zèle pour parvenir à la réalisation de cette vaste et imposante unité dans les esprits, que prescrit autant l'autorité de la raison que celle de la religion, cette unité qui serait si éminemment propre à entretenir sur la terre le feu de la charité.

J'aurai peut-être contribué, pour ma faible part, à

ce rapprochement des esprits, par les liens d'une même foi et des mêmes espérances immortelles, si le principal but qui me préoccupait en composant cet ouvrage est atteint, but qui ennoblissait à mes yeux la tâche que je m'étais imposée, tout en regrettant de manquer des qualités nécessaires pour la remplir dignement. Ce but était de montrer dans la personne et dans la doctrine de Spinosa tout ce que l'esprit humain et son libre arbitre, abandonnés à eux-mêmes, sont capables de comprendre de plus raisonnable et de faire de plus moral, afin qu'à la vue de cette impuissance à satisfaire toutes les exigences de notre nature, l'homme sensé accepte enfin dans toute sa plénitude la doctrine si éminemment rationnelle de la foi évangélique, et ne relève plus que de celui qui, suivant l'expression d'un apôtre, << a mis en évidence la vie et l'immortalité. »

FIN.

IMPRIMÉ CHEZ PAUL RENOUARD,

rue Garancière, n. 5.

Pages.

CHAP. XV. - Extérieur de Spinosa. — Son caractere moral.
CHAP. XVI.- Développement historique des doctrines de Spinosa.—

Hollande et Angleterre. . .

...

167

178

CHAP. XVII. — Développement historique des doctrines de Spinosa.—

France. . .

196

CHAP. XVIII. — Développement historique des doctrines de Spinosa en Allemagne. — § L. Leibnitz-Wolff, Mendelsohn, Lessing et Jacobi, Rehberg, Heydenreich, Herder...

-

226

CHAP. XIX. Suite du développement historique des doctrines de Spi-
nosa en Allemagne. — § II. Kant, Reinhold, Jacobi. . .
CHAP. XX. Suite du développement historique des doctrines de Spi-
nosa en Allemagne. — § III. Fichte. . . .

249

264

CHAP. XXI. Suite du développement historique de la doctrine de
Spinosa en Allemagne. — § IV. Schelling

272

Chap, XXII, Suite du développement historique de la doctrine de
Spinosa en Allemagne. V. Hégel.

290

. . 308

.. 319

CHAP. XXIII. Suite du développement historique de la doctrine de
Spinosa en Allemagne. — § VI. Vues de Schelling et de Hégel sur
la personnalité de Dieu et l'immortalité de l'âme.
CHAP. XXIV. Suite du développement historique de la doctrine de
Spinosa en Allemagne. — § VII. Ecole de Schelling.
CHAP. XXV. Suite du développement historique de la doctrine de
Débats
Spinosa en Allemagne. — § VIII. Disciples de Hégel.
sur l'immortalité de l'âme et la personnalité de Dieu. — Richter de
Magdebourg, Weisse, Göschel. . .

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CHAP. XXVI, Suite du développement historique de la doctrine de

334

Spinosa en Allemagne, — § IX. Jeune école hégelienne; Strauss, Feuerbach, Ruge. Polémique de Ruge avec Léo.-Henri Heine. 346 CHAP. XXVII. Suite du développement historique de la doctrine de Spinosa en Allemagne.-( X. Michelet et Richter de Quedlinbourg. CHAP. XXVIII. Résumé et conclusion,

364

376

FIN DE LA TABLE.

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