Page images
PDF
EPUB
[ocr errors][merged small][merged small][merged small]

AVERTISSEMENT

De l'Auteur sur la seconde édition.

ON

On y trouvera un grand nombre d'augmentations semées dans tout le livre; les distances, les grandeurs, les révolutions des corps célestes, exprimées beaucoup plus précisément qu'elles ne l'avaient été dans les éditions précédentes, et selon le calcul de nos plus excellens astronomes, et en général tous les phénomènes du ciel conformes aux observations les plus exactes. On peut assurer les lecteurs que sur tous ces points là ils peuvent autant se fier à ce livre, tel qu'il est présentement, que s'il était plus savant et plus profond.

[ocr errors]

PRÉFACE.

Je suis à peu près dans le même cas où se trouva Cicéron, lorsqu'il entreprit de mettre en sa langue des matières de philosophie qui jusques-là n'avaient été traitées qu'en grec. Il nous apprend qu'on disait que ses ouvrages seraient fort inutiles, parce que ceux qui aiment la philosophie, s'étant bien donné la peine de la chercher dans les livres grecs, négligeraient après cela de la voir dans des livres latins, qui ne seraient pas originaux ; et que ceux qui n'avaient pas de goût pour la philosophie, ne se souciaient de la voir, ni en latin, ni en grec.

A cela, il répond qu'il arriverait tout le contraire ; que ceux qui n'étaient pas philosophes seraient tentés de le devenir, par la facilité de lire des livres latins ; et que ceux qui l'étaient déjà par la lecture des livres grecs, seraient bien aises de voir comment ces choseslà avaient été maniées en latin.

Cicéron avait raison de parler ainsi. L'excellence de son génie, et la grande réputation qu'il avait déjà acquise, lui garantissaient le succès de cette nouvelle sorte d'ouvrages qu'il donnait au public; mais moi, je - suis bien éloigné d'avoir les mêmes sujets de confiance dans une entreprise presque pareille à la sienne. J'ai voulu traiter la philosophie d'une manière qui ne fût point philosophique; j'ai tâché de l'amener à un point

où elle ne fût ni trop sèche pour les gens du monde, ni trop badine pour les savans. Mais si on me dit à peu près comme à Cicéron, qu'un pareil ouvrage n'est propre, ni aux savans qui n'y peuvent rien apprendre, ni aux gens du monde qui n'auront point d'envie d'y rien apprendre, je n'ai garde de répondre ce qu'il répondit. Il se peut bien faire qu'en cherchant un milieu où la philosophie convint à tout le monde, j'en aie trouvé un où elle ne convienne à personne; les milieux sont trop difficiles à tenir, et je ne crois pas qu'il me prenne envie de me mettre une seconde fois dans la même peine.

Je dois avertir ceux qui liront ce livre, et qui ont quelque connaissance de la physique, que je n'ai point du tout prétendu les instruire, mais seulement les divertir, en leur présentant, d'une manière un peu plus agréable et plus égayée, ce qu'ils savent déja plus solidement. J'avertis ceux à qui ces matières sont nouvelles, que j'ai cru pouvoir les instruire et les divertir tout ensemble. Les premiers iront contre mon intention, s'ils cherchent ici de l'utilité; et les seconds, s'ils n'y cherchent que de l'agrément.

Je ne m'amuserai point à dire que j'ai choisi, dans toute la philosophie, la matière la plus capable de piquer la curiosité. Il semble que rien ne devrait nous intéresser davantage, que de savoir comment est fait ce monde que nous habitons, s'il y a d'autres mondes semblables, et qui soient habités aussi : mais après tout, s'inquiète de tout cela qui veut. Ceux qui ont des pensées à perdre, les peuvent perdre sur ces sortes de sujets; mais tout le monde n'est pas en état de faire cette dépense inutile.

l'on

J'ai mis, dans ces Entretiens, une femme que instruit, et qui n'a jamais ouï parler de ces choses-là. J'ai cru que cette fiction me servirait, et à rendre l'ouvrage plus susceptible d'agrément, et à et à encourager les dames par l'exemple d'une femme, qui ne sortant jamais des bornes d'une personne qui n'a nulle teinte des sciences, ne laisse pas d'entendre ce qu'on lui dit, et de ranger dans sa tête, sans confusion, les tourbillons et les mondes. Pourquoi des femmes céderaientelles à cette marquise imaginaire, qui ne conçoit que ce qu'elle ne peut se dispenser de concevoir?

A la vérité, elle s'applique un peu ; mais qu'est-ce ici que s'appliquer? Ce n'est pas pénétrer à force de méditation une chose obscure d'elle-même, ou expliquée obscurément; c'est seulement ne point lire, sans se présenter nettement ce qu'on lit. Je ne demande aux dames, pour tout ce système de philosophie, que la même application qu'il faut donner à la Princesse de Clèves, si on veut en suivre bien l'intrigue, et en connaître toute la beauté. Il est vrai que les idées de ce livreci sont moins familières à la plupart des femmes, que celles de la Princesse de Clèves; mais elles n'en sont pas plus obscures, et je suis sûr qu'à une seconde lecture, tout au plus, il ne leur en sera rien échappé.

Comme je n'ai pas prétendu faire un système en l'air, et qui n'eût aucun fondement, j'ai employé de vrais raisonnemens de physique, et j'en ai employé autant qu'il a été nécessaire. Mais il se trouve heureusement, dans ce sujet, que les idées de physique y sont riantes d'elles-mêmes, et que dans le même temps qu'elles contentent la raison, elles donnent à l'imagination un spectacle qui lui plaît autant que s'il était fait exprès pour elle.

« PreviousContinue »