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BIBLIOTHEQUE CANTONAL

LAUSANNE
UNIVERSITAIRE

D

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Oici une edition de mes Ouvra-Mira mira ges beaucoup plus exacte que les precedentes, qui ont toutes efté affez peu correctes. J'y ay joint cinq Epiftres nouvelles que j'avois compofées long-temps avant que d'eftre engagé dans le glorieux employ qui m'a tiré du métier de la Poëfie. Elles font du mefme stile que mes autres écrits, & j'ofe me flater qu'elles ne leur feront point de tort. Mais c'eft au Lecteur à en juger, & je n'emploiray point ici ma Préface, non plus que dans mes autres editions, à le gagner par des flateries, ou à le prévenir par des raisons dont il doit s'avifer de lui-mefme. Je me contenteray de l'avertir d'une chose dont il est bon qu'on foit inftruit. C'eft qu'en attaquant dans mes Satires les defauts de quantité d'Ecrivains de nostre fiecle, je n'ay pas pretendu pour cela ofter à ces Ecrivains le merite & les bonnes qualités qu'ils peuvent avoir d'ailleurs. Je n'ay pas pretendu, dis-je, que Chapelain, par exemple, quoy qu'affez méchant Poëte, n'ayt pas fait autrefois, je ne fçay comment, une affez belle Ode; & qu'il n'y euft point d'efprit ni d'agrément dans les ouvrages de M. Quinaut quoyque fi éloignéz

de la perfection de Virgile. J'ajoûteray même fur ce dernier, que dans le temps où j'écrivis contre lui, nous eftions tous deux fort jeunes, & qu'il n'avoit pas fait alors beaucoup d'ouvrages qui lui ont dans la fuite acquis une jufte reputation. Je veux bien auffi avouer qu'il y a du genie dans les écrits de Saint Amand, de Brebeuf, de Scuderi, & de plufieurs autres que j'ay critiqués, & qui font en effet d'ailleurs, auffi-bien que moy, tres-dignes de critique. En un mot,

même fincerité que j'ay raillé de ce qu'ils ont de blâmable, je fuis preft à convenir de ce qu'ils peuvent avoir d'excellent. Voilà, ce me femble, leur rendre justice, & faire bien voir que ce n'eft point un efprit d'envie & de médifance qui m'a fait écrire contre eux. Pour revenir à mon Edition: outre mon Remercîment à l'Academic & quelques Epigrammes que j'y ay jointes, j'ay auffi ajoûté au Poëme du Lutrin deux chants nouveaux qui en font la conclufion. Ils ne font pas, à monavis, plus mauvais que les quatre autres chants, & je me perfuade qu'ils confoleront aifément les Lecteurs de quelques vers que j'ay retranchez à l'Episode de l'Horlogere, qui m'avoit toûjours paru un peu trop long. Il feroit inutile maintenant de nier que ce Poëme a efté composé à l'occasion d'un dif

ferend

ferend affez leger qui s'émût dans une des plus celebres Eglifes de Paris, entre le Treforier & le Chantre. Mais c'eft tout ce qu'il ya de vray. Le refte, depuis le commencement jufqu'à la fin, eft une pure fiction: & tous les Perfonnages y font non feulement inventez; mais j'ay eu foin mefme de les faire d'un caractere directement oppofé au caractere de ceux qui defervent cette Eglife, dont la plufpart, & principalement les Chanoines, font tous gens non feulement d'une fort grande probité, mais de beaucoup d'efprit, & entre lefquels il y en a tel à qui je demanderois auffi volontiers fon fentiment fur mes ouvrages, qu'à beaucoup de Mesfieurs de l'Academie. Il ne faut donc pas s'étonner fi perfonne n'a efté offenfó de l'impreffion de ce Poëme, puifqu'il n'y a en effet perfonne qui y foit veritablement attaqué. Un Prodigue ne s'avife guere de s'offenfer de voir rire d'un Avare, ni un Devot de voir tourner en ridicule un Libertin. Je ne diray point comment je fus engagé à travailler à cette bagatelle fur une efpece de défi qui me fut fait en riant par feu Monfieur le premier President de Lamoignon, qui eft celui que j'y peins fous le nom d'Arifte. Ce détail, à mon avis, n'eft pas fort neceffaire. Mais je croirois me faire un trop grand tort, fi je laif

ge,

laiffois échaper cette occafion d'apprendre à ceux qui l'ignorent, que ce grand Perfonnadurant favie, m'a honoré de fon amitié. Je commençay à le connoître dans le temps. que mes Satires faifoient le plus de bruit; & l'accez obligeant qu'il me donna dans son illuftre Maison, fit avantageufement mon apologie contre ceux qui vouloient m'accufer alors de libertinage & de mauvaifes mœurs. C'eftoit un homme d'un fçavoir étonnant, & paffionné admirateur de tous les bons livres de l'Antiquité; & c'eft ce qui lui fit plus aifément fouffrir mes ouvrages, où il creût entrevoir quelque gouft des Anciens. Comme fa pieté eftoit fincere, elle eftoit auffi fort gaye, & n'avoit rien d'embarraffant. Il ne s'effraya point du nom de Satires que portoient ces ouvrages, où il ne vid en effet que des vers & des Auteurs attaquez. Il me loüa mefme plufieurs fois d'avoir purgé, pour ainfi dire, ce genre de poëfie de la faleté qui lui avoit efté jufqu'alors comme affectée. J'eus donc le bonheur de ne lui eftre pas desagreable. Il m'appella à tous fes plaifirs & à tous fes divertiffemens, c'eft à dire, à fes lectures & à fes promenades. Il me favorifa mesme quelquefois de fa plus étroite confidence, & me fit voir à fond fon ame entiere. Et que n'y vis-je point? Quel trefor furprenant de

pro

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