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prier avec l'enfant, avec le vieillard, avec la femme, avec ce qui est faible. Mais M. Laurentie les plaint plus encore qu'il ne les blâme, et leur démontre, à ces orgueilleux de la science, que par la prière l'esprit s'élève à ce qu'il y a de plus haut et de plus grand dans les choses qui sont l'objet naturel de la méditation philosophique. Il y a des pages profondes dans ce petit volume; il y en a de touchantes,-et nous le citerons dans l'article que nous annonçons en terminant nos commentaires sur le christianisme, ne serait-ce qu'à cause du chapitrex, qui traite du surnaturel. M. Laurentie est philosophe lui aussi, mais un philosophe chrétien, humiliant sa philosophie devant la foi.

Quels romans emporterons-nous à la compagne? nous demandent quelques-uns de nos lecteurs. D'abord, avant de partir, qu'ils aillent au Gymnase voir les Oiseaux en cage, vaudeville de M. Em. de Najac, qui nous révèle pourquoi quelques jeunes gens préfèrent même en été la ville aux champs. Ce vaudeville est déjà un joli roman spirituellement dialogué, semé de mots très-fins, de ceux qui font sourire parce qu'ils ne blessent pas trop. On en ferait un très-agréable volume, comme du Chevalier du silence, roman de M. Alex. de Lavergne, on ferait un trèsagréable vaudeville. Allez voir l'un et lisez l'autre, vous comprendrez notre rapprochement; mais si vous portez l'épaulette, vous êtes prévenu que l'auteur dramatique et le romancier mettent en scène deux vieux militaires dont ils nous font des grognards très-peu indulgents pour les jeunes amoureux, officiers ou non.

Ce n'est pas seulement en Angleterre que les femmes disputent aux hommes le sceptre du roman. Nous avons aussi nos miss Martineau et nos miss Evans, nos romancières philosophes mais il nous est permis de leur préférer nos miss Muloch, et dans le roman comme en politique, une reine est bienvenue à régner sur les cœurs par la grace, et par tous ces sentiments que les femmes masculines sacrifient trop souvent à la peur de laisser tomber le sceptre du roman en quenouille. Par la grâce et par la finesse, et par les qualités les plus sympathiques que n'excluent pas la force et la passion, pour nous la reine du roman est Mme Charles Reybaud. Enumérer tous ses titres légitimes serait inutile quand nous avons sous les yeux la réimpression du plus varié de ses ouvrages, Valdepeyras, qui est son Décaméron, un chapelet de contes charmants réunis par un fil léger de mise en scène. Ce volume contient une Famille de parias, Salvador, les Epaves, la Fada, Doña Luisa, les Amours d'un voleur. Nous avons relu tous ces récits avec un plaisir

nouveau et nous les relirons encore. Heureux ceux à qui nous révélerions ce talent si pur! Mais ils seraient le petit nombre des élus, car Mme Charles Reybaud est à l'apogée d'une juste popularité.

A quoi bon décorer et consolider nos temples, nos palais, nos maisons, si le sol tremble sous nos pas, si, sous prétexte de faire rentrer chaque peuple dans ses frontières naturelles (bassin ou montagne), le cosmopolitisme fractionne et morcelle tous les Etats existants, la France non exceptée ! Ce paradoxe a été soutenu par M. Odysse Barot dans une suite d'articles de la Presse qui forment aujourd'hui un volume intitulé la Philosophie de l'histoire. M. O. Barot est à la fois un poëte et un philosophe, ses idées sont neuves, même celles qui semblent le ramener à un passé pour jamais détruit, et encore plus neuves celles qui nous prédisent un avenir au moins problématique. M. O. Barot fait une guerre très-piquante à ce qu'il appelle nos préjugés en histoire. Il nous pardonnera de lui préférer la Seconde vie de X.-B. Saintine, ne serait-ce que parce que celui-ci, poëte et philosophe aussi, homme d'imagination et de science, a la bonne foi de donner à son livre le second titre de Rêveries. Charmant rêveur que Saintine en prose et en vers; charmant conteur qui a le secret de tous les styles, ce qui fait rechercher ses livres par les lecteurs de tous les âges.

La saison des théâtres est terminée pour les Parisiens; il faut un tempérament d'étranger pour affronter la chaleur de nos salles de spectacle, mais tout Paris trouve encore moyen de se réunir en plein air autour de son gaz bien-aimé. Les concerts des Champs-Elysées sont particulièrement favorisés du public, et le bon ton et l'élégance de ces réunions, où se rencontrent chaque soir toutes les notabilités parisiennes, non moins que le bon goût qui préside à la rédaction du programme, assurent pour toute la belle saison à ces concerts un grand et légitime succès. C'est à un excellent musicien que M. Ch. de Besselièvre a confié cette année la direction de l'orchestre. M. Eugène Prévost a remporté le premier prix de Rome vers 1833. Le succès qui accueillit ses premières productions et notamment son opéra-comique en trois actes de Cosimo, ne put le retenir dans notre hémisphère, et il alla passer vingt-cinq ans à la Nouvelle-Orléans, où il monta près de quatre cents ouvrages. L'Illustre Gaspard, à l'Opéra-Comique, signala son retour en France, et, après avoir dirigé cet hiver les musiciens des Bouffes, il vient d'être mis à la tête de l'orchestre des Champs-Elysées.

La verdure transparente des arbres à laquelle la lumière du gaz prête un éclat fantastique, ces harmonies qui traversent l'air, ces gracieuses apparitions de soie et de dentelle dont on est entouré, vous transportent loin de Paris, dans le pays des rêves, et l'on a fait en réalité, sans que l'on s'en doute, une excursion dans le paradis du fumeur d'opium! Z.

Il est malheureusement vrai qué l'éditeur et l'auteur ne sont pas toujours ce qu'ils devraient être l'un pour l'autre. Tantôt l'amourpropre, tantôt l'intérêt les divisent, ils sont trop portés à s'attribuer exclusivement le succès d'un livre, ils se reprochent trop souvent de s'exploiter réciproquement; la vanité de l'auteur le fait volontiers se comparer au chevalier et comparer l'éditeur à l'écuyer, quelquefois même ce sont les deux montures de don Quichotte et de Sancho qui servent de termes à la comparaison; il est inutile de remarquer que l'au teur ne s'assimile jamais à l'àne, quoiqu'il accuse peut-être aussi l'éditeur de vouloir s'emparer de toute l'avoine. Généralement, c'est l'auteur qui est l'ingrat des deux, car, généralement, sans l'éditeur il pourrait bien avoir plus de gloire que de foin dans son råtelier... je veux dire dans ses bottes. Pour moi, j'ai presque toujours été forcé (quand un éditeur et un auteur m'ont pris pour arbitre) de donner tort à l'auteur, quoique je ne nie pas qu'il y ait des éditeurs fort injustes, fort avides, et refusant d'escompter aux auteurs leur succès futur; mais j'ai connu plus souvent des éditeurs trop confiants, trop généreux, amoureux d'une célébrité à laquelle ils avaient contribué pour une bonne part, prenant au sérieux leurs propres réclames et payant comptant le titre d'un livre qui n'exista jamais. S'il fut un éditeur-libraire dévoué à son auteur, c'est certainement celui à qui la plus exacte vérité (je m'en fais garant) a dicté la réclamation suivante, qu'à l'invitation d'un ami commun je me fais un devoir de publier. M. E. Werdet a poussé bien loin l'abnégation, car c'est un homme d'esprit qui a prouvé qu'il pouvait faire lui-même un livre, et que l'auteur de la Comédie humaine daigna renouveler ses serments, M. E. Werdet oublia ses propres talents pour se consacrer à la renommée et à la fortune de celui qui avait juré de n'avoir jamais d'autre éditeur que lui :

tant

A Monsieur B. Jouvin, rédacteur en chef du FIGARO.

« Monsieur le Rédacteur en chef,

« Dans les Echos de Paris de votre journal, du 13 de ce mois, je découvre, pauvre éditeur, jadis assez connu, aujourd'hui trop oublié,

mon nom cité par un de vos collaborateurs, M. Jules Claretie, parmi ceux de certains personnages qui, jaloux de se faire mousser à tout prix, ont l'habitude de crier par-dessus les toits : J'ai été l'intime ami de telles ou telles célébrités contemporaines défuntes.

« Je n'eus jamais, grâce à Dieu, une aussi outrecuidante prétention, et nul n'a moins mérité que moi d'être mêlé à cette tourbe d'intrus que vous avez cent fois raison de fustiger impitoyablement.

«Je n'ai pas seulement dit à qui a voulu l'entendre: « J'ai trop « vécu pour mon malheur, dans la plus grande intimité avec l'auteur « des Ressources de Quinola. » J'ai fait mieux, je l'ai surabondamment démontré, pièces en mains, à quiconque s'est donné la peine de lire mon livre intitulé: Portrait intime de H. de Balzac, sa vie, son humeur et son caractère, par son ancien libraire-éditeur, volume in-12, chez E. Dentu; Paris, 1839.

« Qu'est-ce que l'intimité, après tout? N'est-ce pas un échange de bons procédés réciproques?

« Tant que la caisse de l'éditeur malheureux fut à la disposition de son auteur préféré, tout marcha à merveille dans cette vie à deux.

« Scarron avait pour libraire T. Quinet, son Werdet à lui. Quand il n'avait plus le sou, ce qui lui arrivait souvent, il disait : Je vais frapper à la porte de mon marquisat de Quinet.

« Or, Quinet avait pour emblème une fontaine, et pour devise ces mots : «Heureux qui naît ainsi, la bouche ouverte, sous le robinet de <<ma fontaine. »

« Pour Balzac, ma fontaine fut longtemps intarissable.

« Tant qu'il y put puiser, je fus son meilleur ami.

«Tout cessa dès qu'il m'eut mis à sec.

« Et il ne me serait pas permis, pour essayer de me consoler un peu, de parler du grand écrivain dont la réputation m'a coûté mon repos, le fruit de mon travail, ma santé, mes yeux, mon présent et mon avenir?

« Ce serait par trop fort, en vérité !

« Pardon, monsieur le Rédacteur en chef, de vous avoir enlevé un instant à vos nombreuses occupations, et je vous prie de vouloir bien agréer l'expression de mes sentiments les plus distingués.

« E. WERDET,

« Ancien éditeur de M. de Balzac,

« 36, Chaussée du Maine, à Montrouge-Paris. >>

Le Directeur, Rédacteur en chef: AMÉDÉE PICHOT.

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Histoire et philosophie religieuses. Le christianisme primitif, ses origines et
ses développements....

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Histoire naturelle. Les Anglais à la campagne..

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- Archéologie. Rome au moyen âge....

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Voyages.- Scènes de la nature.- La péninsule du Labrador, par M. H. Y. Hind. 57

Voyages. Commerce. · Agriculture, etc.- La Chine, ses ressources agri-
coles, industrielles et commerciales (seconde et dernière partie)..
Economie sociale.
La misère en Angleterre..

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Post-scriptum de mai. M. Gladstone et le suffrage universel. Les fêtes de
la saison. Admiration pacifique de la guerre. - L'éducation en Angle-
terre. - Lectures dans l'Inde. La belle jeunesse d'Angleterre. - Bruit et
musique. Fresques. Théâtres. Hamlet Fechter. Sothern Garrick.
Le nouveau roman de Ch. Dickens. Autres romans. Le forgeron po-
lyglotte. Le prince de Galles à Cambridge...

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Chronique et bulletin bibliographique. - Le banquet manqué. Le Shakspeare
de Victor Hugo. Métaphores odorantes.

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Shakspeare à l'Hippodrome. Les rivalités équestres de la France et de l'An-
gleterre. OEdipe au salon. OEdipe dans l'atelier de M. Ingres. — L'Age
d'or. Le Harem. M. E. Vitet. Etudes sur l'art.
chrétiennes. Les maisons peintes.

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