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sollicite. Vous ne sauriez croire, monsieur, le plaisir

que...

HARPAGON. Je m'en vais. Voilà qu'on m'appelle. Jusqu'à tantôt.

FROSINE, se le. Que la fièvre te serre, chien de vilain à tous les diables! Le ladre a été ferme à toutes mes attaques; mais il ne me faut point pourtant quitter la négociation; et j'ai l'autre côté, en tout cas, d'où je suis assurée de tirer bonne récompense.

ACT III.

ARGUMENT.

Harpagon is about to entertain at supper Anselme and Mariane; he makes all his preparations, and gives out his orders. Dame Claude is directed to dust thoroughly everywhere, yet without rubbing the furniture too much, and she 1s, moreover, appointed to the government of the bottles. Brindavoine and La Merluche shall rince the glasses, and hand round the wine discreetly, taking care not to urge the guests to drink (Scenes I. and II.). Elise must "look after all that is cleared off the table," and, together with Cléante, greet in the heartiest manner their future step-mother (Scenes III. and IV.). As for Maître Jacques, he is both cook and coachman; in the former capacity he engages to turn out a handsome supper, provided he is supplied with plenty of money; but Valère proves to him that the part of a clever man is, on the contrary, to give good cheer at as cheap a rate as possible; and Mr. Steward undertakes to regulate the whole business himself, according to sound hygienic principles, and with due regard to wise economy. As a coachman, Maître Jacques declares that it is quite out of the question for him to use the horses; the poor creatures are made to keep such austere fasts that they cannot walk: "they are nothing but phantoms, ideas, and mere shadows of horses." By degrees, the poor servant who, in spite of himself, is fond of his master, is led by a feeling of indignation to reveal the whole truth; everywhere Harpagon is laughed at; he is the joke of the whole neighbourhood, and no one ever mentions him but under the names of miser, stingy, mean, niggardly fellow." A beating is all that La Flèche

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gets as the reward for his honesty (Scene V.). He wishes to vent his wrath on the steward whom he believes to be nothing but coward; his boldness, however, stands him in no better stead than his sincerity; thrashed by Valère, he swears to be revenged (Scene VI.). Meanwhile Frosine introduces Mariane; the poor young girl who has already received numerous visits from Cléante, and is more than half inclined to love him, does not see without dismay the grotesque figure of the old miser, and finds no solace either in the strange comfort administered by Frosine, or in Harpagon's rediculous compliments (Scenes VII. to IX.). Great is her surprise when she recognises in her future step-son the young man who has contrived to touch her heart; in the very presence of Harpagon, who is easily duped, she exchanges with him professions of love and of fidelity, scarcely disguised (Scenes X. and XI.). Cléante offers her, in his father's name, and at his expense an elegant collation; and taking from the old man's finger a diamond ring, he entreats Mariane to keep it; it is a present made by Harpagon, and the exasperated fesse-mathieu does not protest (Scene XII.); he is thus compelled to be generous in spite of himself.

Scène Première.

HARPAGON, CLEANTE, ÉLISE, VALÈRE, DAME CLAUDE, MAÎTRE JACQUES, LA MERLUCHE, BRINDAVOINE.

HARPAGON. Allons. Venez çà tous, que je vous distribue mes ordres pour tantôt, et règle à chacun son emploi. Approchez, dame Claude. Commençons par vous. (Elle tient un balai.) Bon, vous voilà les armes à la main. Je vous commets au soin de nettoyer par- s tout; et surtout, prenez garde de ne point frotter les meubles trop fort, de peur de les user. Outre cela, je vous constitue, pendant le souper, au gouvernement des bouteilles; et s'il s'en écarte quelqu'une, et qu'il se casse quelque chose, je m'en prendrai à vous, et le 10 rabattrai sur vos gages.

MAÎTRE JACQUES, à part. Châtiment politique.
HARPAGON, à dame Claude. Allez.

Scène II.

HARPAGON, CLÉANTE, ÉLISE, VALÈRE, MAÎTRE JACQUES, BRINDAVOINE, LA MERLUCHE.

HARPAGON. Vous, Brindavoine, et vous, La Merluche, je vous établis dans la charge de rincer les verres et de donner à boire; mais seulement lorsque l'on aura soif, et non pas selon la coutume de certains impertinents de laquais qui viennent provoquer les gens, et les faire aviser de boire, lorsqu'on n'y songe pas. Attendez qu'on vous en demande plus d'une fois, et vous ressouvenez de porter toujours beaucoup d'eau.

MAÎTRE JACQUES, à part. Oui; le vin pur monte à la 10 tête.

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LA MERLUCHE. Quitterons-nous nos souquenilles, monsieur?

HARPAGON. Oui, quand vous verrez venir les personnes; et gardez bien de gâter vos habits.

BRINDAVOINE. Vous savez bien, monsieur, qu'un des devants de mon pourpoint est couvert d'une grande tache de l'huile de la lampe.

LA MERLUCHE. Et moi, monsieur, que j'ai mon haut-de-chausses tout troué par derrière, et qu'on me voit, révérence parler...

HARPAGON, à La Merluche. Paix ! Rangez cela adroitement du côté de la muraille, et présentez toujours le devant au monde. (Harpagon met son chapeau au-devant de son pourpoint pour montrer à Brindavoine comment il doit faire pour cacher la tache d'huile.) Et vous, tenez toujours votre chapeau ainsi, lorsque vous servirez.

Scène III.

HARPAGON, CLÉANTE, ÉLISE, VALÈRE, MAÎTRE JACQUES.

HARPAGON. Pour vous, ma fille, vous aurez l'œil sur ce que l'on desservira, et prendrez garde qu'il ne s'en fasse aucun dégât. Cela sied bien aux filles. Mais cependant préparez-vous à bien recevoir ma maîtresse

qui vous doit venir visiter, et vous mener avec elle à la foire. Entendez-vous ce que je vous dis?

ÉLISE. Oui, mon père.

Scène IV.

HARPAGON, CLÉANTE, VALÈRE, MAÎTRE JACQUES.

HARPAGON. Et vous, mon fils le damoiseau, à qui j'ai la bonté de pardonner l'histoire de tantôt, ne vous 5 allez pas aviser non plus de lui faire mauvais visage. CLEANTE. Moi, mon père? mauvais visage! Et par quelle raison?

HARPAGON. Mon Dieu, nous savons le train des enfants dont les pères se remarient, et de quel œil ils 10 ont coutume de regarder ce qu'on appelle belle-mère. Mais si vous souhaitez que je perde le souvenir de votre dernière fredaine, je vous recommande, surtout, de régaler d'un bon visage cette personne-là, et de lui faire enfin tout le meilleur accueil qu'il vous sera 15 possible.

CLEANTE. A Vous dire le vrai, mon père, je ne puis promettre d'être bien aise qu'elle devienne ma bellemère. Je mentirais, si je vous le disais; mais, pour ce qui est de la bien recevoir, et de lui faire bon visage, je 20 vous promets de vous obéir ponctuellement sur ce chapitre.

HARPAGON. Prenez-y garde au moins.

CLEANTE. Vous verrez que vous n'aurez pas sujet de vous en plaindre.

HARPAGON. Vous ferez sagement.

Scène V.

HARPAGON, VALÈRE, MAÎTRE JACQUES.

HARPAGON. Valère, aide-moi à ceci. Oh! çà, maître Jacques, approchez-vous; je vous ai gardé pour le dernier.

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MAÎTRE JACQUES. Est-ce à votre cocher, monsieur, ou 30 bien à votre cuisinier, que vous voulez parler? car je suis l'un et l'autre.

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MAÎTRE JACQUES. Mais à qui des deux le premier ?
HARPAGON. Au cuisinier.

MAÎTRE JACQUES. Attendez donc, s'il vous plaît.

(Maitre Jacques ôte sa casaque de cocher, et paraît vêtu en cuisinier.)

HARPAGON. Quelle diantre de cérémonie est-ce là?
MAÎTRE JACQUES. Vous n'avez qu'à parler.

HARPAGON. Je me suis engagé, maître Jacques, à donner ce soir à souper.

MAÎTRE JACQUES, à part. Grande merveille!

HARPAGON. Dis-moi un peu, nous feras-tu bonne chère.

MAÎTRE JACQUES. Oui, si vous me donnez bien de l'argent.

HARPAGON. Que diable! toujours de l'argent ! Il 15 semble qu'ils n'aient autre chose à dire, de l'argent, de l'argent! Ah! ils n'ont que ce mot à la bouche, de l'argent! toujours parler d'argent ! Voilà leur épée de chevet, de l'argent !

VALERE. Je n'ai jamais vu de réponse plus imper20 tinente que celle-là. Voilà une belle merveille que de faire bonne chère avec bien de l'argent! C'est une chose la plus aisée du monde, et il n'y a si pauvre esprit qui n'en fît bien autant; mais, pour agir en habile homme, il faut parler de faire bonne chère avec peu d'argent. MAÎTRE JACQUES. Bonne chère avec peu d'argent? VALERE. Oui.

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MAÎTRE JACQUES, à Valère. Par ma foi, monsieur l'intendant, vous nous obligerez de nous faire voir ce secret, et de prendre mon office de cuisinier; aussi bien 30 vous mêlez-vous céans d'être le factoton.

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HARPAGON. Taisez-vous. Qu'est-ce qu'il nous faudra ? MAÎTRE JACQUES. Voilà monsieur votre intendant, qui vous fera bonne chère pour peu d'argent.

HARPAGON. Haye ! je veux que tu me répondes.
MAÎTRE JACQUES. Combien serez-vous de gens à

table ?

HARPAGON. Nous serons huit ou dix; mais il ne faut prendre que huit. Quand il y a à manger pour huit, il y en a bien pour dis

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