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Soit qu'étant le soleil dont je suis enflammé
Le plus aimable objet qui fut jamais aimé,
On ne m'ait pu nier qu'il ne fût adorable,
Soit que d'un oppressé

Le droit bien reconnu soit toujours favorable,
Les dieux m'ont exaucé.

Naguère que j'oyois la tempête souffler,
Que je voyois la vague en montagne s'enfler,
Et Neptune à mes cris faire la sourde oreille;
A peu près englouti,

Eussé-je oser prétendre à l'heureuse merveille
D'en être garanti ?

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Contre mon jugement les orages cessés
Ont des calmes si doux en leur place laissés,
Qu'aujourd'hui ma fortune a l'empire de l'onde ;
Et je vois sur le bord

Un ange dont la grace est la gloire du monde,
Qui m'assure du port.

Certes c'est lâchement qu'un tas de médisants,
Imputant à l'amour qu'il abuse nos ans,
De frivoles soupçons nos courages étonnent;
Tous ceux à qui déplaît

L'agréable tourment que ses flammes nous donnent
Ne savent ce qu'il est.

S'il a de l'amertume à son commencement, Pourvu qu'à mon exemple on souffre doucement, Et qu'aux appas du change une ame ne s'envole, On se peut assurer

Qu'il est maître équitable, et qu'enfin il console Ceux qu'il a fait pleurer.

ÉPIGRAMME

SUR UNE IMAGE DE SAINTE CATHERINE.

1619.

L'art, aussi bien que la nature,

Eût fait plaindre cette peinture;

Mais il a voulu figurer

Qu'aux tourments dont la cause est belle

La gloire d'une ame fidèle

Est de souffrir sans murmurer.

ÉPIGRAMME

IMITÉE DE LA QUARANTIÈME DU SIXIÈME LIVRE

DE MARTIAL.

1619.

Jeanne, tandis que tu fus belle,
Tu le fus sans comparaison;
Anne à cette heure est de saison,
Et ne vois rien si beau comme elle.
Je sais que les ans lui mettront
Comme à toi les rides au front,
Et feront à sa tresse blonde
Même outrage qu'à tes cheveux;
Mais voilà comme va le monde :
Je te voulus, et je la veux.

SONNET

A MADAME LA PRINCESSE DE CONTI.

1619.

Race de mille rois, adorable PRINCESSE,
Dont le puissant appui de faveurs m'a comblé,
Si faut-il qu'à la fin j'acquitte ma promesse,
Et m'allége du faix dont je suis accablé.

Telle que notre siècle aujourd'hui vous regarde,
Merveille incomparable en toute qualité,
Telle je me résous de vous bailler en garde
Aux fastes éternels de la postérité.

Je sais bien quel effort cet ouvrage demande;
Mais, si la pesanteur d'une charge si grande
Résiste à non audace et me la refroidit,

Vois-je pas vos bontés à mon aide paroître,
Et parler dans vos yeux un signe qui me dit
Que c'est assez payer que de bien reconnoître ?

STANCES

SPIRITUELLES.

1619.

Louez Dieu par toute la terre,

Non pour la crainte du tonnerre
Dont il menace les humains,

Mais pour ce que sa gloire en merveilles abonde,
Et que tant de beautés qui reluisent au monde
Sont des ouvrages de ses mains.

Sa providence libérale

Est une source générale

Toujours prête à nous arroser.

L'Aurore et l'Occident s'abreuvent en sa course; On y puise en Afrique, on y puise sous l'Ourse; Et rien ne la peut épuiser.

N'est-ce pas lui qui fait aux ondes
Germer les semences fécondes

D'un nombre infini de poissons;

Qui peuple de troupeaux les bois et les montagnes,

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