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sieur, par vos paroles, par vos écrits et par tout l'ensemble de votre conduite, un des instruments dont elle aura daigné se servir de nos jours.

Je vous en félicite bien cordialement, et vous renouvelle l'assurance des sentiments avec lesquels je suis, monsieur le comte, votre trèshumble et tout dévoué serviteur.

FERDINAND CARDinal Donnet,
Archevêque de Bordeaux.

Notre livraison du 25 juin contenait un fragment du second volume du livre aujourd'hui publié et si justement estimé de M. l'abbé Laforêt, professeur de philosophie à l'université catholique de Louvain, les Dogmes catholiques exposés.

Très-reconnaissants envers M. l'abbé Laforêt de cette communication bienveillante, nous ne pouvions nous permettre d'y faire aucune modification.

Or on nous adresse aujourd'hui, au nom du plus célèbre des auteurs dont les opinions philosophiques sont discutées dans ce fragment, une réclamation à laquelle nous nous empressons de faire droit.

M. l'abbé Laforêt, parlant de M. Cousin, s'exprime ainsi : « M. Cousin ne parle expressément, si nous ne nous trompons, du péché originel dans aucun de ses ouvrages; mais partout il parle de l'homme comme s'il était dans son état normal et primitif; il ne semble donc point reconnaître la dégradation de la nature humaine, ni par conséquent le dogme qui exprime et explique cette dégradation. »

On nous fait observer qu'il n'est pas exact que M. Cousin n'ait parlé dans aucun de ses ouvrages du péché originel. L'illustre écrivain a traité ce sujet dans plusieurs de ses écrits sans contester en aucune manière ce dogme fondamental du christianisme. On appelle en particulier notre attention sur ces fragments de la préface mise en tête de la troisième édition des Pensées de Pascal publiées par M. Cousin, et nous sommes invités à la reproduire.

Nous nous conformons avec empressement à ce désir. Le passage qui nous est indiqué nous paraît, en effet, concluant sur le point en question. Passage extrait de la Préface de la nouvelle édition, p. 33, des PENSÉES DE PASCAL, par M. V. COUSIN.

«Disons-le donc sans hésiter: le jansénisme est un christianisme immodéré et intempérant. Par toutes ses racines, il tient sans doute à l'Église catholique; mais par plus d'un endroit, sans le vouloir ni le savoir même, il incline au calvinisme. Il se fonde particulièrement sur deux dogmes, déjà bien graves en eux-mêmes, qu'il exagère et qu'il fausse : je veux parler des dogmes du péché originel et de la grâce. En touchant à cette matière épineuse, je m'efforcerai d'être aussi court que le soin de la clarté le permettra.

« Le dogme de la grâce se rapporte à celui du péché originel. C'est parce que la nature humaine a subi dans son premier représentant une corruption plus ou moins profonde, qu'elle a besoin d'une réparation, et d'une répara

:

tion proportionnée à sa corruption à ce vice de la nature, le remède nécessaire est la grâce surnaturelle de Jésus-Christ. Ces deux dogmes étant étroitement liés, l'un des deux ne peut être altéré sans que l'autre le soit également et dans la même mesure. Supposez que dans le berceau du monde la corruption de la nature ait été peu de chose, l'intervention de la grâce sera presque superflue. Supposez, au contraire, que la corruption ait été entière, que les deux parties essentielles de la nature humaine, la raison et la volonté, soient radicalement viciées et absolument incapables, celle-ci d'apercevoir le bien, et celle-là de l'accomplir, il faut de toute nécessité que la grâce intervienne d'autant plus énergiquement, puisqu'il s'agit, non plus de secourir et de fortifier l'homme, mais en réalité de créer un homme nouveau, en substituant à la raison une lumière surnaturelle et à la volonté une force étrangère. L'Église catholique, gardienne et interprète de la foi chrétienne, s'est constamment placée entre ces deux extrémités. L'Église a décidé que, par le péché originel, la nature humaine est réellement déchue; qu'ainsi la raison et la volonté ont perdu le pouvoir qu'elles avaient originairement reçu, ce pouvoir incomparable qui faisait d'Adam une créature presque angélique, apercevant toutes les vérités à leur source même et accomplissant le bien librement, mais sans grand effort. L'Église a décidé, en même temps, que par le péché originel la nature n'était pas à ce point déchue, que la raison fût devenue absolument incapable du vrai et la volonté du bien, du moins. dans l'ordre des vérités et des vertus naturelles. L'Église prévenait ainsi les deux erreurs contraires dans la matière de la grâce. Et là encore elle a porté ces deux décisions, conformes aux deux premières : 1° que la grâce est nécessaire pour révéler à l'homme les vérités et les vertus de l'ordre surnaturel, sans lesquelles il n'y a point de salut; 2° que la grâce vient au secours de la nature sans la détruire; qu'elle n'éteint pas la lumière naturelle, mais l'éclaire et l'agrandit, et que la liberté subsiste entière, avec les œuvres qui lui sont propres, sous les impressions de la grâce1.

« Sur tous ces points, Port-Royal a excédé la doctrine catholique. En outrant la puissance du péché originel, il s'est condamné lui-même à outrer celle de la grâce réparatrice.

«Le génie du jansénisme est le sentiment dominant, non pas seulement de la faiblesse, mais du néant de la nature humaine. A ses yeux, depuis la chute d'Adam, la raison et la volonté sont par elles-mêmes radicalement impuissantes pour le vrai et pour le bien. L'homme ne possède d'autre grandeur, et il ne garde d'autre ressource que le sentiment même de son impuissance et celui de la nécessité d'un secours surnaturel. Ce secours surnaturel, c'est la grâce, et non pas cette grâce universelle qui a été donnée à tous les hommes, et qui si souvent est convaincue d'insuffisance, mais cette gràce particulière et choisie qui, pour être vraiment suffisante, doit être efficace par elle-même, c'est-à-dire irrésistible. Elle opère en nous en étouffant la lumière naturelle sous la lumière incréée, et en mettant ses impressions victorieuses à la place des langueurs de notre volonté. C'est elle qui nous fait penser et agir, ou

Pour toute citation, nous nous bornons à renvoyer au concile de Trente et aux institutions et bulles papales qui ont condamné le livre de Jansenius.

Voyez les premières Provinciales.

plutôt c'est elle qui pense et agit en nous : elle suscite la pensée de l'action, elle communique la force qui l'exécute, et nos œuvres sont ses œuvres.

<< Tel est le système janseniste, mêlé de vérité et d'erreur. Par son côté vrai, c'est la doctrine catholique qui n'est point ici en cause; par son côté faux, ce n'est qu'une théorie particulière qui tombe sous notre examen. Port-Royal est un grand parti dans l'Église; mais, après tout, ce n'est qu'un parti, ce n'est point l'Église elle-même, car l'Église l'a condamné.

« Ce qu'il y a d'essentiellement faux dans la gràce janseniste, c'est qu'elle ôte toute vertu à la lumière naturelle, comme toute efficacité à la volonté. La grâce chrétienne ajoute ses lumières et ses impressions vivifiantes à la raison et à la liberté humaine; elle les épure et les fortifie; elle ne les efface point; loin de les nier, elle les suppose; elle ne crée pas, elle féconde; elle ne s'applique pas au néant, mais à un germe divin qu'elle dégage et qu'elle déve loppe. Sa vertu singulière est de produire une foi que la lumière naturelle ne produit point, la foi aux vérités surnaturelles. Mais ce n'est point elle seule qui enseigne à l'homme la liberté, le devoir, la distinction du bien et du mal, du juste et de l'injuste; la spiritualité de l'âme, la divine providence : sans la grâce, la lumière naturelle peut enseigner tout cela, et elle l'a enseigné dans tous les siècles. Selon l'Église, la lumière naturelle est une première révélation qui a déjà sa puissance. Pour le jánsénisme, cette première révélation deineure absolument stérile sans le secours d'une révélation nouvelle et particulière.

« Comme, dans la doctrine catholique, toutes les vérités se tiennent; de même toutes les erreurs ont leur enchaînement dans la théorie janséniste. La grâce y doit être victorieuse et invincible, parce que la corruption de la nature humaine y est entière, parce qu'un tel mal exige un remède héroïque, et que du néant de la nature Dieu seul peut tirer la vérité, la vraie justice et la vraie vertu. »

ERRATA

Dans le dernier article de M. de Corcelle sur le gouvernement pontifical, à la page 735, ligne 12 du dernier numéro, il faut lire: dans les deux dépar tements qu'administrait M. de Tournon, au lieu de ces mots : dans les États pontificaux. Il résulte de cette erreur une proportion inexacte du nombre des ecclésiastiques et religieux réguliers relativement à la population.

Dans le travail de M. Albert de Broglie, sur M. Jules Simon, page 878, avant-dernière ligne, par le changement du pronom il en je d'abord, puis en se, on attribue à l'auteur de l'article une opinion qu'il reproche lui-même à l'auteur du livre. Voici comment il faut restituer toute la phrase:

«Il (M. Simon) repousse, sans presque la discuter, l'hypothèse la plus plausible qu'on ait présentée pour la simplifier, celle d'un désordre survenu dans la création par la rébellion d'une volonté libre. Il trouve ce système de la chute, comme il l'appelle, dénué de tout fondement philosophique.

L'UN DES GÉRANTS, CHARLES DOUNIOL.

FIN DU XXVIII VOLUME.

DU TOME DEUXIÈME DE LA NOUVELLE SÉRIE

(TRENTE-HUITIÈME DE LA COLLECTION).

Études contemporaines.

AVRIL 1856.

Le parti catholique: ce qu'il a été, ce qu'il est

devenu, par le comte DE FALLOUX.

La poésie et l'industrie, par M. VICTOR DE LAPRADE..

Étude philosophique.-Le P. Ventura, par M. V. DE CHALAMBERT (1 article).
La Paix, par le marquis de GoNTAUT-AINT-BLANCARD.
La Rédemption. Dialogue, par M. L. MOREAU.

Études morales sur le temps présent, de M. CARO, par M. FOUCHER DE CAREIL.
La paix et la pairie à vie en Angleterre, par le comte DE MONTALEMBERT.
Académie française. Réception de M. le duc de Broglie, par M. A DE PONT-

MARTIN.

Revue politique, par M. BETTENCOURT.

BULLETIN LITTÉRAIRE :

5

34

53

72

89

100

108

125 139

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Histoire du diocèse de Bayeux de M. Laffetay, par M. Mercier de La-
combe. . .

Instructions pastorales de S. E. le cardinal archevêque de Bordeaux, par
M. P. Douhaire..

MAI.

Conférences de Toulouse (deuxième conférence), par le P. LACORDAIRE.
Le parti catholique : ce qu'il a été, ce qu'il est devenu (suite et fin), par
le comte DE FALLOUX.

De l'art chrétien de M. Rio, par M. CH. LENORMANT.

Le comte Molé, par M. le baron DE BARANTE, de l'Académie française.
De l'éducation populaire en Angleterre, par M. LORAIN...

Les chrétiens d'Orient et les réformes du sultan, par J. DE BERTOU..
Les contemplations de M. Victor Hugo, par M. A. DE PONTMARTIN.
Revue politique

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154

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Lettre à M. l'archevêque de Paris sur les derniers instants de M. Augustin Thierry, par le P. GRATRY.

351

Les Ouvriers européens, par M. AUG. COCHIN.,

355

Le dogme catholique du péché originel, par M. P. LAFORÊT.

380

Le Concours agricole universel de 1856, par le marquis DE DAMPIERRE.
Le P. Ventura (2 et dernier article), par M. V. DE CHALAMBERT.

405

420

Histoire du Consulat et de l'Empire de M. Thiers. Livre XLI: Le concile de 1811, par M. TH. FOISSET.

438

Revue littéraire. La tragédie et madame Ristori. La comédie et

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JUIN.

Pie IX et lord Palmerston, par le comte DE Montalembert..

M. Ponsard, par M. A. DE PONTMARTIN. BIBLIOGRAPRIE FRANÇAISE ET ALLEMANDE.

Description de l'île de Patmos et de l'île de Samos, par M. Guérin. . 486
Lettres spirituelles de Bossuet. - Doctrine spirituelle de Bossuet.
Publications périodiques en Allemagne : Historische politische Blætter
für das katholische Deutschland..

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L'Église et l'empire romain au quatrième siècle, par M. Albert de Bro-
glie. 1 partie. Règne de Constantin.

499

Le livre de l'Internelle consolation, par M. L. Moland et Ch. d'Héricault. 500

Revue politique.....

501

JUILLET.

Conférences de Toulouse (troisième conférence), par le P. LACORDAIRE..
Les Ouvriers européens (suite et fin), par AUG. COCHIN.
Mémoires de madame de la Guette, par LÉON ARBAUD..

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AVIS.

Désormais le Correspondant formera, par année, quatre volumes
au lieu de deux chaque volume sera composé de trois livraison,
avec table analytique et alphabétique des matières.

On enverra aux abonnés la table des deux premiers volumes de la
nouvelle série avec la première livraison du troisième volume.

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