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époque, parce que, dans sa modestie, il prétend avoir hérité du style de Labruyère, a fouetté impitoyablement le nouveau livre de M. Sue, dans lequel le peu de bon qui s'y trouve est étouffé par les invraisemblances et les monstruosités de Plik et Plok et de la Vigie de Koat-Ven. Quant à Aymar, vous y trouverez du style, de la forme, mais d'invention point.

Grand émoi au noble faubourg. Les doctrines anti-matrimoniales de Georges Sand ont enflammé l'imagination aristocratique de quelques belles marquises, qui ont bravement planté là Messieurs leurs époux. Tout s'est passé cependant sans mort d'hommes; tandis que dans les emportemens des épouses criminelles dont l'Académie des sciences a été entretenue dans sa dernière séance, l'assassinat s'y mêle aux caresses conjugales. M. Walkenaer vient de découvrir, pour le bonheur de l'humanité et l'édification des personnes qui se destinent aux joies du mariage, que dans la famille des aranéides la femelle, beaucoup plus vigoureuse que le mâle, est dans la douce habitude de dévorer son amant après après avoir reçu les témoignages de son amour. Il arrive que le galant, fort épris de sa maîtresse, ne s'en approche cependant qu'avec crainte et tremblement, et fuit au plus vite après lui avoir rendu ses civilités, et que celle-ci, poussée par ses penchans peu délicats, épie l'instant où son époux opère sa retraite pour le saisir et le croquer. Voilà la nouvelle scientifique la plus importante du mois.

- A l'Académie française, pas étincelle de vie. Il est bien juste que cette respectable matrone se repose des fatigues de l'enfantement séculaire de son Dictionnaire. Quant à l'Académie des inscriptions et belles-lettres, elle dort depuis long-temps sur les in-folio des Bénédictins, qu'elle est chargée de continuer. Un de ses membres les plus éveillés, M. Paulin Paris, a mis en émoi Messieurs de la bibliothèque royale par la publication des extraits des manuscrits. On lui reproche d'avoir révélé l'existence de trésors jusqu'à ce jour restés inconnus à ceux même qui les

conservaient. C'est un méchant tour, M. Paulin Paris, et le trait est noir.

-

Le carême est arrivé. A la livraison prochaine la chronique

de ce saint temps d'abstinence.

ANATOLE PISTON.

AMOUR.

I.

Er mon ame toujours errait, vague, éperdue,
Ignorante du sort qui fixerait son vol,
Comme le frêle esquif dont la rame est perdue
Flotte au gré des autans, repoussé loin du sol.

Et j'avais sur le front une ride profonde,

J'étais triste, et toujours des pleurs mouillaient mes yeux,
Comme pour témoigner que je n'eus, en ce monde,
Dans tous mes jours passés, pas un seul jour heureux.

Et je disais « La vie est bien sombre, bien vide,

» Amour! quand ton flambeau nous cache ses clartés,

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Quand, pauvres exilés, sur cette terre aride,

>> Nous passons sans goûter tes saintes voluptés.

» Enfant déshérité de tes rians mensonges,

>>

Que t'ai-je donc fait, moi, pour n'avoir dans mon ciel

>> Point de paillettes d'or, dans mes nuits point de songes,

>> Sous mes pas point de fleurs, dans mon cœur point de miel?

Et ma plainte là-haut a su se faire entendre.......
Dieu, prenant en pitié mes larmes, mes vingt ans,
Avec des chants d'amour, près de moi fit descendre
L'ange que de mes vœux j'appelai si long-temps !

II.

Alors je suis venu baiser tes blanches ailes,
Et chercher à leur ombre un oreiller ami,
Car, avant de t'aimer, mes nuits étaient cruelles,
Jamais un rêve heureux ne m'avait endormi.

Et tu m'as accueilli tout brisé par l'orage,

Tes mains de ma blessure ont étanché le sang,

Et, me montrant les cieux, tu m'as dit : « Prends courage! >> Avec ta voix de femme, au timbre caressant.

Puis tu m'as réchauffé d'un rayon de ta flamme,
D'un bonheur inoui tu m'as jeté l'espoir,

A ton souffle embaumé s'est ouverte mon ame,
Comme les nymphéas à la brise du soir.

Et maintenant j'espère avec tes espérances,
Tes plaisirs dans les miens se reflètent toujours,
Je pense tes pensers, souffre de tes souffrances,
Je dors de ton sommeil et je vis de tes jours......

CHARLES CHANCEL.

TOME III.

12

BULLETIN

LITTÉRAIRE ET SCIENTIFIQUE.

Galerie chrétienne, ou Abrégé de l'histoire des vrais Martyrs de la vérité de l'Évangile, par J. CRESPIN, avec une introduction et des notes, par C. BONIFAs, pasteur de l'église réformée de Grenoble, et E. PETITPIERRE, ministre du Saint Évangile. Paris, Risler et Prudhomme, libr., tome I de xxvIII et 388 pag. in-8°.

Ce livre est la réimpression abrégée et rajeunie, quant au style, d'un grand ouvrage dont la première édition, que nous avons sous les yeux, parut il y a près de trois siècles. Il fut publié pour la première fois, en 1554, par Jean Crespin, imprimeur à Genève, comme il l'expose dans la préface, pour honorer la mémoire des martyrs de sa croyance, dont il a écrit l'histoire, et pour encourager et soutenir leurs partisans et leurs disciples, qui étaient alors exposés aux plus cruelles persécutions. Sous ce double point de vue, l'opportunité et l'utilité de cet ouvrage ne sauraient être

contestées.

Les nouveaux éditeurs, MM. Bonifas et Petitpierre, ont surtout pour but, en le mettant au jour, comme ils le déclarent euxmêmes, de faire connaître exactement quelles étaient les controverses qui s'agitaient au XV et au XVIe siècle entre les partisans de la réforme religieuse et ceux qui cherchaient à maintenir le statu quò, non-seulement par la discussion, ce qui eût été bien légitime, mais encore par le fer et par le feu. Il n'est pas hors de propos,

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