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pourront, avec le temps, assujétir leurs chefs à la respecter.

En attendant, nous prions Dieu de tout notre cœur pour votre pays; nous lui demandons de vous donner la patience pendant vos malheurs, et une heureuse délivrance de toutes vos afflictions.

La résolution de ne pas retourner dans votre patrie, tant qu'elle sera soumise à une puissance étrangère, est digne de vous. Le patriotisme le plus ardent ne nous oblige pas à être témoin de maux auxquels nous ne pouvons apporter de remède ni de soulagement; et, d'ailleurs, pour ce but même, votre plume est plus efficace, quoique loin, que votre présence. Une nation telle que la nation française ne peut pas rester long-temps dans un état d'oppression et d'humiliation c'est un des décrets du ciel qui ne seront point effacés. Notre plus grande crainte, c'est qu'elle ne prolonge ses souffrances par des efforts trop prématurés pour s'en délivrer, et nos vœux sont qu'elle attende avec patience jusqu'au moment où des dissensions entre ses ennemis lui permettront de choisir des amis. C'est en général un vou coupable que de souhaiter la guerre et le trouble entre les nations, mais ce souhait devient pieux lorsque c'est le seul moyen de dissoudre leurs combinaisons criminelles. Je

vous félicite de l'heureux mariage de votre fille avec un pair et un patriote de France; et si votre fils réalise le projet de visiter le sanctuaire de tous les malheureux de tous les pays, où le loup habite avec l'agneau, et où le léopard repose en paix avec le chevreau, il sera salué comme le fils de madame de Staël et le petit-fils de M. Necker; il verra dans la réunion paisible de tous les réfugiés français d'opinions différentes, un exemple du bonheur dont ils auraient joui dans leur patrie, si les principes de tolérance de son grand ancêtre avaient été suivis.

Permettez-nous de vous renouveler, etc., etc.

UN JOUR DE PAIEMENT DE RENTES

AU TRÉSOR PUBLIC.

Quand, après un long travail, vous allez vous promener aux Tuileries, sur la terrasse des Feuillants, , par un beau jour d'automne, dans ce doux état de nonchaloir, de presque absence de pensée, que l'on a comparé souvent au mouvement plein d'indolence d'un canot abandonné au flottement d'un petit lac, votre esprit fatigué qui veut du repos, comme l'œil ébloui veut de l'ombre, en a assez pour l'occuper du tourbillon de feuilles mortes qu'emporte un coup de vent,

du léger froissement des pas dans ces feuilles desséchées, du frôlement de la robe d'une jolie promeneuse, ou d'un coup d'oeil vaguę jeté sur la longue façade du ministère des finances.

Ne vous êtes-vous pas alors rappelé l'illumination magique qu'aux jours de réjouissances forme cette rangée de pots à feu, de chacun desquels s'élève un jet de gaz resplendissant, qui inonde de tant de lumière cette ligne d'arcades, qu'elle semble transparente comme un château de fée? De cette fantaisie des Mille et une Nuits passant à de plus graves méditations, à l'aspect du centre des mouvements financiers de toute la France, une image immense ne vous a-t-elle pas tout à coup apparu? Quarante mille conseils municipaux éparṣ sur notre vaste sol, pérorant, délibérant, votant, pour venir concentrer leurs opérations dans trois cent soixante-six arrondissements; les arrondissements, dans quatre-vingt-cinq préfectures; les préfectures, dans sept ministères; les ministères, dans les trois pouvoirs qui font la loi; puis la loi tombant de son haut dans cet océan de hiérarchies; et le cercle qu'a produit sa chute s'étendant, s'étendant toujours, jusqu'à ce qu'il embrasse les quarante mille communes, et, en se rétrécissant, rapporte l'argent rue de Rivoli.

Ce mouvement perpétuel du centre à la cir

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