Jamais au bout du vers on ne te voit broncher; Mais moi, qu'un vain caprice, une bizarre humeur En vain, pour la trouver, je travaille & je suë. REMARQUES Si je penfe parler d'un Galant de notre âge, Ma plume pour rimer rencontrera Ménage.. La Mais heureufement pour l'Abbé Ménage, l'Abbé de Pure fit en ce tems-là des Vers contre notre Auteur. C'étoit une Parodie de la Scène de Corneille, dans laquelle Augufte confond Cinna après la découverte de fa conjura tion; & dans cette Parodie, Mr. Colbert convainquoit Mr. Despréaux d'être l'Auteur de quelques Libelles qui pa roiffoient alors. Mr. Despréaux n'étoit pas affure que de Pure eût fait cette Parodie maligne; mais il favoit bien que cet Abbé la distribuoit. Pour toute vengeance d'une fi noi. re calomnie, notre Auteur fe contenta de mettre le nom: de l'Abbé de Pure dans cette Satire, où il le traite ironiquement de Galant, parce que cet Abbé affectoit un air de propreté & de galanterie, quoi qu'il ne fût ni propre ni galant. MICHEL DE PURE étoit de Lyon, où fon Pere avoit été Prevôt des Marchands, en 1634. & fon Aïeul, Eche vin en 1596. Il avoit publié en 1663. une fort mauvaise Traduction de Quintilien, Dans la fuite il traduifit encore ao La Raifon dit Virgile, & la Rime Quinaut. 25 Et maudiffant vingt fois le Démon qui m'inspire, Mais quand j'ai bien maudit & Muses & Phébus, REMARQUES. Ma Histoire des Indes, écrite en Latin par le P. Maffée ; & PHistoire Africaine, écrite en Italien par. 7. B. Birago. a auffi traduit la Vie de Leon X. du Latin de Paul Jove; & de plus il a fait un Roman, qui a pour titre, Les Précieufes; la Vie du Maréchal de Gaffion, &c. VERS 20. La Raifon dit Virgile, & la Rime Quinaut.] PHILIPPE QUINAUT, Auteur de plufieurs Tragédies, imprimées en deux volumes, mais qui font abfolument tombées dans l'oubli. Il a depuis compofé des Opéra. 11 fut reçû à l'Académie Françoife, en l'année 1670. & mou, rut en 1688. VERS 35. Je ferois comme un autre.] GILLES MENAP GE, dont les Poëfies font remplies d'expressions semblar bles à celles que notre Auteur reprend dans les vers fuivans: ce qui marque un génie froid & ftérile, tel qu'étoit celui de l'Abbé Ménage, qui n'avoit point de nature! à la Pofie, & qui ne faifoit des vers qu'en dépit des Mufes; com me il l'a dit lui-même, dans la Préface de fes. Obfervations fur Malherbe Ma Mufe au moins fouffroit une froide épithete: 35 Je ferois comme un autre, & fans chercher fi loin, J'aurois toûjours des mots pour les coudre au befoin.. Si je louois Philis, En miracles féconde ;, 40 45 Je trouverois bien-tôt, A nulle autre seconds. Je mettrois à l'inftant, Plus beau que le Soleil. Enfin parlant toûjours d'Astres & de Merveilles, De Chef-d'œuvres des Cieux,de Beautez fans pareilles ;; Avec tous ces beaux mots fouvent mis au hazard, Je pourrois aisément, fans génie & fans art, Et transpofant cent fois & le nom & le verbe, REMAQUES. Gilles Boileau, frere de notre Auteur, avoit déja repris l'Abbé Ménage de fon affectation à emploïer ces fortes de Phrafes Poëtiques: En charmes fi féconde, A nulle autre pareille, A nulle autre feconde: Ce chef-d'œuvre des Cieux, te miracle d'amour, &c. on peut voir l'Avis à Mr. Ménage, fur fon Eglogue intitulée Chriftine. p. 16. VERS 46. Dans mes Vers recoufus mettre en pièces Malherbe Il étoit difficile de faire un vers qui rimat avec celui-ci. Cela parut même impoffible à la Fontaine, à Moliere, & à tous les amis. que notre Poëte confulta. Cependant il trouva le vers qu'il cherchoit. [Et transpofant cent fois le nom. & le verbe.. Quand il le dit à La Fontaine : Ah! le voilà, s'écria celui-ci, en l'interrompant : Vous êtes bien-heureux.. Je donnerois le plus beau de mes Contes pour avoir trouvé cela. Mr. Despréaux faifoit ordinairement le fecond vers avant le premier. C'eft un des plus grands fecrets de la Poëfie, pour donner aux vers beaucoup de fens & de force. Il conTeilla à Mr. Racine de fuivre cette méthode; & il difoit à propos: Je lui ai apris à rimer difficilement. B. 7. VERS N'en dira jamais un, s'il ne tombe à propos, Et ne fauroit fouffrir, qu'une phrase infipide 50 Vienne à la fin d'un vers remplir la place vuide.. Ainfi recommençant un ouvrage vingt fois, Si j'écris quatre mots, j'en effacerai trois. Maudit foit le premier, dont la verve infenfée Dans les bornes d'un vers renferma sa pensée, 55. Et donnant à fes mots une étroite prison, REMARQUES. Vou VERS $3. Maudit foit le premier, dont la verve infenfée, &c.] Mr. Arnaud d'Andilly entendant réciter cette Satire, fut extrèmement touché de ces quatre vers; il en admira la beauté, & les compara à ceux-ci de B.REB.EUF, qui: font fi fameux: Pharf. L. HI. C'èft de lui que nous vient cet Art ingénieux De peindre la parole & de parler aux yeux 3: Mr. D'Andilly fe fit réciter cette Satire trois fois de fuite, VERS 57. Sans ce métier fatal au repos de ma vie, &c.] Première maniere: Sans ce métier, helas! fi contraire à ma joie, Mes jours auroient été filez d'or & de foie. L'Auteur corrigea ces deux vers, parce que Mr. D'Andilly lui fit remarquer qu'il tomboit dans le defaut qu'il attaquoit: Vous blâmez, lui dit Mr. D'Andilly, ceux qui dans leurs vers mettent en pièces Malherbe; & voilà une expreffion qui eft de ce Poëte. En effet, MALHERBE a emploïé trois foiss cette expreffion. ↓ Dans l'Ode à la Reine Marie de Medicis, 1600, LA Voulut avec la Rime enchainer la Raifon. Sans ce métier, fatal au repos de ma vie, La nuit à bien dormir, & le jour à rien faire.. : REMARQUES. Les Parques d'une même foie Ne devident pas tous nos jours. 1. Dans l'Ode au Duc de Bellegarde, 1608. Ainfi de tant d'or & de foie Ton âge devide fon cours, &c. III. Et dans un fragment au Cardinal de Richelieu:: Nos jours filez de toutes foies Ont des ennuis comme des joies, &c. Sait VERS 62. La nuit à bien dormir, & le jour à rien faire.]} Il auroit bien pû mettre la négative, en difant; La nuit a bien dormir, le jour à ne rien faire; comme LA FONTAINE l'a mis depuis dans fon Epitaphe:. Jean s'en alla, comme il étoit venu,, Tint les tréfors chofe peu néceffaire.. Deux parts en fit, dont il fouloit paffer ว Mr. |