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Vers 232.

Édition de 1756, et manuscrit :

*Lorsqu'il se vit vendu par sa donzelle;
Ces pots brillants dont Gédéon défit
De Madian la cohorte infidèle,
Le couperet de la belle Judith,
Cotte beauté si saintement perfide
Qui, pour le ciel galamment homicide,
*Son cher amant massacra dans son lit;
Plus d'abondant le sacré cimeterre
Dont le Sauveur voulut que s'armât Pierre,

Pour lui donner une oreille à guérir,

Et de son nom laisser un souvenir.

A ces objets Jeannette émerveillée,
*De cette armure... (K.)

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CHANT TROISIÈME.

ARGUMENT.

Description du palais de la Sottise. Combats vers Orléans. Agnès se revêt de l'armure de Jeanne pour aller trouver son amant : elle est prise par les Anglais, et sa pudeur souffre beaucoup.

Ce n'est le tout d'avoir un grand courage,
Un coup d'œil ferme au milieu des combats,
D'être tranquille à l'aspect du carnage,
Et de conduire un monde de soldats;
Car tout cela se voit en tous climats,
Et tour à tour ils ont cet avantage.
Qui me dira si nos ardents Français
Dans ce grand art, l'art affreux de la guerre,
Sont plus savants que l'intrépide Anglais?
Si le Germain l'emporte sur l'Ibère?
Tous ont vaincu, tous ont été défaits.
Le grand Condé fut vaincu par Turenne1,
Le fier Villars fut battu par Eugène2;
De Stanislas le vertueux support,

Ce roi soldat, don Quichotte du Nord,
Dont la valeur a paru plus qu'humaine,
N'a-t-il pas vu, dans le fond de l'Ukraine,
A Pultava tous ses lauriers flétris 3

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1. A la fameuse bataille des Dunes, près de Dunkerque. (Note de Voltaire, 1762.) Condé fut plus d'une fois battu par Turenne; et Voltaire aurait dû citer toute autre bataille que celle des Dunes, où il ne fut pas difficile à Turenne de vaincre, attendu que Condé, qui était dans l'armée de Flandre, ne la commandait pas. Voyez le Siècle de Louis XIV, chap. vi.

2. A Malplaquet, près de Mons, en 1709. (Note de Voltaire, 1762.) Siècle de Louis XIV, chap. xxI.

Voyez le

3. Aussi en 1709. (Note de Voltaire, 1762). — Voyez l'Histoire de Charles XII,

liv. IV.

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Par un rival, objet de ses mépris ?

Un beau secret serait, à mon avis,
De bien savoir éblouir le vulgaire,
De s'établir un divin caractère;
D'en imposer aux yeux des ennemis ;
Car les Romains, à qui tout fut soumis,
Domptaient l'Europe au milieu des miracles.
Le ciel pour eux prodigua les oracles.
Jupiter, Mars, Pollux, et tous les dieux,
Guidaient leur aigle et combattaient pour eux.
Le grand Bacchus qui mit l'Asie en cendre1,
L'antique Hercule, et le fier Alexandre,
Pour mieux régner sur les peuples conquis,
De Jupiter ont passé pour les fils :
Et l'on voyait les princes de la terre
A leurs genoux redouter le tonnerre,
Tomber du trône, et leur offrir des vœux.
Denis suivit ces exemples fameux,

Il prétendit que Jeanne la Pucelle
Chez les Anglais passât même pour telle;
Et que Bedford, et l'amoureux Talbot,
Et Tirconel, et Chandos l'indévot,

Crussent la chose, et qu'ils vissent dans Jeanne
Un bras divin, fatal à tout profane.

Pour réussir en ce hardi dessein,

Il s'en va prendre un vieux bénédictin,
Non tel que ceux dont le travail immense
Vient d'enrichir les libraires de France;
Mais un prieur engraissé d'ignorance,
Et n'ayant lu que son missel latin :
Frère Lourdis fut le bon personnage
Qui fut choisi pour ce nouveau voyage.
Devers la lune, où l'ont tient que jadis
Était placé des fous le paradis3,

1. Boileau (satire VIII, 100) avait dit:

Qui? cet écervelé qui mit l'Asio on cendre?

2. Voltaire veut sans doute parler de l'édition de la Gallia christiana, qui parut de 1715 à 1728. (G. A.)

3. On appelait autrefois paradis des fous, paradis des sots, les limbes; et on plaça dans ces limbes les âmes des imbéciles et des petits enfants morts sans baptême. Limbe signifie bord, bordure; et c'était vers les bords de la lune qu'on avait

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