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Celle-ci convient fort à ma vivacité,

Mais l'autre, je le crois, s'allie à la tendresse
Ne doit-on pas nommer une douce langueur
La paresse d'un cœur sensible,

Qui se plaît dans un lieu paisible

A méditer sur le bonheur?

Moi, dans ma tranquille demeure,

Grace à l'imagination

Je sais changer de situation,

De climats, de plaisirs, plusieurs fois dans une heure.
Souvent, Damis, je suis auprès de vous.
Là, je cache mon sexe, et sous un maintien sage,
J'ai tous les charmes du bel âge,

L'esprit vif, l'air espiègle et doux,
Du plus intéressant élève.

J'écoute avec respect vos éloquens discours,
Mais quelquefois, hélas! un peu trop fille d'Eve
Je regrette un talent perdu pour les amours.
Bientôt, vous m'ordonnez de réciter Virgile:
Je m'attendris sur le sort de Didon ;
De louer Eneas me paraît difficile,
J'ose le comparer au perfide Jason.

Vous vous fàchez, moi, je m'excuse,
Et je vous dis si je m'abuse

:

Accusez-en ma sensibilité.

Les Dieux pourraient-ils nous prescrire
La barbarie et l'infidélité?
Ah! la tendre pitié qu'inspire
L'amante qui pour nous soupire,
Doit l'emporter sur la rigidité.

Vous vous taisez, et mes maximes

N'obtiennent point tout haut votre approbation;

Mais j'entrevois que votre opinion

Rend mes principes légitimes. . Après l'étude et le repas, Parmi la jeunesse folâtre,

Vous venez conduire mes pas

Je ne puis vous quitter, et je laisse s'ébattre
Crier, sauter, courir cet essaig d'étourdis.
De ma tranquillité vous paraissez surpris :

Mais vous l'êtes bien plus, lorsque ma main tremblante

Cherche la vôtre. et malgré vous,
L'offre à ma bouche caressante.

Votre rougeur me peint votre courroux :
'Je la devine, elle accroit mon estime,
Et de pousser ce jeu me paraîtrait un crime.
Je vous regarde en souriant :

Vous retrouvez en moi les traits de votre amie
Je me nomme tout bas et je fuis à l'instant....
Voilà ma douce erreur finie.

Une autre fois.... Mais taisons-nous,
Du plaisir que je goûte en ces heureux mensonges
Les faux dévots pourraient être jaloux,

Et sans l'aveu du ciel, me damner pour des songes.

Par feu Mme DE MONTANCLOS.

ROMANCE.

Doux chant d'amour me trouble dès l'aurore;
Doux chant d'amour le jour vient m'affliger;
Doux chant d'amour le soir m'attriste encore;
Que n'est-ce, hélas ! le chant de mon berger!

J'entends ces mots : « Aime-moi!.. je t'adore....
> C'est pour toujours..... Plus ne saurais changer!.....>
Ah! dans ces mots est poison qui dévore:
Les entendais jadis de bon berger.

Jeunes beautés, puisse amour que j'implore
N'être pour vous Dieu cruel, ni léger!
Mais, par pitié, faites que je l'ignore ;
Bien vous eachais les feux de mon berger.

Ou, dans la nuit, si de la tendre Isaure

Le doux sommeil vient les maux soulager,
Que chant d'amour pour vous résonne encore :...

Mais que je rève entendre mon berger.

EUSEBE SALVERTE.

ÉNIGME.

Aux yeux des hommes et des Dieux,
Je suis un vice abominable,

Qu'on bait et méprise en tous lieux,

Parce qu'il est par-tout et bas et détestable ;

Mais, lecteur, ne crois pas, prise en un autre sens, Que telle soit ma destinée,

Que je sois toute la journée

Sans mérite et sans agrément.
Faite pour ménager la vue,

Une belle avec moi peut voir sans être vue ;
Je la préserve constamment

Des incommodités d'un soleil trop ardent.
Si par trop vive est la lumière,

C'est encor moi qui la tempère ;
Et quand le jour vient à passer,
Pour qu'il entre il suffit de me faire hisser.
Le philosophe de Genève,

Dans ses leçons à son élève,›
Disait que pour embellir son manoir,
On ne devait jamais négliger de m'avoir.
Il recommandait que sur-tout

Ma mise fût de couleur verte ;
Or Jean-Jacques avait du goût;

C'est vous en dire assez pour être découverte.

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Dans un jour de bataille,
Ne me montre jamais,
La troupe moscovite
Me présente au plus vîte,
Quand l'Empereur et Roi
La met en désarroi.

V. B. (d'Agen.)

CHARADE.

LORSQUE des bois le timide habitant

Entend de mon premier le bruit retentissant,
Effrayé du péril qui de loin le menace,

Il fuit en maudissant notre amour pour la chasse.
Un espiègle se plaît à faire mon dernier,
Et les lambris supportent mon entier.

Mots de PENIGME, du LOGOGRIPHE et de la CHARADE insérés dans le dernier Numéro.

Le mot de l'Enigme est Papillote.

Celui du Logogriphe est Fromage, dans lequel on trouve : orme Rome, or, ame, mer, âge, rage, mage et forme.

Celui de la Charade est Basson.

LITTÉRATURE ET BEAUX-ARTS.

TABLEAU DE LA MER BALTIQUE, considérée sous ses rapports physiques, géographiques, historiques et commerciaux, avec une carte et des notices détail lées sur le mouvement général du commerce, sur les ports, etc., etc.; par J. P. CATTEAU CALLEVILLE, membre de plusieurs Sociétés savantes et littéraires, Deux vol. in-8°... Prix, 15 fr. A Paris, chez Pillet, imprimeur-libraire, rue Christine, no 5.

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HORACE était poëte et philosophe, mais il fut moins philosophe que poëte lorsqu'il se souleva contre l'audace de l'homme qui franchit les détroits sur des barques impies, et qui se rit des défenses des Dieux. Le poëte traite la mer d'insociable (Oceano dissociabili). Le philosophe, dans un moment plus calme, aurait reconnu que la mer, loin d'éloigner et de séparer les hommes, les rapproche et les réunit. Si toutefois cette réflexion a pu lui échapper dans un tems où la navigation était encore dans l'enfance, elle se présente aujourd'hui naturellement aux yeux de quiconque jette un coup-d'œil sur le commerce du monde, sur les découvertes et les conquêtes que l'Europe doit à cet art perfectionné. La vérité s'étant une fois manifestée par ces immenses résultats, l'esprit la retrouve facilement ensuite dans ceux dont on n'avait pas d'abord senti l'importance ; il la découvre aux époques anciennes où elle n'avait pas frappé les contemporains. C'est, en effet, de cette vérité, c'est des grands services que la mer rend à l'homme, ou plutôt de ceux qu'il sait en tirer, que part l'estimable écrivain dont nous annonçons l'ouvrage. M. Catteau observe que les rivages de la mer ont été, en général, le berceau de la civilisation, des arts et de l'industrie. Il remarque que les mers méditerranées ont joui spécialement de cet avantage, et, en effet, elles étaient les

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