Page images
PDF
EPUB

-J'obéirai fans réplique à mon maître,
En bon portier: mais en fecret, peut-être,
J'aurais choifi, dans mon fort malheureux,
D'être plutôt le portier des Chartreux. (o)

NOTES.

(a) On nous affure que l'auteur s'amufa à composer cet ouvrage en 1758, pour détourner de la carrière dangereuse des lettres un jeune homme fans fortune, qui prenait pour du génie fa fureur de faire de mauvais vers. Le nombre de ceux qui fe perdent par cette paffion malheureuse eft prodigieux. Ils fe rendent incapables d'un travail utile; leur petit.orgueil les empêche de prendre un emploi subalterne, mais honnête, qui leur donnerait du pain ; ils vivent de rimes & d'efpérances, & meurent dans la mifere.

[blocks in formation]

M. de Cremille, lieutenant général, était chargé alors du département guerre, fous M. le marechal de Bellifle.

de la

[merged small][ocr errors][merged small]

Pequet était un premier commis des affaires étrangères. Pleneuf était un entrepreneur des vivres.

[merged small][ocr errors][merged small]

Fréron ne fe nomme pas Jean, mais Caterin. Il femble que cet homme foit le cadavre d'un coupable qu'on abandonne au fcalpel des chirurgiens. Il a été mechant, & il en a été puni. Il dit, dans une de ses feuilles de l'année 1756, je ne hais pas la medifance, peut-être même ne haïrais-je pas la calomnie. Un homme qui écrit ainfi ne doit pas être surpris qu'on lui rende juftice.

[blocks in formation]

L'homme dont il s'agit ici était d'ailleurs un magiftrat & un homme de lettres & de mérite. Il eut le malheur de prononcer a l'academie un discours peu mefuré, & même très-offenfant. 11 eft vrai que fa tragedie de Didon eft faite fur le modèle de celle de Metaftafio; mais auffi il y a de beaux morceaux qui font à l'auteur français. Il faut avouer qu'en général la pièce eft mal ecrite. Il n'y a qu'à voir le commencement.

Tous mes ambaffadeurs, irrités & confus,
Trop fouvent de la reine ont fubi les refus.

Voifin de fes Etats faibles dans leur naissance,
Je croyais que Didon, redoutant ma vengeance,
Se refoudrait fans peine à l'hymen glorieux
D'un monarque puiffant, fils du maître des Dieux.
Je contiens cependant la fureur qui m'anime;
Et deguifant encor mon dépit legitime,
Pour la dernière fois, en proie à fes hauteurs,
Je viens fous le faux nom de mes ambaffadeurs,
Au milieu de la cour d'une reine étrangère,
D'un refus obftiné pénétrer le mystère;

Que fais-je. . . . n'écouter qu'un transport amoureux.

Des ambassadeurs ne fubiffent point des refus; on effuie, on reçoit des

refus.

Si tous fes ambaffadeurs irrités & confus ont fubi des refus, comment ce Farbe pouvait-il croire que Didon fe foumettrait fans peine à cet hymen glorieux? Farbe d'ailleurs a-t-il envoyé tous les ambassadeurs ensemble, ou l'un après l'autre ?

Il contient cependant la fureur qui l'anime, & il déguise encore fon dépit légitime. S'il déguise ce dépit légitime, & s'il est si furieux, il ne croit donc pas que Didon l'époufera fans peine. Epoufer quelqu'un fans peine, & déguiser son dépit légitime, ne font pas des expreffions bien nobles, bien tragiques, bien élegantes.

Il vient fous le faux nom de fes ambaffadeurs, être en proie à des hauteurs ! Comment vient-on fous le faux nom de fes ambaffadeurs? on peut venir fous le nom d'un autre, mais on ne vient point fous le nom de plufieurs perfonnes. De plus, fi on vient fous le nom de quelqu'un, on vient à la vérité fous un faux nom, puisqu'on prend un nom qui n'eft pas le fien, mais on ne prend pas le faux nom d'un ambaffadeur quand on prend le véritable nom de cet ambaffadeur même.

Il veut pénétrer le mystère d'un refus obstiné. Qu'est-ce que le mystère d'un refus fi net & declare avec tant de hauteur? Il peut y avoir du mystère dans des délais, dans des réponses équivoques, dans des promesses mal tenues; mais quand on a déclare avec des hauteurs à tous vos ambassadeurs qu'on ne veut point de vous, il n'y a certainement là aucun mystère.

Que fais-je.... n'écouter qu'un transport amoureux. Que fait-il? il n'ecoutera qu'un transport, il fera terrible dans le tête à tête.

Le grand malheur de tant d'auteurs eft de n'employer presque jamais le mot propre; ils font contens pourvu qu'ils riment, mais les connaisseurs ne font pas contens.

[merged small][ocr errors][merged small]

Zoraïde était une tragédie africaine du même auteur. Les comédiens le prièrent de leur faire une feconde lecture pour y corriger quelque chofe : il leur ecrivit cette lettre.

[ocr errors]

» Je suis fort furpris, Meffieurs, que vous exigiez une seconde lecture » d'une tragédie telle que Zoraïde. Si vous ne vous connaiffez pas en » mérite, je me connais en procedés, & je me fouviendrai affez long» temps des vôtres, pour ne plus m'occuper d'un theâtre où l'on diftingue » fi peu les perfonnes & les talens. Je fuis, Meffieurs, autant que vous » méritez que je le fois, votre, &c.

(6)

[ocr errors]

Pour la Denèle.

Quinaut Denèle, était dans ce temps-là une affez bonne comédienne, pour qui principalement Zoraïde avait été faite. Les noms qui fuivent font les noms des comédiens de ce temps-là.

[blocks in formation]

Greffet, auteur du petit poëme de Vert-Vert, d'autres ouvrages dans ce goût, & de quelques comédies. Il y a des vers très-heureux dans tout ce qu'il a fait. Il était jefuite quand il fit imprimer fon Vert-Vert. Le contrafte de fon état & des termes de b..... & f..... qu'on voyait dans ce petit poëme, fit un très-grand eclat dans le monde, & donna à l'auteur une grande réputation. Ce poëme n'était fondé, à la vérité, que fur des plaifanteries de couvent, mais il promettait beaucoup ; l'auteur fut obligé de fortir des jefuites. Il donna la comédie du Méchant, pièce un peu froide, mais dans laquelle il y a des fcènes extrêmement bien ecrites. Revenu depuis à la devotion, il fit imprimer une lettre dans laquelle il avertiffait le public qu'il ne donnerait plus de comédies, de peur de fe damner. Il pouvait ceffer de travailler pour le théâtre fans le dire. Si tous ceux qui ne font point de comédies en avertissaient tout le monde, il y aurait trop d'avertiffemens imprimés. Cet avis au public fut plus fiffle que ne l'aurait été une pièce nouvelle; tant le public eft malin.

(i) L'abbé Trublet, auteur de quatre tomes d'effais de littérature. Ce font de ces livres inutiles, où l'on ramaffe de prétendus bons mots qu'on a entendu dire autrefois, des fentences rebattues, des penfees d'autrui delayées dans de longues phrases, de ces livres enfin dont on pourrait faire douze tomes avec le feul fecours du Poliante.

[blocks in formation]

Il y avait en effet alors auprès de l'hôtel de la comédie italienne, une maison où s'affemblaient tous les convulfionnaires, & où ils fefaient des

miracles.

miracles. Ils étaient protégés par un préfident au parlement, nommé du Bois, après l'avoir éte par un Carré de Mongeron, conseiller au même parlement. Cette fece des convulfionnaires, celle des moraves, des ménoniftes, des piétiftes, font voir comment certaines religions peuvent aisement s'établir dans la populace, & gagner enfuite les claffes íupėrieures. Il y avait alors plus de fix mille convulfionnaires à Paris. Plufieurs d'entr'eux fefaient des chofes très-extraordinaires. On rôtiffait des filles fans que leur peau fût endommagée; on leur donnait des coups de bûches fur l'eftomac fans les bleffer, & cela s'appelait donner des fecours. Il y eut des boîteux qui marchèrent droit, & des fourds qui entendirent. Tous ces miracles commençaient par un psaume qu'on récitait en langue vulgaire; on était faifi du SAINT-ESPRIT, on prophetisait; & quiconque dans l'affemblée fe ferait permis de rire aurait couru rifque d'être lapidé. Ces farces ont duré vingt ans chez les Velches.

[blocks in formation]

C'eft Abraham Chaumeix, vinaigrier & théologien, dont on a parlé ailleurs.

(m) Marion de Lorme, courtifane fort en vogue du temps du cardinal de Richelieu; & qui fit une affez grande fortune avec ce miniftre qui était fort généreux.

[blocks in formation]

La mode était alors de fe promener en carroffe ou à pied fur les boulevarts de Paris, que M. Outrequin avait soin de faire arroser tous les jours pendant l'été. Les jeunes gens fe piquaient d'y faire paraître leurs maîtreffes dans les voitures les plus brillantes. On y voyait des filles de l'opéra couvertes de diamans; elles renouaient leurs cheveux avec des peignes, où il y avait autant de diamans que de dents. Les boulevarts étaient bordés de cafés, de boutiques de marionnettes, de joueurs de gobelets, de danfeurs de corde, & de tout ce qui peut amufer la jeuneffe.

(0) Le portier des chartreux eft un livre qui n'eft pas de la morale la plus austère. On y trouve un portrait de l'abbé Desfontaines, plus hardi que tous ceux qu'on lit dans Petrone. Cet ouvrage eft de l'auteur de la petite comédie intitulée le B. . . . . . L'auteur était d'ailleurs auffi favant dans l'antiquité que dans l'hiftoire des mœurs modernes ; & il a compofé des difcours ferieux pour des perfonnages très-graves, qui ne favaient pas les faire eux-mêmes.

Contes, Satires, &c.

K

QU'AS-TU, petit bourgeois d'une petite ville ?

Quel accident étrange, en allumant ta bile,
A fur ton large front répandu la rougeur?

D'où vient que tes gros yeux pétillent de fureur?
Réponds donc. L'univers doit venger mes injures; (a)
L'univers me contemple, & les races futures
Contre mes ennemis dépoferont pour moi.
-L'univers, mon ami, ne pense point à toi,
L'avenir encor moins: conduis bien ton ménage,
Divertis-toi, bois, dors, fois tranquille, fois fage.
De quel nuage épais ton crâne eft offusqué !

Ah! j'ai fait un difcours, & l'on s'en eft moqué!
Des plaifans de Paris j'ai fenti la malice;

Je vais me plaindre au roi qui me rendra juftice;
Sans doute il punira ces ris audacieux.

- Va, le roi n'a point lu ton difcours ennuyeux.
Il a trop peu de temps, & trop de foins à prendre,
Son peuple à foulager, fes amis à défendre,

La guerre à foutenir en un mot les bourgeois.

: :

Doivent très-rarement importuner les rois.

La cour te croira fou: refte chez toi, bon homme.

-Non, je n'y puis tenir; de brocards on m'aflomme. Les quand, les qui, les quoi, pleuvant de tous côtés, (b) Sifflent à mon oreille, en cent lieux répétés.

(*) Un provincial dans un mémoire a imprimé ces mots : Il faut que tout l'univers fache que leurs majeftés fe font occupées de mon difcours. Le roi l'a voulu voir; toute la cour l'a voulu voir. Il dit dans un autre endroit que Ja naiffance eft encore au-dessus de fon difcours. Un père de la doctrine chrétienne a trouvé peu d'humilité chrétienne dans les paroles de ce monfieur; & pour le corriger, il a mis en lumière ces vers chrétiens, applicables à tous ceux qui ont plus de vanité qu'il ne faut.

« PreviousContinue »