Entends-tu le pipeau qui chante sur ses lèvres? C'est lui! Sa double corne accroche les rayons, Et, vois, au clair de lune il fait danser mes chèvres ! -Les Trophées, p. 41.
Ici gît, Etranger, la verte sauterelle
Que durant deux saisons nourrit la jeune Hellé, Et dont l'aile vibrant sous le pied dentelé Bruissait dans le pin, le cytise ou l'airelle.
Elle s'est tue, hélas! la lyre naturelle,
La muse des guérets, des sillons et du blé; De peur que son léger sommeil ne soit troublé, Ah! passe vite, ami, ne pèse point sur elle.
C'est là. Blanche, au milieu d'une touffe de thym, Sa pierre funéraire est fraîchement posée. Que d'hommes n'ont pas eu ce suprême destin!
Des larmes d'un enfant sa tombe est arrosée,
Et l'Aurore pieuse y fait chaque matin
Une libation de gouttes de rosée.
Le soleil sous la mer, mystérieuse aurore, Éclaire la forêt des coraux abyssins
Qui mêle, aux profondeurs de ses tièdes bassins, La bête épanouie et la vivante flore.
Et tout ce que le sel ou l'iode colore, Mousse, algue chevelue, anémones, oursins, Couvre de pourpre sombre, en somptueux dessins, Le fond vermiculé du pâle madrépore.
De sa splendide écaille éteignant les émaux, Un grand poisson navigue à travers les rameaux. Dans l'ombre transparente indolemment il rôde;
Et, brusquement, d'un coup de sa nageoire en feu Il fait, par le cristal morne, immobile et bleu, Courir, un frisson d'or, de nacre et d'émeraude. -Les Trophées, p. 130.
Pas un seul bruit d'insecte ou d'abeille en maraude, Tout dort sous les grands bois accablés de soleil Où le feuillage épais tamise un jour pareil
Au velours sombre et doux des mousses d'émeraude.
Criblant le dôme obscur, Midi splendide y rôde Et, sur mes cils mi-clos alanguis de sommeil, De mille éclairs furtifs forme un réseau vermeil Qui s'allonge et se croise à travers l'ombre chaude.
Vers la gaze de feu que trament les rayons, Vole le frêle essaim des riches papillons Qu'enivrent la lumière et le parfum des sèves;
Alors mes doigts tremblants saisissent chaque fil, Et dans les mailles d'or de ce filet subtil, Chasseur harmonieux, j'emprisonne mes rêves. -Les Trophées, p. 136.
LA MORT DE L'AIGLE
Quand l'aigle a dépassé les neiges éternelles, A sa vaste envergure il veut chercher plus d'air Et le soleil plus proche en un azur plus clair Pour échauffer l'éclat de ses mornes prunelles.
Il s'enlève. I aspire un torrent d'étincelles. Toujours plus haut, enflant son vol tranquille et fier, Il monte vers l'orage où l'attire l'éclair;
Mais la foudre d'un coup a rompu ses deux ailes.
Avec un cri sinistre, il tournoie, emporté Par la trombe, et, crispé, buvant d'un trait sublime La flamme éparse, il plonge au fulgurant abîme.
Heureux qui pour la Gloire ou pour la Liberté, Dans l'orgueil de la force et l'ivresse du rêve, Meurt ainsi d'une mort éblouissante et brève!
HENRI DE RÉGNIER (born 1864)
Ci-gît Crespin, seigneur de Vigneux en Thiérache. Il fut homme de guerre et son temps lui fut dur; Il défendit le pont, la poterne et le mur: Aussi sa lourde épée à sa hanche s'attache. Les liqueurs, apportant le fagot et la hache, Ont brûlé son cartel et rasé son blé mûr, Et il n'a récolté de son labeur obscur Que le sang qui ruisselle au fer qui le harnache.
Le lévrier debout ou lévrier couchant
Se joint pour soutenir son blason; l'or du champ Aux merlettes de sable ouvre un sautoir de gueules.
Il a connu l'amour, s'il a connu la haine, Puisque son double anneau nous donna pour aïeules Anne qui fut sa veuve et la douce Yolaine.
-Les Médailles d'argile, p. 225.1
LA PENDULE DE PORCELAINE
Le jardin rit au fleuve et le fleuve soupire Du regret éternel de sa rive qu'il fuit; La glycine retombe et se penche vers lui; Le lilas s'y reflète et le jasmin s'y mire.
Le liseron s'élance et le lierre s'étire; Un bouton qui germait est corolle aujourd'hui ; L'héliotrope embaume l'ombre et chaque nuit
Entr'ouvre un lys de plus pour l'aube qui l'admire;
1 By kind permission of the publishers, La Société du Mercure de France; Paris, 1900.
Et dans la maison claire en ses tapisseries, Une pendule de porcelaine fleurie
Contourne sa rocaille où l'Amour s'enguirlande,
Et tout le frais bouquet dont le jardin s'honore Survit dans le vieux Saxe où le Temps pour offrande Greffe la fleur d'argent de son timbre sonore.
-Les Médailles d'argile, p. 245.1
ALBERT SAMAIN (1859-1900)
Vague, perdue au fond des sables monotones, La ville d'autrefois, sans tours et sans remparts, Dort le sommeil dernier des vieilles Babylones, Sous le suaire blanc de ses marbres épars.
Jadis elle régnait; sur ses murailles fortes
La victoire étendait ses deux ailes de fer.
Tous les peuples d'Asie assiégeaient ses cent portes; Et ses grands escaliers descendaient vers la mer...
Vide à présent, et pour jamais silencieuse, Pierre à pierre, elle meurt, sous la lune pieuse, Auprès de son vieux fleuve ainsi qu'elle épuisé;
Et seul, un éléphant de bronze, en ces désastres, Droit encore au sommet d'un portique brisé, Lève tragiquement sa trompe vers les astres. —Au jardin de l'infante, p. 210.2
1 By kind permission of the publishers, La Société du Mercure de France; Paris, 1900.
2 By kind permission of the publishers, La Société du Mercure de France; Paris, 1893.
Alexandrine, 12–21. Alliteration, 64-68.
Assonance, 44-47; definition, 44; in vogue until the twelfth century, 45; in the rhymed tirades, 45, n. 2; in popular songs, 46; in the Symbolists' works, 47, 54; replaced by rhyme in the course of the twelfth century, 45. Athène(s), 70.
Avant-hier, always trisylla- bic, 9.
Avec(que), avecque(s), 70.
Baïfin (vers) 123, n. 2. Ballade, 93, 100, 101.
Blank verse, 118-122, mea- sured, 122-125.. Bui (instead of buis), 70.
Cæsura: weak, strong, 10; strengthened weak, weak- ened strong, 10, n. 1, 12, 14, 17; epic, 24; lyric, 24; in classical verse, 10, 13, 14, 17; in Romantic verse, 10, 14, 17; in lines having more than thirteen sylla- bles, 10; in vers baïfin, 123, n. 2; in thirteen - syllabled lines, 11; in the Alexan- drine, 12, 13; in Hugo's Alex- andrine, 17, 18, 19, 20; in mo- dern verse, 20, 21; feminine e at the cæsura, 10, n. 2, 21; in eleven-syllabled lines, 21, 22; in ten-syllabled lines, 22 (Modern and Old French) 23;
E feminine, 10, n. 2; 31, 44, n. 2 (vide Syllables and Cæsura). Eight-syllabled line, 24, 25. Eleven-syllabled line, 21, 22. En, 71. Encor(e), 70.
Enjambement, 27-36. In Old French, 28; sixteenth cen- tury, 28; seventeenth cen- tury, 28; when allowable in classical Alexandrine, 29; in Racine, 29, 30; in Molière, 30; in Lafontaine's fables, 30-32; in André Chénier's works, 32-35; in the Légende des Siècles, 33, 34; in Théodore de Banville's, 35, 52, n. 1; in Leconte de Lisle's, 35, 36; in Rostand's, 35, 36.
Five-syllabled line, 26. Fourmi(s), 70.
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