Page images
PDF
EPUB

lefquels toutes les créatures paffent ; & quoique ces états foient fucceffifs à notre égard, ils ne le font point à l'égard de Dieu qui les voit tous d'une même vue.

5°. Il connoît tout, il fait tout, il prévoit tout, & cette fcience de Dieu s'étend à tout. Il connoît les pensées des hommes, leurs defirs, leurs erreurs, leurs bonnes & mauvaises actions: il connoît le paffé, le préfent, & il voit l'avenir dans fon éternité. Et quoique cette divine perfection foit impénétrable à notre entendement, nous fentons qu'elle doit être telle, non-feulement par l'idée nous avons de Dieu, que par toutes les prédictions qu'il a mises dans la bouche de fes Prophetes & des hommes qu'il infpira de fon efprit, prédictions dont l'événement juftifia la vérité. C'eft ce qu'on voit dans les faintes écritures de l'Ancien & du Nouveau Teftament.

mais encore

6o. Dieu eft faint, & par cette fainteté on doit entendre que fon être eft féparé de toute corruption & de tout ce qui eft impur & profane; car Dieu n'aime rien qui foit indigne de lui, parce qu'il eft la fouveraine perfection.

7°. Il eft bon, miféricordieux & patient. Tout ce que nous voyons dans le monde peut nous donner une idée de ces perfections dont nous parlons, puifque Dieu n'a rien créé que pour le bien de l'homme, & qu'il veut le rendre heureux par la poffeffion du bien fouverain qui n'ett au re chofe que lui-même. Il fouffre, cette multitude infinie d'hommes, qui ne ceffent de l'outrager par leurs crimes & leur ingratitude. Il

attend avec une tranquillité parfaite que le terme qu'il leur a donné foit achevé, & que la mesure de leurs crimes foit comblée, quoiqu'il puiffe les anéantir & les perdre à tout moment: il fouffre les méchans pour exercer les bons, & il ne laiffe pas en même-tems de les fouffrir, pour leur donner les moyens de revenir à lui & de s'en repentir.

8°. Il est tout - puiffant, & cela fe conçoit aifément par les ouvrages qui nous font admirer cette toute-puiffance, & parce qu'il conferve. à tout moment tous ces corps immenfes qui composent l'univers, & qu'il imprime à chaque instant à la matiere un mouvement qui les fait subsister dans leur arrangement, & qui produit les divers changemens néceffaires dans le cours des aftres'; en forte qu'aucun corps ne fe remue que par l'impreffion qu'il reçoit de Dieu.

9°. Enfin il difpofe de tout, & arrange toutes chofes felon fes deffeins éternels; c'eft cette perfection que nous appellons la divine Providence. Ceft cette Providence qui influe dans tous les événemens publics & particuliers. Tout homme doit l'avoir préfente dans les différentes fituations par où il paffe. La foi dans cette divine perfection établit notre ame dans une parfaite confiance en un Dieu qui peut tout & qui difpofe de tout: c'eft cette foi qui fait fentir à la créature fa dépendance univerfelle du Créateur, -& qui fournit à la piété l'exercice de toutes les

vertus.

I.

SUR NOTRE AME.

L'AME eft le principe de la vie du corps humain : c'est l'ame qui penfe en nous, qui defire, à qui le corps obéit: c'eft un efprit immortel, créé de Dieu pour être uni à notre corps; c'eft-à-dire que l'ame eft une fubftance fpirituelle & immortelle. La foi & la raifon nous l'apprennent. La foi nous l'apprend, car dans l'Ecriture Sainte l'ame y eft appellée fouvent Eccl. 12, du nom d'efprit: Souvenez-vous de votre Créateur, y eft-il dit, avant que la poussiere rentre en la terre d'où elle avoit été tirée, & que l'esprit Math. 10, retourne à Dieu qui l'avoit donné. Ne craigneų point, difoit Notre-Seigneur à fes Disciples, ceux qui tuent le corps, & qui ne peuvent tuer l'ame. La raifon nous fait fentir que l'ame eft une fubftanee fpirituelle: nous connoiffons fon exiftence par le fentiment intime qui eft en nous, quoique nous n'en connoiffions pas la nature. Je fens fort bien que ce que j'appelle mon ame n'eft point mon corps; que cette ame eft une fubftance indivifible. L'ame est un sujet qui penfe ; elle n'a point les propriétés du corps, car le corps eft une matiere incapable par fa nature de penfer & de fentir; d'où il s'enfuit que l'homme eft un compofé de deux fubftances très-différentes que le Créateur a unies par des noeuds qui nous font inconnus.

Mais, outre que l'ame eft une substance fpirituelle, elle eft encore une fubftance immortelle: il eft facile de comprendre qu'elle n'a point été créée pour périr avec le corps, fi l'on fait atten

tion que l'homme porte au fond de fon coeur un defir d'être immortel. Car les hommes de tous les fiecles & de tous les pays ont toujours eu dans l'efprit que leur ame étoit immortelle. Si on remonte jusqu'à la naissance des fiecles, fi on parcourt l'hiftoire des Royaumes & des Empires, on fe convaincra que la croyance de l'immortalité de l'ame a été & eft encore la croyance de tous les peuples de l'univers. La croyance d'un feul Dieu a pu s'effacer fur la terre les hommes ont pu s'égarer, & fe font égarés en effet fur l'objet de la Divinité, en croyant qu'il y avoit plufieurs Dieux, ou que Dieu étoit le foleil ou tel ou tel corps; mais le fentiment de l'immortalité de l'ame n'a pu s'effacer du cœur des peuples les plus groffiers. Ils attendent tous un avenir: ils fe figurent tous une région que nos ames habiteront après notre mort. Et cette croyance ne fauroit être un préjugé de l'éducation, puifqu'elle eft différente felon les différens pays; cependant les hommes fe la font perfuadée à eux-mêmes.

Voici encore une feconde preuve de cette immortalité de notre ame. Elle fe tire des conféquences affreufes qu'entraîne l'idée que l'ame mourroit avec le corps. Car fi l'ame meurt avec le corps, tout eft confondu fur la terre : toutes les idées de vice & de vertu font renversées, puifque les loix & les devoirs les plus facrés de la fociété ne font fondés que fur la certitude d'un avenir. Ainfi, fi on n'attend plus rien après cette vie, on pourroit regarder la vertu & le vice comme des chimeres : les adulteres, les

meurtres, les crimes abominables ne feroient à nos yeux que des défenfes humaines, des loix de police établies par la politique des Législateurs: d'où il s'enfuivroit que les crimes les plus affreux & les vertus les plus pures feroient au même niveau; puifque tôt ou tard le jufte & l'impie feront également anéantis : d'où il s'enfuivroit enfin que ceux qui auroient le malheur de croire que tout finit avec nous, peuvent fans rien rifavoir de mauvaises mœurs, être fans proquer bité, fans foi, prendre le bien d'autrui, s'ils peuvent dérober leur crime à la connoiffance des hommes, n'avoir d'autre regle que leurs paffions, d'autre frein que la crainte des loix civiles.

Il y a encore une troifiéme preuve de l'immortalité de l'ame, & c'eft la néceffité d'un avenir cette néceffité eft fondée fur l'idée que nous avons de Dieu, qui eft celle d'un Etre fouverainement fage & équitable. Or cette idée feule nous fait comprendre qu'un Dieu juste doit néceffairement récompenfer la vertu & venger le crime; car s'il ne l'étoit pas, il s'enfuivroit. de cette horrible fuppofition que Dieu préféreroit le vice à la vertu. En voici la raifon : l'expérience journaliere nous apprend que dans cette vie les plus gens de bien font fouvent accablés de maux, ou par les fouffrances du corps, ou par l'injuftice & les violences qu'ils éprouvent de la part des autres ; que les impies & les méchans, les hommes injuftes & corrompus paroiffent les heureux de la terre, qu'ils font dans l'abondance des biens de ce monde ; que plu

« PreviousContinue »