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fut fait car ce font-là les fondemens de la Religion naturelle. Paffons maintenant aux premiers principes de la Religion Chrétienne.

DE L'EXISTENCE DE DIEU.

LA plus grande & la plus importante de toutes les vérités, c'est qu'il y a un Dieu. Les preuves de fon exiftence font claires & fans replique. La premiere se tire de l'impreffion que le Créateur a mife en nous. En effet, tous les hommes qui vivent en fociété se font de tout tems accordés à reconnoître cette vérité fondamentale qu'il y a quelqu'Etre puiffant qui conduit l'univers. Il n'y a point de peuples ni de nations qui ne reconnoiffent l'existence d'une Divinité: & quoique la plupart fe foient trompés dans l'objet qui devoit être cette Divinité, ils ont néanmoins admis une Puiffance maitreffe de toutes choses. Bien plus, ce sentiment eft entiérement indépendant de l'éducation : nous l'éprouvons dès que nous voulons faire ufage de notre raison.

2e Preuve. La crainte & les frayeurs. Elles font naturelles à l'homme. Or de quelque caufe qu'elles viennent, elles prouvent la crainte qu'on a de Dieu : car elles excitent l'homme à implorer le fecours de la Divinité dès qu'il voit fa vie en danger. Le fentiment qu'éprouve alors fon cœur lui dit qu'il y a un Dieu, & c'est à lui qu'il a recours.

3e Preuve. Les remords qu'éprouve l'homme après qu'il a fait quelque chofe de mal : car Dieu

nous a donné un coeur qui ne peut s'empêcher de craindre, lorfque nous nous reprochons de n'avoir pas rempli les devoirs que la raifon naturelle nous prefcrit. Delà vient, que dès que nous voyons commettre quelqu'injuftice ou quelque violence, nous témoignons notre indignation par un mouvement qui nous eft naturel. Or cette honte & les remords attachés au mal, dès que l'ufage de la raison se fait sentir en nous, viennent de la nature, & nullement de l'éducation; & cette crainte que nous avons de la juftice d'une Divinité qui voit tout & qui juge tout, eft une preuve que nous portons cette vérité de l'existence de Dieu au fond de notre

cœur.

4e Preuve. Les paroles échappées. En effet, fi on veut fe rendre attentif aux paroles qui échappent aux hommes, on trouvera une infinité d'expreffions qui prouvent la Divinité. S'agit-il de la fanté, de la maladie, du gouvernement de l'Etat, de la victoire, des accidens terribles? c'est toujours de Dieu que l'on parle, comme de celui qui en eft l'arbitre, qui opere tout, qui gouverne tout; c'eft toujours vers lui qu'on leve les yeux, & qu'on pouffe des cris. C'est le langage commun, 'eft le langage de la nature, & par conféquent celui de la vérité; d'où il eft évident qu'elles font les expreffions des fentimens que la nature nous a imprimés, des traits de l'image de Dieu.

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Il en eft de même du fentiment de la douleur que les hommes éprouvent en mille occafions: car il leur fait auffi-tôt rendre un témoignage

éclatant à l'existence de la Divinité qu'ils implorent. Or qui peut avoir imprimé dans la nature de l'homme ce fentiment de la douleur, fi ce n'eft un Etre tout-puiffant, qui éprouve les créatures de la maniere qu'il lui plaît, & leur fait voir qu'il peut les punir quand il le juge à propos?

se Preuve. La loi naturelle gravée dans nos coeurs. C'est par cette loi que nous avons les idées de ce qui eft bien & de ce qui eft mal; nous les portons au-dedans de nous; elles font indépendantes de l'éducation. Delà vient que nous reconnoiffons que c'eft un crime horrible d'affaffiner un homme, quand même il n'y auroit pas des loix humaines établies pour le punir: il en eft de même des autres principes de la loi naturelle, & qui font renfermés dans celui de ne pas faire à autrui ce que nous ne voudrions pas qui nous fût fait.

6e Preuve. Le fpectacle que l'univers préfente à nos yeux, car il nous fait comprendre qu'il y a des caracteres de fageffe imprimés dans l'univers. En effet, fi on fait attention aux révolutions furprenantes des aftres, qui font fi juftes & fi conftantes; aux divers afpects de ces corps immenfes & lumineux ; fi l'on confidere le cours régulier du Soleil, mefuré fur les besoins de l'homme; la Lune avec fes variations; le nombre infini d'étoiles dont le Ciel eft femé; la fertilité de la terre que le tems n'a point épuifée, puifqu'elle nous fournit tous les ans cette même diverfité de fruits; les abîmes de la mer, & fa vafte étendue; la conftruction admirable du

corps humain & de toutes fes parties, quand on les examine de près, ainfi que celle de tous les corps organifés, comme les animaux & les plantes; enfin cette infinité de productions de la nature qui nous raviffent d'admiration ; fi on confidere, dis-je, tout ce fpectacle, il eft vifible qu'une fageffe fuprême en eft la caufe ; & cette fageffe peut-elle être autre chofe que Dieu ? Bien plus, en voyant tous les êtres qui nous environnent, on peut fe demander quelle eft leur origine? Nous reconnoiffons qu'ils ne font pas éternels; la matiere n'a pu fe donner fon exiftence; ils n'ont point l'être par eux-mêmes : il faut donc néceffairement qu'ils aient un créateur, & ce créateur, qu'eft-ce autre chofe que Dieu même ?

Cette fageffe qui eft le principe de tout ce qu'il y a d'admirable dans la nature, qu'est-ce autre chofe que Dieu ? C'est elle qui a mis dans notre cœur les principes d'équité & de juftice néceffaires pour entretenir les hommes en fociété ; qui leur a donné ce penchant mutuel les uns pour les autres; qui a mis cette convenance entre l'homme & la femme pour former des familles ; qui a voulu que les peres & meres euffent de la tendreffe pour leurs enfans, qu'ils priffent foin de leur éducation. En un mot, l'univers & tout ce qui le remplit eft un tableau où les perfonnes qui le confiderent y reconnoiffent les traits d'une Divinité fouverainement fage & puiffante toutes les beautés de ce même univers font autant de liens, par lefquels Dieu veut exciter notre amour & notre reconnoiffance.

DES PERFECTIONS DE DIEU.

ELLES font infinies: cependant on peut s'en former une idée d'après celle que la raifon nous donne d'un Etre fouverainement parfait, & cette idée eft en même-tems conforme à ce qui nous eft révélé de l'Etre suprême dans les faintes Ecritures.

1o. Dieu eft un, c'est-à-dire qu'il n'y a qu'un Dieu & cette unité eft comprise dans l'idée que nous avons d'un Etre infiniment parfait. Or cette idée ne peut s'allier avec une multitude de Dieux: car l'un ne pourroit pas détruire ce que l'autre auroit fait : ainfi chacun en particulier ne feroit ni l'Etre parfait ni le Tout-puiffant. Et fi avant l'établiffement de la Religion Chrétienne la plus grande partie de la terre admettoit la pluralité des Dieux, la cause de cette erreur étoit l'aveuglement dans lequel les paffions des hommes avoient entraîné leur efprit.

2o. Dieu est un esprit, & n'eft point un corps : c'est un être tout fimple, fans aucune diverfité ni multiplicité des parties.

3°. Il remplit tout par fon immenfité, & cette immenfité n'eft pas une étendue infinie à la façon du corps: mais Dieu étant un pur efprit, on doit dire qu'il eft par-tout, 1°. par fa préfence, parce que tout eft préfent à fes yeux; 2o. par fa puiffance, parce qu'il opere en tout.

4°. Il est éternel, c'est-à-dire qu'il n'y a point de paffé ni de futur à fon égard; & dans fon éternité, il voit tous les différens états par

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