tient du prodige. Voici comme sortirent autrefois du sein de la terre, ces hommes armés que produisirent les dents du serpent, semées par Cadmus. Mais la plupart des poissons ont le goût trop fin, le palais trop délicat pour se laisser prendre à un appât si grossier. LAU. Pour ceux-là, je les prends avec une espèce d'insecte que je connois. BAR. Essaye donc à attraper les poissons: moi, je vais donner de l'occupation aux grenouilles. LAU. Comment cela, au filet? BAR. Non, mais à coups de flèches. LAU. Nouvelle manière de pêcher. BAR. Oui, mais fort divertissante. Tu le verras, et tu en conviendras toi-même. VIN. Et nous deux, si nous jouions à la mourre (1)? PAUL. C'est un jeu bien sot et bien grossier, plus propre du reste à être joué auprès du feu qu'en pleine campagne. VIN. Et bien, jouons aux noix. PAUL. Il faut laisser les noix aux petits enfans; nous commençons, nous autres à devenir grands garçons. VIN. Tu as beau dire; nous ne sommes encore que des enfans. PAUL. Lorsqu'on est d'âge à jouer aux noix, on peut bien ne pas rougir d'aller à cheval sur un grand bâton. VIN. Décide donc à quel jeu nous jouerons. J'en passerai par-tout où il te plaira. PAUL. Et moi, tu me trouveras à toute heure en bonne disposition. (1) Le jeu de la mourre consiste à faire deviner à un autre qui a les yeux bandés, combien on a de doigts levés ou baissés. 1 SELECTE FONTANII FABULÆ, Eodem interprete GIRAUD. MULTA Hirundo et Avicula. ULTA usu didicit, dum regna pererrat, hirundo; Quo quis plus vidit, plus meminisse potest. Infidi hæc minimam pelagi prænoverat iram, Et signum nautis, ante pericla, dabat. Ruricolam, vêoit cum cannabis hora serenda, Mittere per sulcos semina densa, videt. Auguror inde nihil fausti, prudentior, inquit, Me, parvæ volucres, vestra pericla movent. Quippe ego, vel latebris, tanto in discrimine, condar, Aut cita in amotas me feret ala plagas. Cernitis agrestem-ne manum se ferre per auras? Illa dies aderit, nec procul illa dies, Quâ vestram parient, quæ spargit cumque, ruinam; Hinc pedica venient; hinc artes mille nocendi ; Ah! caveam vereor vel ahenum; hæc ergo comesse Nempe dabant agri pabula larga nimis. Cannabe cùm viridi se vestiit undique tellus, Indocilem turbam rursus hirundo monet. Eia, minutatim granorum evellite fœtus; FABLES CHOISIES DE LA FONTAINE, Même traduction de GIRAUD. L'Hirondelle et les petits Oiseaux. U NE hirondelle en ses voyages Avoit beaucoup appris. Quiconque a beaucoup vu Celle-ci prévoyoit jusqu'aux moindres orages, Les annonçoit aux matelots. Il arriva qu'au temps que la chanvre se sème, Que ce qu'elle répand sera votre ruine. Votre mort ou votre prison: C'est pourquoi, leur dit l'hirondelle, Ce qu'a produit ce maudit grain ; Sin vos pernicies, spondeo, certa manet; Nos vero egregium, clamant, vis munus obire! Incidit in similes similis dementia casus, Unum id agit quivis, suadet quod amica cupido; Homo et Imago ejus. SE sine rivali quidam malesanus amabat, Sed tentat dulci sors officiosa medelam On soyez sûrs de votre perte. Prophète de malheur ! babillarde! dit-on, L'hirondelle ajouta: Ceci ne va pas bien; Mais, puisque jusqu'ici l'on ne m'a crue en rien; Ne volez plus de place en place; De passer, comme nous, les déserts et les ondes, C'est pourquoi vous n'avez qu'un parti qui soit sûr;` Se mirent à jaser aussi confusément Que faisoient les Troyens quand la pauvre Ouvroit la bouche seulement; Cassandre Il en prit aux uns comme aux autres : Maint oisillon se vit esclave retenu. Nous n'écoutons d'instincts que ceux qui sont les nôtres, Et ne croyons le mal que quand il est venu. L'Homme et son Image. UN homme qui s'aimoit sans avoir de rivaux, Passoit dans son esprit pour le plus beau du monde. 11 accusoit toujours les miroirs d'être faux, Vivant plus que content dans une erreur profonde. Afin de le guérir, le sort officieux Présentoit par-tout à ses yeux |