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se sont parlé l'un L'AUTRE; tout coupables qu'ils sont, je LES ai pardonnés; dites: ils se sont nui les uns AUX AUTRES; ils se sont parlé l'un à L'AUTRE; JE LEUR ai pardonné. De même on dira: l'amitié qui les unit l'un à L'AUTRE, qui les lie l'un À L'AUTRE, et non pas qui les unit l'un l'autre, qui les lie l'un L'AUTRE.

528.-Quand deux verbes ne veulent pas le même complément, c'est-à-dire quand l'un veut un complément direct et l'autre un complément indirect, il faut donner à chacun le complément qui lui convient :

Il attaqua la ville et s'en empara.

Il attaqua et s'empara de la ville serait incorrect; car de la ville, complément indirect de s'empara, ne saurait convenir à attaqua, qui veut un complément direct.

529.-La même chose a lieu lorsque deux verbes exigent des compléments indirects marqués par des prépositions différentes. Ainsi l'on dira: un grand nombre de vaisseaux entrent dans ce port, et en sortent tous les mois, et non pas : entrent et sortent de ce port, attendu qu'on dit: entrer DANS et sortir DE.

530.-Lorsqu'un verbe a deux compléments de nature différente, c'est-à-dire, un complément direct et un complément indirect, le plus court doit être placé le premier:

Il faut opposer un maintien stoïque aux propos et aux injures des

méchants.

Les hypocrites parent des dehors de la vertu les vices les plus honteux et les plus décriés.

531. Si les compléments sont d'égale longueur, le complément direct se place le premier: les Français vainquirent les Espagnols à Villaviciosa.

532. Il faut éviter de placer les compléments indirects de manière qu'ils donnent lieu à une équivoque. On ne dira donc pas; croyez-vous pouvoir ramener ces esprits égarés, PAR LA DOUCEUR ? Les maîtres qui grondent ceux qui les servent, AVEC EMPORTEMENT, sont les plus mal servis. Il faut dire : croyez-vous pouvoir ramener PAR LA DOUCEUR ces esprits égarés?-Les maîtres qui grondent AVEC EMPORTEMENT ceux qui les servent, sont les plus mal servis.

533.-Lorsque le complément d'un verbe renferme plusieurs parties unies par une des conjonctions et, ni, ou, ces parties doivent être exprimées par des mots de même espèce;

c'est-à-dire, qu'alors les conjonctions et, ni, ou, ne doivent unir qu'un substantif à un substantif, un verbe à un verbe, une proposition à une proposition, etc. De là, les phrases suivantes sont incorrectes:

Il aime le jeu et à étudier.

Ils se plaisent au spectacle, ou à se promener.

Il n'est pas nécessaire d'apprendre à tirer de l'arc, ni le maniement du javelot.

Je crois vos raisons excellentes, et que vous le convaincrez.

:

Il faut il aime le jeu et l'étude ;-ils se plaisent au spectacle ou à la promenade ;—il n'est pas nécessaire d'apprendre à tirer de l'arc, ni à manier le javelot ;-je crois que vos rai sons sont excellentes, et que vous le convaincrez.

534.-Les verbes passifs forment leur complément à l'aide d'une des prépositions de et par : ils prennent de, quand ils expriment un sentiment, une passion, en un mot un mouvement de l'ame; et par, lorsqu'ils signifient une action à laquelle l'esprit ou le corps a seul part: l'honnête homme est estimé DE tout le monde ;· -une grande partie de la terre a été conquise PAR les Romains.

535.-Remarque. Cependant, au lieu de la préposition de, l'usage permet d'employer par, pour éviter plusieurs de: votre conduite a été approuvée d'une commune voix PAR toutes les personnes sages et éclairées. (Wailly.)

EMPLOI DES AUXILIAIRES.

536.-Le verbe avoir marque l'action: il a aimé, le verbe être, l'état: il est aimé; d'où il résulte:

537.-1° Que la plupart des verbes neutres, exprimant une action, se conjuguent avec l'auxiliaire avoir: j'ai succédé, il a régné, nous avions dormi, vous aviez marché, il a paru, ils ont péri, etc.

538.-Excepté aller, arriver, choir, décéder, mourir, naitre, tomber, venir, et les composés devenir, parvenir, revenir, qui prennent l'auxiliaire être, quoique l'action qu'ils expriment exige le verbe avoir; mais l'usage en a décidé autre

ment.

539.-2° Qu'un certain nombre de verbes neutres, comme accourir, disparaître, croître, cesser, monter, descendre, entrer. sortir, passer, partir, grandir, déchoir, échoir, empirer, vieillir, etc., prennent tantôt avoir, et tantôt être; avoir, lorsque c'est l'action que le verbe exprime que l'on a en vue; et etre,

A

quand l'état est l'idée principale que l'on veut exprimer. Ce sont les circonstances dont le verbe est accompagné qui indiquent le plus souvent lequel de ces deux points de vue on envisage. Ainsi je dirai avec avoir: elle a disparu subitement; la fièvre a cessé hier; la rivière a monté rapidement ; le baromètre a descendu de plusieurs degrés en peu d'heures ; il a passé en Amérique en tel temps; le trait à parti avec impétuosité (Acad.); et avec le verbe être : elle EST disparue depuis quinze jours; la fièvre EST cessée depuis quelque temps; il EST monté, il EST descendu depuis une heure; les chaleurs SONT passées; les troupes SONT parties pour six mois. (Acad.) 540.-Remarque. Plusieurs de ces verbes s'emploient quelquefois activement, c'est-à-dire, avec un complément direct, et alors ils prennent, comme les verbes actifs, l'auxiliaire avoir on les a descendus; il ▲ monté l'escalier; on l'A sorti d'une affaire désagréable ; j'ai passé la nuit sans dormir. (Acad.)

541-Quelques verbes neutres changent d'auxiliaire en changeant d'acception:

542.-Convenir, dans le sens d'être convenable, prend avoir; et être, dans le sens de demeurer d'accord: cette maison m'a convenu, et je suis convenu du prix. (Acad.)

A

A

543.-Demeurer prend le verbe avoir, dit l'Académie, quand il a le sens d'habiter: il a demeuré à Madrid. (Acad.); ou qu'il signifie employer du temps à: il a demeuré une heure à faire cela. (Acad.) Dans toute autre acception demeurer prend le verbe être il EST demeuré en chemin; où en EST-il demeuré de son travail? (Acad.)

544.-On dit: cette faute m'EST échappée, pour signifier qu'on l'a faite par inadvertance; et: elle m'a échappé, pour faire entendre qu'on ne l'a pas remarquée.

545.-Expirer se dit des personnes et des choses.

Se disant des personnes, il signifie mourir, et prend avoir: cet homme A expiré dans mes bras.

Se disant des choses, il signifie arriver au terme de sa durée et prend les deux auxiliaires: avoir pour exprimer l'action son bail a expiré à la Saint-Jean (Acad.); être, pour marquer l'état: les délais SONT expires. (Acad.)

546.-Remarque. Expirer, appliqué aux personnes, exige, comme tous les verbes conjugués avec avoir, que son auxiliaire ne soit jamais sous-entendu. Il ne faut donc pas imiter Racine, lorsqu'il dit:

A ces mots ce héros expiré

N'a laissé dans mes bras qu'un corps défiguré.

Un héros expiré n'est pas plus français qu'un héros triomphé, un homme dormi. La grammaire demande: ce héros AYANT expiré.

547.--Rester, dans le sens de demeurer, de séjourner, prend avoir: il a resté deux jours à Lyon. (Acad.)

Dans toute autre acception, il prend être : il EST resté tout interdit. Il ÉTAIT resté à Bordeaux, pendant qu'on le croyait à Paris; c'est-à-dire, il était, il se trouvait à Bordeaux, etc.

DE L'EMPLOI DES TEMPS DE L'INDICATIF ET DU CONDITIONNEL. 548.-Le présent s'emploie à la place du passé pour rendre la narration plus vive, plus animée :

J'ai vu, seigneur, j'ai vu votre malheureux fils
Traîné par les chevaux que sa main a nourris.
Il veut les rappeler, et sa voix les effraie.

(RACINE.)

549. Il faut alors que tous les verbes qui sont dans la même phrase, et qui expriment une idée de passé soient au présent. Ainsi l'on ne dira pas: il provoque son adversaire, s'élance sur lui, et le TERRASSA; ni: tandis que le cardinal Mazarin GAGNAIT des batailles contre les ennemis de l'état, les siens combattent contre lui. La grammaire exige il provoque son adversaire, s'élance sur lui, et le terrasse ;-tandis que le cardinal Mazarin gagne des batailles contre les ennemis de l'état, les siens combattent contre lui.

550.-L'imparfait, exprimant un temps passé, ne doit pas s'employer:

1° Pour une action qui a lieu à l'instant de la parole; on ne dira donc pas j'ai appris que vous £TIEZ à Paris, si la personne y est encore; il faut dire : j'ai appris que vous ETES à Paris.

2o Pour une action qui a lieu dans tous les temps, comme une maxime, un axiome. D'où il suit qu'on ne doit pas dire je vous ai dit que la sagesse l'EMPORTAIT sur les richesses; je vous ai démontré que la terre ÉTAIT ronde. La chose étant toujours vraie, ayant toujours lieu, c'est le présent qu'il faut employer. Je vous ai dit que la sagesse l'EMPORTE sur les richesses; je vous ai démontré que la terre EST

ronde. L'imparfait exprimerait tout le contraire de ce qu'on veut dire ; il indiquerait que la sagesse a été supérieure aux richesses, et qu'elle a cessé de l'être; que la terre a été ronde et qu'elle ne l'est plus.

551.-—Le passé indéfini désigne un temps passé, soit entièrement écoulé: J'AI REÇU une lettre l'année dernière, le mois passé, la semaine dernière, hier; soit qu'il en reste encore quelque portion à s'écouler: J'AI REÇU une lettre cette année, ce mois, cette semaine, aujourd'hui.

552.-Le passé défini ne se dit au contraire que d'un temps complètement écoulé, et séparé par l'intervalle d'une nuit au moins de l'instant où l'on parle; ainsi l'on ne dira pas: JE REÇUS une lettre cette année, ce mois, cette semaine, aujourd'hui; car on est encore dans le temps dont il s'agit.

553.-Il résulte de la distinction qui vient d'être établie entre le passé défini et le passé indéfini que, pour un temps dans lequel on n'est plus, on peut également bien faire usage de l'un ou de l'autre de ces temps, et dire: je vous ÉCRIVIS ou je vous AI ÉCRIT hier. Nous le RENCONTRAMES ou nous L'AVONS RENCONTRÉ l'année passée.

554.-Remarque. Lorsqu'on a à exprimer plusieurs fois un temps passé complètement écoulé, on ne doit pas dans la même phrase employer tantôt le passé défini et tantôt le passé indéfini, comme dans cet exemple: JE REÇUS hier une lettre à laquelle J'AI RÉPONDU tout de suite; il faut dire: JE REÇUS hier une lettre à laquelle JE RÉPONDIS tout de suite; ou J'AI REÇU hier une lettre à laquelle j'ai réPONDU tout de suite.

555.-Le plus-que-parfait, exprimant un temps passé antérieur à un temps qui est écoulé, ne doit pas s'employer pour le passé indéfini, qui exprime simplement un temps passé; ne dites donc pas : j'ai appris que vous AVIEZ VOYAGE. Il s'agit ici d'un temps passé sans aucune idée d'antériorité par rapport au premier verbe; dites: j'ai appris que vous AVEZ VOYAGÉ.

556.-Le conditionnel ne doit pas s'employer pour le futur; ne dites donc pas on m'a assuré que vous VOYAGERIEZ incessamment. Il s'agit simplement d'un temps à venir sans aucune idée de condition; dites: que vous VOYAGEREZ,

etc.

557. Lorsque le verbe de la proposition principale est à un temps passé, le verbe de la proposition incidente doit être au conditionnel présent, et non au conditionnel passé,

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