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posé par faiblesse à le favoriser. Il faut réunir la sagesse à la science; c'est le plus précieux des trésors. O Dieu de miséricorde, qui avez fait toutes choses par votre parole ! disait Salomon à Dieu; je vous demande en toute humilité quelque rayon de cette divine sagesse, qui est avec vous dans le ciel. Ne me rejetez pas du nombre de vos enfans, je suis votre serviteur et votre créature, homme faible et mortel, incapable de comprendre par moi-même vos saintes ordonnances. Envoyez-moi du ciel et du trône de votre grandeur, votre sagesse, afin qu'elle m'assiste et qu'elle travaille avec moi, et que par ses saintes inspirations, je puisse connaître ce qui vous est agréable. C'est elle qui a l'intelligence de toutes choses; elle m'apprendra à me conduire sagement en tout ce que je

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dois faire, et elle me gardera par sa puissance; ainsi j'aurai le bonheur de vous plaire dans mes actions.

Quand vint le moment de faire sa première communion, Alphonse se considéra comme étant dans la cir-. constance la plus importante de sa vie : il ne chercha à échapper à aucun des exercices, à aucune des pratiques religieuses auxquels on soumet alors les jeunes gens; il allait au contraire au devant de tout ce qu'on lui prescrivait à cet égard, et même le passait 'fort souvent. Les jeunes gens qui se préparent légèrement à ce grand acte de religion, commettent devant Dieu un aussi grand crime que les prêtres qui les admettent avec trop de facilité et sans des épreuves suffisantes. C'est un sacrilége horrible, fait pour attirer, sur les uns comme sur les autres la vengeance céleste.

Le jour arrivé, Alphonse se fit remarquer de tout le monde par sa contenance pleine de ferveur et de modestie. On voyait sur sa figure, qui peignait une douce émotion, qu'en ce moment il prenait l'engagement de faire encore mieux qu'il n'avait fait jusque-là, quoique tout le monde fût content de lui et affectât de le répéter à ses oreilles.

Cet engagement, il le tint fidèlement. En effet, quelques sujets de satisfaction qu'il eût donnés par le passé, on s'aperçut, à dater de ce jour, qu'il se perfectionnait encore dans la vertu. Quel moment plus favorable pour le faire? Une fois qu'il est venu, on ne devrait trouver dans la jeunesse que des dispositions semblables à celles du jeune de Fréville : ainsi le voudrait même son intérêt dans ce monde : car c'est la vertu qui

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donne véritablement le bonheur sur la terre; le vice, à bien considérer les choses, n'y fait que des dupes et des victimes. « Tel est le pouvoir du vice, dit Plutarque, que, seul, sans secours, il suffit pour rendre l'homme malheureux. Les tyrans entretiennent des satellites et des bourreaux pour tourmenter ceux qu'ils veulent punir; ils inventent de nouveaux genres de supplices qui effraient les âmes pusillanimes. Le vice, une fois entré dans le cœur, n'a besoin d'aucun moyen extérieur pour l'affliger, le tourmenter, le livrer en proie aux douleurs, aux gémissemens et aux remords. En voulez-vous une preuve ? quelle constance bien des gens supportent les plus cruels tourmens. lls se laisent frapper de verges, déchirer sans proférer une seule parole. L'âme qui s'est rendue maîtresse du

voyez avec

corps, en réprime tous les mouvemens: mais qui pourrait imposer silence à la colère et à la douleur, calmer les émotions de la crainte, étouffer le cri du remords, arrêter les transports et les fureurs du désespoir? Tant il est vrai que le vice est encore plus redoutable que le fer et le feu !

» Quand une ville veut élever un temple ou une statue colossale, elle appelle des artistes pour les consulter sur les moyens d'exécuter cette entreprise. Les artistes présentent leurs plans, leur modèle et leur prix, et l'entreprise est donnée à celui qui s'engage à le faire mieux, plus promptement et à moins de frais. Supposons qu'on propose une récompense à ceux qui trouveront les meilleurs moyens de rendre l'homme malheureux, et que la fortune et le vice se présentent

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