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du moins chez quelques animaux inférieurs, ce mouvement se rencontre aussi dans la couche vasculaire, savoir dans l'intérieur des vaisseaux, sur leurs parois. Chez beaucoup d'animaux inférieurs, on l'observe dans la partie animale du corps, c'est-à-dire sur toute la surface extérieure. Chez les animaux supérieurs, il n'a été remarqué à la surface de la peau que dans l'état embryonnaire de ces êtres, comme chez les embryons de grenouille; quelque uns l'ont offert aussi dans leur état de larve, tels que les têtards des batraciens. Dans la partie organique du corps, quelques membranes muqueuses l'offrent, et on peut l'y voir sans peine jusque chez l'homme, depuis que Purkinje et Valentin l'ont découvert chez les vertébrés supérieurs. Généralement ce phénomène n'a été observé que sur les membranes muqueuses, à la catégorie desquelles appartient aussi la peau des têtards de grenouille et des animaux inférieurs. Cependant Sharpey l'a remarqué sur les parois internes de la cavité des astéries, qui contient les viscères de ces animaux, et dans laquelle l'eau trouve accès: il l'a vue également, dans l'aphrodite, à la surface extérieure de l'intestin et de ses cæcums, ainsi qu'aux parois des cellules dorsales dans lesquelles les cæcums sont placés. Il pourrait donc bien se faire que tous les mouvements de sucs nourriciers qu'on a observés chez des animaux inférieurs, sans cœur et sans contraction apparente de vaisseaux, n'eussent lieu que par l'effet du mouvement vibratile, comme il serait possible aussi que le mouvement circulaire des sucs dans les cellules de plusieurs plantes s'effectuât de la même manière (1).

CHAPITRE II.

Du mouvement vibratile.

De Heide, Leeuwenhoek, Baker, Swammerdam et Baster connaissaient déjà, dans les mollusques, ce phénomène, dont les causes n'ont été découvertes que beaucoup plus tard. De Heide et Leeuwenhoek avaient vu les courants qui ont lieu aux branchies des bivalves; Swammerdam, Leeuwenhoek et Baster avaient observé la rotation de l'embryon des mollusques dans l'œuf, qui dépend de la même cause. Les courants réguliers aux branchies des bivalves ont été examinés, dans ces derniers temps, par Erman (2) et Sharpey (3). Carus (4) a décrit en détail les rotations de l'embryon des mollusques. Steinbuch et Meyen ont fait connaître les cils qui existent aux bras des polypes pénicillés. Gruithuisen les a découverts

(1) Jusqu'ici on n'a pu découvrir de cils vibratiles dans les internœuds des charagnes. Unger (Die Pflanze im Momente der Thierwerdung, Vienne, 1843) attribue à des organes de ce genre les vifs mouvements de rotation que les spores de plusieurs conferves accomplissent à leur sortie de l'utricule maternel; mais il doit y avoir quelque différence essentielle et encore inconnue à cet égard, car l'extrait aqueux d'opium, la morphine et l'acide cyanhydrique paralysent les mouvements des spores de vaucheries, tandis qu'ils n'exercent aucune influence sur les mouvements vibratiles des animaux. (Note du trad.)

(2) Abhandl. der Akad. zu Berlin, 1846, 1817.

(3) Donné (Cours de microscopie, pl. IX, fig. 34) a donné la figure des cils vibratiles de la moule.

(4) Nov. act, nat. cur., vol. XVI.

dans les planaires et chez un gastéropode d'eau douce (1). Grant, le premier, les a signalés comme étant la cause de la rotation des embryons de mollusques dans l'œuf et de celle des œufs (sans doute embryons) de polypes. Quant aux autres invertébrés, le mouvement vibratile a été observé par Ehrenberg dans le groupe entier des animaux qu'il nomme turbellaires (Gordius, Nemertes, Planaria, etc.), ainsi qu'à la surface du corps et même dans l'intestin des phytozoaires rotateurs et des naïdes. On doit aussi à ce célèbre naturaliste une excellente description de la disposition variée des cils chez les infusoires. Les premières observations relatives à ce phénomène chez les animaux vertébrés ont été faites par Steinbuch, qui a reconnu le mouvement de l'eau autour des branchies des batraciens, mais sans en apercevoir la cause, et qui a cherché inutilement les cils. Gruithuisen l'a découvert à la queue des têtards de grenouille. Sharpey l'a décrit, non seulement aux branchies de ces animaux, mais encore à la surface de leur corps. Des observations analogues ont été faites sur les branchies par Huschke, par Raspail (2) et par moi. Cependant il était réservé à Purkinje et Valentin de faire la grande découverte que ce phénomène ne dépend pas de cils vibratiles chez les batraciens et les invertébrés seulement, mais qu'il a lieu aussi, avec la même vivacité et par les mêmes causes, sur les membranes muqueuses des reptiles, des oiseaux et des mammifères. Ces deux observateurs en ont donné une description complète dans presque toutes les classes d'animaux.

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PARTIES DANS LESQUELLES ON OBSERVE LE MOUVEMENT VIBRATILE.

Le mouvement vibratile a été observé, chez divers animaux, à la peau, au canal intestinal, au système respiratoire et à l'appareil génital (3).

Système cutané.

Le mouvement vibratile de la peau s'aperçoit chez les infusoires, les coraux et les acalèphes, au manteau des bivalves, sur toute la surface du corps des gastéropodes, tant terrestres qu'aquatiques, et des turbellaires d'Ehrenberg. Chez les animaux supérieurs, on ne le rencontre que dans les embryons et dans les larves très jeunes de batraciens. Tout au commencement, la surface entière de leur corps vibre, comme l'ont vu Sharpey, Purkinje et Valentin; mais, avec le temps, ce phénomène se réduit à une étendue toujours décroissante de la peau,

- Nov. act. nat. cur., t. X.

1) Salzb. med. Zeitung, 1818, 4, 286.
(2) Nouveau système de chimie organique. Paris, 1838, t. II, p. 472.

(3) Chez l'homme, on a observé le mouvement vibratile dans les ventricules du cerveau, surtout à la surface des plexus choroïdes des ventricules latéraux, dans le prolongement que la corne antérieure du ventricule latéral envoie dans le nerf olfactif chez l'embryon, à la face interne du sac lacrymal et du canal lacrymal, dans les cavités nasales, tant sur la cloison que sur les cornets et dans le labyrinthe ethmoïdal, les sinus frontaux, les sinus maxillaires et les trompes d'Eustache, jusqu'à leur embouchure dans la caisse du tympan, ou même plus loin, au sommet du pharynx et sur une partie de la région supérieure du voile du palais, dans le larynx, audessous de l'épiglotte et dans le tube bronchique entier, jusqu'aux vésicules pulmonaires, aux lèvres et au col de la matrice, sur la face interne de cet organe et des trompes jusqu'à l'extrémité des franges, à l'origine des canalicules urinifères, dans la portion qui entoure les corpuscules de Malpighi (suivant Bowmann). (Note du trad.)

en sorte qu'il finit par ne plus avoir lieu qu'à la base de la queue et sur les côtés de la tête. Après le développement des membres, la surface du corps n'en offre plus aucune trace.

Canal intestinal,

Chez les reptiles, le mouvement vibratile n'a lieu qu'à la partie supérieure du canal alimentaire, comme l'ont découvert Purkinje et Valentin. On l'observe sur la membrane interne de toute la bouche, de la trompe d'Eustache et du pharynx. Chez les chéloniens et les serpents, il s'opère aussi dans l'œsophage, jusqu'à une certaine distance, c'est-à-dire, chez les premiers jusqu'à l'estomac, et chez les seconds jusqu'à l'endroit marqué par la saillie des plis longitudinaux de la membrane interne de l'estomac. On n'en découvre aucune trace dans la cavité buccale, le pharynx et l'œsophage des mammifères (1) et des oiseaux. Chez les mollusques, au contraire, il a lieu, suivant Purkinje et Valentin, sur la surface interne du canal intestinal tout entier, et même sur celle des conduits biliaires. Ehrenberg l'a observé dans l'intérieur de l'intestin des phytozoaires rotateurs et des naïdes ; Sharpey dans l'estomac et les cæcums des astéries, l'intestin des annélides et l'estomac des actinies. Il faut également rapporter ici les mouvements de globules que Lister (2) et Meyen ont vus dans le sac digestif des polypes.

Organes respiratoires.

Purkinje et Valentin ont aperçu le mouvement vibratile sur la membrane muqueuse du larynx, de la trachée-artère et des bronches de tous les animaux vertébrés qui respirent l'air. Chez les mammifères et les oiseaux, il commence à la glotte, car la cavité buccale et le pharynx n'en offrent aucune trace. Chez les oiseaux, il a lieu non seulement à la face interne de la trachée-artère et de ses branches, mais encore, d'après Purkinje et Valentin, à celle des sacs aériens qui partent des poumons. Il s'accomplit aussi aux branchies des têtards des reptiles nus, mais seulement aux branchies externes ; car les branchies internes des têtards de grenouille, qui n'apparaissent qu'à la seconde période du développement, ne le présentent pas, remarque qu'avait déjà faite Sharpey. Il n'a pas lieu non plus sur les branchies des poissons, ce qu'avait également reconnu cet observateur. On peut présumer qu'il existe aux branchies externes des embryons de raies et de squales. Il est général sur les branchies des mollusques et sur les branchies accessoires des bivalves; mais Purkinje et Valentin ne l'ont point observé à la face interne du poumon des gastéropodes pulmonés, non plus que sur les branchies des crustacés proprement dits. Il a été vu aux bras des polypes pénicillés par Steinbuch, aux branchies des sabelles par Huschke et par moi.

Cavité nasale.

Le phénomène est général dans la cavité nasale, où Purkinje et Valentin l'ont

(1) Gruby et Delafond (Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1844) disent qu'à la surface de l'épithélium de l'intestin grêle du chien existent des corps vibratiles, à l'égard desquels ils n'entrent d'ailleurs dans aucun détail. Valentin regarde l'existence de ces cils comme étant encore problématique ; du moins assure-t-il ne pas les avoir aperçus chez l'homme. (N. du trad.) (2) Phil. Trans, 1934.

découvert. Il n'a pas lieu seulement dans la cavité nasale proprement dite des reptiles, des oiseaux et des mammifères, tant sur la paroi externe que sur la paroi interne; ces observateurs l'ont remarqué aussi à la membrane muqueuse des cavités accessoires du nez des mammifères, telles que les sinus frontaux, les sinus maxillaires et les trompes d'Eustache. Il ne paraît pas s'opérer dans le canal lacrymal et le sac lacrymal des lapins; mais la membrane muqueuse du nez de ces animaux l'offre, et il n'a pas lieu sur leur conjonctive. Cette particularité est contre toute attente; car l'existence du mouvement vibratile à la conjonctive, ou seulement dans les voies lacrymales, aurait expliqué sans peine l'admission des larmes dans les conduits lacrymaux. On le remarque aussi d'une manière bien distincte dans la cavité nasale des poissons.

Organes génitaux.

Chez les animaux vertébrés, le mouvement vibratile ne se voit qu'aux parties génitales des femelles, comme l'ont découvert Purkinje et Valentin. Il paraît à la face interne des oviductes, de la matrice et du vagin des mammifères, à moins qu'ils ne soient très jeunes; pendant la grossesse même, les portions de la matrice non couvertes par le chorion n'en sont point exemptes. On l'observe aussi jusqu'à l'extrémité des trompes, chez les oiseaux et les reptiles. Je l'ai vu tant chez les mammifères que chez des oiseaux et des reptiles. Peut-être celui qui s'accomplit à l'orifice abdominal des trompes prend-il part à l'admission des œufs dans ces conduits, chez les reptiles; personne n'ignore que la manière dont les œufs de la grenouille et de la salamandre passent de l'ovaire dans l'ouverture abdominale des trompes, qui se trouve placée beaucoup plus haut, est demeurée une énigme jusqu'à ce jour. Il serait possible cependant que la membrane muqueuse de l'oviducte fît procidence à cet effet, et qu'elle tournât ainsi sa face vibratile vers l'ovaire ou vers les œufs tombant dans la cavité abdominale. Chez les poissons, le mouvement vibratile a lieu aussi dans les organes génitaux femelles, savoir à la face interne de l'oviducte, chez les carpes, et très distinctement jusqu'à l'ouverture extérieure de la génération. Henle l'a trouvé très prononcé dans les parties génitales femelles des mollusques, dans l'ovaire des gastéropodes, et à la face interne des cavités de cet organe chez les bivalves. Les parties génitales mâles n'en offrent pas de traces chez les animaux vertébrés, et on ne l'a point non plus remarqué d'une manière certaine dans celles des animaux sans vertèbres.

Organes urinaires.

Le mouvement vibratile n'existe dans cet appareil chez aucun animal vertébré ; mais Purkinje et Valentin l'ont rencontré dans le sac crayeux des limaçons, organe dont le conduit excréteur s'ouvre auprès de l'anus, et qu'on peut considérer comme le rein de ces êtres, à cause de l'acide urique qu'il contient. Il y a été vu aussi par Henle. Suivant Purkinje et Valentin, il s'opère, chez les bivalves, à la surface interne de l'organe en forme de sac qui s'abouche auprès de l'orifice des ovaires, organe que quelques auteurs comparent au rein, mais qu'on pourrait aussi regarder comme un testicule, du moins jusqu'à ce que l'analogue de cette dernière glande ait été définitivement découvert chez les bivalves.

D'après cet aperçu, on voit que le mouvement vibratile est un phénomène général du règne animal, et qu'il n'a pas la même extension dans les différentes classes. Ce qui est le plus rare, c'est de le voir répandu sur la surface entière du corps, comme chez les mollusques, les turbellaires, l'embryon et les très jeunes têtards de batraciens. Il est constant dans les organes olfactifs des animaux qui respirent l'air et l'eau, et dans les organes génitaux femelles : on le rencontre assez généralement dans les organes respiratoires, à l'exception des branchies des poissons et des branchies internes des têtards de grenouille; on le voit rarement dans le canal intestinal, par exemple, chez les mollusques, ainsi que dans l'œsophage et la bouche des reptiles; il manque dans les organes urinaires et dans les organes génitaux mâles des animaux vertébrés. Nulle classe du règne animal n'en est totalement privée. Purkinje et Valentin croyaient à son absence chez les poissons; mais, s'il n'existe pas aux branchies, chez ces êtres, il est très prononcé, tant aux parties génitales femelles qu'à la membrane muqueuse de la cavité nasale.

C'est à lui que se rapporte la cause des mouvements de l'embryon dans l'œuf, chez plusieurs animaux, et même de ceux des œufs libres, ou, pour parler avec plus de précision, des embryons non développés de certains animaux inférieurs, radiaires et coraux. Cavolini a observé le mouvement des œufs des gorgones; Tilesius, celui des œufs des millepores; Grant, celui des œufs des campanulaires, des gorgones, des caryophyllies, des éponges et des plumulaires. Les œufs, dégagés de leurs capsules, se meuvent, l'une de leurs extrémités dirigée en avant. Rapp a également trouvé les cils sur les œufs des corynes, et Grant sur les embryons des gastéropodes, où il est la cause de la rotation dans l'œuf,

ORGANES DU MOUVEMENT VIBRATILE.

Les organes du mouvement vibratile (1) sont, d'après les recherches de Purkinje et Valentin, des filaments déliés et transparents, qui ont 0,000075 à 0,000908 ligne de longueur. Leur base est presque toujours plus forte que leur sommet: ils m'ont paru tels, la plupart du temps, sur les membranes muqueuses. Je les ai vus plus renflés à l'extrémité sur les branchies d'un nouveau genre d'annélides, voisin des sabelles, qui vit dans la mer Baltique. Leur forme est partout difficile à déterminer, mais leur existence assez facile à constater. Je les ai aperçus très distinctement chez les anodontes, sur les branchies de l'annélide précité, dans la bouche des gre nouilles, dans les oviductes des lapins, des grenouilles et des poissons, dans la trachée-artère des oiseaux et des mammifères, et je ne m'explique point comment L.-C. Treviranus a pu ne pas les trouver. D'après Purkinje et Valentin, la surface des membranes dans lesquelles s'opèrent des mouvements vibratiles paraît être com

Fig. 84.

(1) La figure 84 représente l'épithélium vibratile de la membrane muqueuse buccale de la grenouille, à un grossissement de 250 diamètres : a cils en repos; b cylindres d'épithélium sur lesquels reposent les cils; e noyau de cellule épithéliale. Donné (Cours de microscopie, pl. IX, fig. 34 bis) a aussi représenté un fragment de cette même membrane offrant des cils vibratiles sur le bord; mais cette figure est confuse, et n'a pas bien réussi, tandis que celle de son Atlas qui représente les cils de la moule (fig. 34) est parfaite.

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