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plus fort que si, toutes choses égales d'ailleurs, le petit sac n'eût point été là. Toutefois je remarquai, dans une contre-expérience, que ce petit sac membraneux aplati, contenant de l'eau seulement, sans sable, fortifiait également le son par résonnance. Je n'ai pas pu m'expliquer à quoi tient la résonnance de parties membraneuses dans l'eau. L'humérus d'un oiseau, dépouillé de ses sels calcaires, et mis en contact avec de l'eau, en dehors comme en dedans, ne montra presque pas de résonnance: il en fut de même d'un morceau d'intestin de veau rempli d'eau, et quand j'excitais un son dans l'eau, les choses se passaient absolument de la même manière, soit que le conducteur fût appliqué à un long lambeau d'intestin, soit que, la distance du point d'origine du son restant la même, il le fût à un court lambeau plongé dans le liquide.

C. Limaçon.

Il faut avoir égard, en étudiant l'acoustique du labyrinthe, à la direction que suit la propagation de l'ébranlement et des ondes dans l'eau et les parties solides de cette région de l'oreille (1). Les recherches de Savart sur la transmission des ondes

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impulsives de corps solides à l'eau, et de l'eau à des corps solides, peuvent être appliquées ici. Cette transmission paraît s'accomplir de la même manière absolument que dans d'autres milieux. Supposons que a soit un vase plein d'eau, 6 une verge

(1) La figure 177 représente, d'après Arnold, le limaçon gauche de l'homme adulte, ouvert par le sommet du rocher, douze fois plus grand que nature. a, base du limaçon; b, corps du limaçon; c, cupule du limaçon; dd, premier tour; ee, second tour; ff, demi-tour; gg, paroi externe du canal cochléen; hh, paroi interne, ii, parois intermédiaires séparant les rampes; k, fin de la paroi entre le second et le troisième tour appelée lamina modioli; l, base du modiolus; m, son corps; n, son sommet; o, bord semi-lunaire; p, bord annexé à la cupule; q, trous du modiolus; r, lame spirale qui commence (s) dans le vestibule, et offre en t un crochet; u, rampe tympanique; v, rampe vestibulaire; w, fin en cul-de-sac du canal cochléen,

fixée à son fond (fig. 178), et c une plaque de bois flottante sur le liquide, les ondes longitudinales qui viennent à être excitées dans la verge se transmettent, au travers de l'eau, à la plaque, suivant la même direction, comme l'indique le sautilFig. 178.

lement du sable à la surface de cette dernière. En outre, a étant un vase plein d'eau, et b une plaque qui flotte sur celle-ci, mais dont les bords sont obliques aux parois du vase a, si l'on passe un archet de violon sur les parois, de manière à les faire vibrer dans la direction des flèches, l'ébranlement se transmet par l'eau à la plaque, et ensuite par celle-ci, en conservant la même direction, de sorte que l'obliquité des bords de la plaque par rapport à la direction du son ne change rien à la direction dans laquelle ce dernier se propage. La transmission a donc lieu absolument, dans le premier cas, comme si la verge b faisait corps avec la plaque e, et dans le second cas comme si la paroi a était unie par une verge à la plaque b, dont la surface lui est perpendiculaire. Ainsi les lois de la propagation de l'ébranlement à travers des plaques qui se rencontrent sous des angles s'appliquent aussi au labyrinthe.

Fig. 179.

Fig. 180.

Des faits précédemment exposés, il suit que a, b, c et d étant des plaques unies ensemble, lorsqu'on communique des ondes sonores à la plaque a, dans la direction de la flèche, ces ondes se propagent en suivant la même direction à travers la tige bd qu'à travers la plaque supérieure cc'. Appliquons ceci au limaçon. La tige bd est comparable à la columelle, et les plaques transversales correspondent à la lame spirale. Si, à la figure 179, on substitue la figure 180, l'analogie saute encore davantage aux yeux. En quelque direction donc que des ondes sonores soient communi

quées, ou à la columelle, ou à la lame spirale elle-même, la direction de l'ébranlement demeurera constamment la même, soit que l'impulsion ait été transmise des os de la tête à la columelle ou aux parois du limaçon, et de celles-ci à la lame spirale, soit qu'elle l'ait été d'une de ces parties à l'eau du labyrinthe. Quant à ce qui concerne les vibrations partant de l'eau du labyrinthe, la fenêtre ovale est dirigée de telle manière qu'une ligne perpendiculaire tirée sur son champ marche presque parallèlement à la columelle du limaçon, d'où il suit que les ébranlements qui partent de cette fenêtre excitent vraisemblablement, dans les parties solides du limaçon, des secousses ayant la même direction que la columelle; c'est-à-dire que ce sera la lame spirale qui aura le plus de facilité à vibrer, dans toute son étendue, suivant une direction presque perpendiculaire à sa surface. Je reconnais aisément, à l'aide du conducteur, la direction de l'ébranlement dans des plaques qui se communiquent un son au milieu de l'eau; le son est toujours plus fort lorsque le conducteur est placé sur les plaques dans une direction parallèle à celle suivant laquelle a lieu la propagation de l'ébranlement.

Dans l'exposé qui précède, les diverses parties du limaçon ont été considérées comme étant affectées simultanément, ou à peu près, par l'ébranlement. Il reste maintenant à savoir s'il ne pourrait pas aussi s'opérer une transmission successive de l'ébranlement le long des spires du limaçon, c'est-à-dire depuis le vestibule ou la fenêtre ronde jusque dans la cupule, de manière, ou que l'eau la propageât successivement par les rampes, ou que cette succession eût lieu le long de la ligue spirale. Comme le canal du limaçon, et avec lui la lame spirale, présentent une longueur considérable, puisque les tours ont dix-huit à dix-neuf lignes au pourtour extérieur, il pourrait se faire, dans le cas où la propagation de l'ébranlement s'accomplirait le long des tours du limaçon, que celui-ci fût destiné à prolonger l'impression: mais cette hypothèse est fort douteuse. Une propagation semblable devrait avoir lieu, par l'air, dans un tuyau roulé sur lui-même. Au contraire, la facilité avec laquelle l'ébranlement se communique de l'eau à des parties solides fait que la transmission successive des spirales d'eau logées dans un corps solide ne se maintient pas pure, et que les ondes, en partant du commencement des tours, passent presque aussi aisément à travers la columelle, dans une autre partie des tours. Ce mode de transmission n'est guère possible non plus par la lame spirale, puisqu'elle se continue avec les parois solides du limaçon, et qu'elle a tout autant de facilité à communiquer les ondes qu'elle reçoit aux parois du limaçon et à la columelle qu'à les conduire elle-même plus loin. Mais les ébranlements communiqués à la columelle et aux parois du limaçon rencontreront d'autres parties de la lame spirale, indépendamment de la propagation qui a lieu dans cette lame ellemême. Il n'y aurait qu'un seul moyen pour que l'onde impulsive pût suivre le canal du limaçon ce serait que ce canal ne tournât pas sur lui-même, et qu'il fût disposé en ligne droite, dans toute sa longueur et dans la direction du son. D'après cela, il est certain qu'on ne peut point compter sur cette marche non troublée de l'ébranlement dans l'eau du limaçon et à la surface de la lame spirale. D'ailleurs il serait plus nuisible qu'utile à la netteté de la sensation que les ébranlements parcourussent ainsi une étendue d'un pouce et demi de parties riches en nerfs; car, pendant ce trajet des ondes, certaines particules du nerf se trouveraient au maximum d'ébranlement et de condensation, tandis que d'autres n'auraient point encore atteint leur maximum, comme dans le retentissement. Les tours du limaçon doivent bien plutôt, en resserrant le canal de l'organe dans un petit espace, obvier à cet inconvénient, en supposant qu'il pût avoir lieu.

La lame spirale du limaçon doit donc être considérée comme une plaque portant des fibres épanouies, sur laquelle toutes les fibres du nerf reçoivent presque simultanément l'onde sonore, et atteignent simultanément leur maximum de condensation, puis leur maximum de raréfaction. D'après cette théorie, il serait, en général, à peu près indifférent que les fibres nerveuses s'épanouissent sur plusieurs lames circulaires, disposées autour de la columelle, comme dans la figure qui précède, ou sur une même plaque contournée en hélice. Cette dernière forme, que la nature a adoptée, présente l'avantage que toutes les parties de la plaque font corps ensemble, et se communiquent avec plus de facilité leurs ébranlements.

Les tours du limaçon ont en même temps un autre avantage, celui de réaliser, sous le plus petit espace possible, la surface considérable qui était nécessaire pow l'expansion des fibres nerveuses.

La destination finale du limaçon paraît être d'étaler les fibres nerveuses sur une lame solide, qui soit en contact tant avec les parois solides du labyrinthe et de la tête, qu'avec l'eau du labyrinthe, et qui, indépendamment de cet avantage, ait encore celui d'être limitée. C'est de ce principe que doivent être dérivés tous ses avantages acoustiques.

L'union de la plaque avec les parois solides du labyrinthe rend le limaçon propre à l'audition des ondes sonores des parties solides de la tête et des parois du labyrinthe. Cet usage lui a déjà été assigné par E.-H. Weber. Le labyrinthe membraneux se trouve libre dans l'eau du labyrinthe, et évidemment l'audition des ébranlements communiqués à cette eau elle-même est mieux servie si les ébranlements arrivent à celle-ci par les os de la tête, comme chez les poissous, et les dents, comme chez l'homme qui place une montre entre ses mâchoires, ou par la fenêtre. Sans doute, le labyrinthe membraneux est exposé à la résonnance des parois solides du labyrinthe; car les ondes sonores communiquées à l'eau sont toujours, comme je l'ai fait voir, entendues avec plus de force dans le voisinage des parois. Cependant il ne reçoit jamais immédiatement ces ondes que de l'eau. Au contraire, la lame spirale du limaçon, faisant corps avec les parois solides du labyrinthe, reçoit immédiatement de ces dernières les ébranlements qui leur sont communiqués. Il y a là un avantage considérable, car les secousses transmises aux parties solides ont, toutes choses égales d'ailleurs, une force absolue plus grande que celles de l'eau.

Ceci ressort en toute évidence des expériences que j'ai déjà relatées. Si, pour comparer l'intensité des ébranlements des corps solides et de ceux de l'eau, on appliquait d'abord le conducteur aux parties solides, puis qu'on le plongeât dans l'eau, on se tromperait. En effet, les ébranlements des corps solides passent, sans changement dans leur intensité, au conducteur mis en contact avec ces derniers, tandis que ceux de l'eau ne lui parviennent qu'affaiblis dans ce liquide. Mais, si, pour comparer des ondes sonores dans l'eau, au moyen du conducteur, on place ce dernier d'abord au voisinage de parois solides qu'il ne touche pas, puis à distance d'elles, le milieu au sein duquel s'opère la comparaison est le même dans les deux cas. Dans l'un et l'autre, le conducteur fait entendre des sons qui proviennent de l'eau. Les deux sortes d'ébranlements sont ici réduits au même milieu. Or, comme, même lorsqu'un son vient à être excité dans l'eau, l'eau résonne avec plus de force dans le voisinage des parois du vase que dans d'autres points de son étendue également distants de celui d'où le son tire son origine, il suit de là que, toutes choses égales d'ailleurs, les ondes sonores des corps solides agissent avec plus d'intensité que celles de l'eau. D'où l'on voit tout de suite quelle est la grande utilité du limaçon.

Cependant le limaçon n'a pas été établi uniquement dans cette vue. Sa lame spirale reçoit encore du vestibule et de la fenêtre, ronde, tout aussi bien que le labyrinthe membraneux, les ondes impulsives de l'eau du labyrinthe. Elle est même mieux disposée pour cela, chez l'homme et les mammifères, que le labyrinthe membraneux, puisque sa qualité de corps solide et limité la rend susceptible de résonnance. On peut se convaincre de cet effet par une expérience. Placet-on une plaque mince de bois dans un vase de bois plein d'eau et à parois fort épaisses, cette plaque, toutes choses égales d'ailleurs, résonne avec plus de force

dans le liquide que ne le font les parois épaisses du vase. En effet, quand on excite des ondes sonores dans l'eau par le moyen du sifflet clos à l'aide d'une →membrane, en dirigeant l'extrémité de ce dernier, dans le liquide, perpendiculairement à la plaque fixée, sans cependant la lui faire toucher, le conducteur fait entendre le son avec force partout dans le voisinage des parois de la plaque, mais Là distance du point d'où le son tire son origine. Si l'on dirige le sifflet, sans rien changer à la distance, vers les parois du vase épais de bois, le conducteur donne aussi la perception d'un son fort au voisinage des parois; mais l'intensité n'est pas la même que dans le cas précédent. Peu importe que la plaque soit fixée à un bord e seulement, ou à deux bords opposés, pourvu que ses côtés soient libres et en conlact avec l'eau.

Enfin on entrevoit pourquoi les fibres du nerf sont étalées les unes à côté des autres sur la lame spirale.

Plus le nerf auditif s'étendrait en couches épaisses sur les parties solides du limaçon, moins il recevrait les ébranlements de ces derniers, puisqu'il n'est pas homogène avec elles; mais plus les couches qu'il y forme sont minces, plus les ébranlements des parties solides se communiquent avec facilité à ses fibres, qui sont en contact avec elles.

L'intensité de la communication croît, en outre, avec la surface du corps que les ondes sonores touchent. Si, après s'être bouché les oreilles, on tient le conducteur dans de l'eau où l'on excite un son, ce son augmente d'intensité à mesure qu'on enfonce le conducteur, c'est-à-dire à mesure que la surface qu'il présente à l'eau acquiert plus de largeur.

CHAPITRE III.

Des effets des ondes sonores sur les nerfs auditifs, et de l'action propre à ces derniers.

1. Effets des ondes sonores sur les nerfs auditifs.

La discussion doit partir ici des propriétés dont jouissent les ondes qui parviennent dans le labyrinthe.

On doit distinguer les qualités suivantes dans une onde impulsive qui est excitéc par un corps produisant du son, et qui arrive au labyrinthe :

1° Son volume et la durée de son impression;

2° Sa longueur;

3o L'amplitude des excursions, ou l'étendue de l'espace que parcourent les parties vibrantes.

Le volume de l'onde est l'extension de cette onde dans la direction suivant laquelle elle marche. Le volume d'une onde dans un milieu qui transmet du son dépend, en partie, du temps que le corps vibrant d'une manière sonore emploie d'une vibration à l'autre, ou pour accomplir une vibration entière, en partie aussi de la faculté conductrice du milieu que le son parcourt. La colonne d'air du

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