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d'Eustache. Cette catégorie ne comprend que les genres privés de langue, Pipa et Dactylethra. Des trois osselets de l'ouïe qui existent chez les batraciens précédents, le premier est devenu la membrane cartilagineuse du tympan, le second a la forme d'un très long pédicule arqué, et le troisième est un appendice à peine perceptible du second, qui a la forme d'une petite feuille, et qui bouche la fenêtre (1).

2. Reptiles écailleux.

Les reptiles écailleux ont les deux fenêtres, et leur limaçon, si l'on excepte celui des chéloniens, présente la structure de celui des oiseaux.

a. Reptiles écailleux sans caisse du tympan.

L'osselet de l'ouïe est la plaque de l'étrier, qui s'étend en un pédicule plus ou moins long (columelle). Ce pédicule et les fenêtres sont couverts par des muscles et par la peau. On rencontre cette disposition dans les ophidiens, comme aussi dans les genres Chirotes, Lepidosternon et Amphisbæna.

b. Reptiles écailleux pourvus d'une caisse du tympan et d'une trompe d'Eustache.

On trouve chez eux la columelle des précédents, dont l'extrémité est fixée à la membrane du tympan par une masse fibro-cartilagineuse. Ici se rangent les chéloniens, les crocodiles, les lézards. C'est aussi le cas des sauriens apodes pourvus de paupières, Bipes, Pseudopus, Ophisaurus, Anguis, Acontias (2). Chez la plupart de ces animaux, la membrane du tympan est visible à l'extérieur : il s'en trouve cependant quelques uns, parmi les derniers, chez lesquels elle est couverte par la peau.

G. Oiseaux.

L'organe auditif des oiseaux ressemble à celui des crocodiles et des lézards en la plupart des points, par exemple dans la structure de la caisse du tympan, de la columelle et du limaçon. La caisse du tympan amène de l'air aux cavités des os de la tête, ce qui agrandit le volume des parois résonnantes. Le limaçon n'est point contourné; c'est un canal presque droit, et terminé en cul-de-sac, qu'une cloison membraneuse très délicate partage en deux conduits, la rampe du tympan et celle du vestibule. La cloison est tendue dans un cadre cartilagineux qui se réfléchit en forme d'utricule vers l'extrémité, et qui se comporte envers la lamelle de la cloison comme l'empeigne d'une pantoufle à l'égard de la semelle. La courbure de cette espèce de bouteille est continuée, sur toute la longueur du limaçon, par une membrane vasculaire plissée en travers. Ces plis ou rides sont ce que Treviranus a le premier décrit comme autant de petites lamelles isolées représentant des touches de clavecin. Le sinus commun des canaux semi-circulaires et

(1) Voy. MUELLER'S Archiv, 1836, LXVII.

(2) Voy. MUELLER, dans TIEDEMANN's Zeitschrift, 4, 2.

la bouteille du limaçon contiennent une poudre cristalline de carbonate calcaire (1).

D. Mammifères.

L'organe auditif des mammifères ne diffère en rien d'essentiel de celui de l'homme, et les différences de détail n'ont point, quant au plus grand nombre, assez d'importance physiologique pour que nous devions les mentionner ici. Le limaçon est toujours contourné, et possède une lame spirale, en partie osseuse, en partie membraneuse, qui court autour de la columelle. Il n'y a que celui de l'ornithorhynque et de l'échidné qui ressemble, en tout point, à celui des oiseaux. La caisse du tympan d'un grand nombre de mammifères représente une grande vésicule osseuse, qui est fermée la plupart du temps par l'os tympanique. Chez beaucoup de ces animaux, elle se prolonge dans d'autres os limitrophes (2). Quelques uns ont aussi un tympan supérieur, attendu que le rocher fait une saillie vésiculaire en haut et en arrière, comme dans les genres Pedetes, Dipus et Macroscelides. De cette manière, les espaces résonnants se trouvent agrandis. Les cétacés et l'ornithorhynque n'ont point d'oreille externe : la trompe d'Eustache des dauphins s'ouvre dans le nez, et le conduit auditif externe des mammifères totalement aquatiques est extrêmement étroit.

J'ai fait connaître ailleurs les observations de Treviranus et de Gottsche sur la distribution des nerfs dans le limaçon. De même que les fibres nerveuses s'y répandent sur la lame spirale, pour être entourées de deux côtés par la lymphe labyrinthique, de même aussi, d'après la découverte de Steifensand (3), ils s'épanouissent, dans les ampoules, sur une saillie, qui ne traverse pas l'ampoule de part en part, mais ne fait que s'élever dans son intérieur. Dans l'ampoule des mammifères, il y a un renflement transversal, formant une cloison incomplète, qui correspond à l'épanouissement du nerf. Chez les oiseaux, au contraire, on trouve sur cette cloison deux branches libres, l'une supérieure, l'autre inférieure, qui se terminent en forme de bouton, de manière que le tout représente une croix, dont les branches transversales sont adhérentes, tandis que les branches perpendiculaires sont libres. Chez la tortue, la cloison, comme renflement, présente seulement dans le milieu une espèce de bosse. La cloison de l'ampoule antérieure repose obliquement sur la paroi de l'ampoule, et n'a point de bosse : dans l'ampoule externe il n'existe qu'une moitié de la cloison. Chez le crocodile et les lézards, l'ampoule extérieure est comme dans la tortue; les autres ont la conformation en croix dans l'intérieur. La cloison des poissons est un pli transversal renflé en bourrelet.

Toutes les dispositions acoustiques qu'on observe dans l'organe de l'ouïe ne sont que des appareils conducteurs du son, de même que celles qu'on voit dans l'œil sont des appareils conducteurs de la lumière. Comme toute matière quelconque conduit les ondes sonores, il faut que l'audition soit possible même dès

(1) HUSCHKE, dans MUELLER'S Archiv, 1835, p. 335.-G. BRESCHET, Rech. anat, et physiol. sur l'organe de l'audition chez les oiseaux, Paris, 1837, in-8, avec 8 pl. in-4. MUELLER'S Ar

chic, 1837, LXIV.

(2) HAGENBACH, Die Paukenhæhle der Saugethiere. Båle, 1835.

(3) MUELLER'S Archiv, 1835, p. 174.

les plus simples conditions, car tous les entourages matériels du nerf auditif doivent nécessairement lui amener le son. Dans l'œil, il fallait une certaine construction pour diriger les ondes lumineuses de manière qu'elles prissent sur le nerf la même disposition que celle qu'elles affectent en partant de l'objet. Cette précaution était inutile pour l'organe auditif. Tous les milieux conduisent sans le moindre trouble, et, malgré les croisements les plus variés, les ondes sonores les plus diversifiées eu égard à leur direction comme à leur succession; pourvu que ces ondes viennent à rencontrer l'organe et son nerf, elles arrivent infailliblement à la perception. La structure entière de l'organe auditif ne peut donc tendre qu'à un seul but, celui de faciliter la transmission des ondes et de les multiplier par résonnance: or, tous ces appareils acoustiques de l'organe se laissent effectivement ramener à ces deux principes.

Pour l'audition en elle-même, il n'est donc besoin ni de membrane du tympan, ni d'osselets de l'ouïe, ni de limaçon, ni de canaux semi-circulaires, ni même de vestibule et de lymphe du labyrinthe: aussi toutes ces parties peuvent-elles manquer. L'organe auditif des animaux sans vertèbres est déjà réduit à une simple vésicule, qu'on ne rencontre même pas chez beaucoup d'entre eux où le seul nerf spécifique paraît suffire. Tout corps conduit des ondes: le corps d'un animal et les entourages immédiats du nerf auditif les reçoivent dans le même ordre que le milieu conducteur du son les propage. On ne peut donc pas même prétendre que l'aptitude à distinguer l'acuité et la force relative des ondes exige des appareils particuliers; mais la netteté et l'intensité absolue des sons augmentent à mesure que l'organe se développe davantage au point de vue acoustique.

La meilleure manière de comprendre la destination de ces appareils est de les suivre depuis leurs formes les plus simples jusqu'aux plus compliquées, et d'examiner ce qui s'y ajoute peu à peu. On apprend ainsi à connaître les circonstances qui sont indépendantes de telle ou telle autre, et celles qui sont étroitement liées ensemble.

II. TRANSMISSION DU SON JUSQU'AU LABYRINTHE CHEZ LES ANIMAUX QUI ENTENDENT DANS L'EAU.

Chez les animaux qui vivent dans l'air, les ondes sonores de l'air arrivent d'abord aux parties solides de l'animal et de l'organe auditif, et de là elles passent à la lymphe du labyrinthe. La force de l'ouïe d'un animal qui vit et qui entend dans l'air doit donc dépendre du degré auquel les parties solides de son organe auditif sont aptes à recevoir des ondes aériennes, de la diminution que les excursions des molécules vibrantes éprouvent au moment où les vibrations passent de l'air dans les parties extérieures de l'organe auditif, et du degré d'aptitude de la lymphe labyrinthique à recevoir les vibrations des parties externes de l'organe auditif. La portion extérieure tout entière de l'organe d'audition est calculée, comme nous le verrons, dans la vue de rendre plus facile la transmission des vibrations de l'air à des parties solides, transmission qui présente en elle-même des difficultés.

Chez les animaux qui vivent et qui entendent dans l'eau, le problème est tout autre. Le milieu qui transmet les vibrations sonores est l'eau; il les amène aux parties solides du corps de l'animal, d'où elles parviennent encore une fois dans

l'eau, à savoir, la lymphe du labyrinthe. Ici l'intensité de l'ouïe dépend du degré d'aptitude qu'ont les parties solides de l'organe auditif, que les ondes sonores doivent traverser en premier lieu, à recevoir des ondes de l'eau ambiante, pour les transmettre de nouveau à de l'eau, et de la diminution que les excursions des molécules vibrantes éprouvent pendant ce passage. Nous verrons encore ici que toute la partie extérieure de l'organe auditif est calculée dans le but de faciliter cette transmission.

Comme la transmission des ondes de l'air à des corps solides, et celle de l'eau à des corps solides, sont fort inégales, et qu'elles sont fortifiées par des moyens fort différents, la nature a eu besoin de déployer pour cela des appareils tout autres dans la partie extérieure de l'organe auditif chez les animaux qui entendent dans l'air et chez ceux qui entendent dans l'eau, tandis que la partie interne de l'organe pouvait avoir et a effectivement beaucoup plus d'uniformité dans les deux cas. En général, le problème est plus simple chez les animaux qui vivent dans l'eau. Le cheminement des vibrations, depuis le milieu extérieur jusqu'au nerf, a lieu par trois conducteurs successifs, mais dont deux sont semblables, savoir, d'abord l'eau extéricure, puis les parties solides de l'animal et de l'organe auditif, enfin l'eau du labyrinthe. Chez les animaux aériens, ce cheminement s'opère aussi à travers trois milieux différents tous les uns des autres: ce sont l'air, les parties solides de l'animal et de l'organe auditif, et l'eau du labyrinthe. C'est cette circonstance, sans qu'il soit nécessaire d'en chercher d'autres, qui fait que l'organe auditif des animaux aériens l'emporte généralement en complication sur celui des animaux aquatiques. Comme l'organe auditif de ces derniers, des poissons, par exemple, est d'ordinaire totalement entouré de parties. solides, la première question qui se présente à résoudre est celle de savoir ce qui arrive pendant que les ondes sonores passent de l'eau dans des parties solides et sortent de celles-ci pour rentrer dans l'eau. Lorsque les ondes d'air sont transmises à des corps solides, une diminution considérable a lieu dans l'amplitude des excursions ou des chocs des molécules vibrantes, tandis que la communication des ondes de l'air résonnant à l'air, et celle des ondes d'un corps résonnant solide à d'autres corps solides, s'accomplissent sans la moindre diminution. Le plein son d'un corps solide, d'une corde, par exemple (sans caisse résonnante), ne s'entend que quand des corps solides le conduisent du corps solide générateur aux parties solides de l'organe auditif, comme lorsqu'on interpose une verge entre le chevalet de la corde et l'oreille externe bouchée. Mais, s'il y a de l'air entre le corps solide qui produit le son et l'oreille, le son est faible, parce que la transmission des ondes s'opère difficilement d'un corps solide à l'air, et qu'en pareil cas elle ne peut s'accomplir sans une diminution dans l'amplitude des excursions des particules vibrantes ou de l'ébranlement. En revanche, le son de l'air qui résonne, comme celui d'un instrument à vent, est parfaitement propagé par l'air, et porté par lui à l'organe auditif, mais il ne se communique à des corps solides que difficilement, et avec une diminution de l'intensité des ébranlements: aussi n'entend-on jamais mieux le son d'un sifflet qu'en appliquant à l'oreille bouchée une verge qui s'étend jusqu'au voisinage de l'air résonnant. En est-il de même lors du passage des ondes de l'eau dans des corps solides? Y a-t-il également ici diminution de l'ébranlement? On n'a point encore fait de recherches à cet égard. L'imperfection dans

laquelle a langui jusqu'à présent l'acoustique des organes auditifs, qui, pour parler plus exactement, existe même à peine, m'a déterminé à entreprendre une série d'expériences dont je vais donner ici les résultats.

I. Les corps solides reçoivent de l'eau, avec augmentation de force, les ondes sonores produites dans ce liquide lui-même.

On emplit d'eau jusqu'au bord un vase de verre, de porcelaine ou de bois. Une soucoupe nage sur l'eau, sans toucher le vase. On produit un son en faisant tomber un corps dans cette soucoupe. Si l'on se bouche bien les oreilles avec des boulettes de papier tordu, dont on a préalablement mâché le bout introduit dans le conduit auditif, et dont l'autre extrémité sèche sort de l'oreille, on n'entend le son que très faiblement à travers l'air; mais, à travers une baguette de bois, ou mieux un tube de verre appuyé sur le corps solide qui résonne et sur le bouchon de l'oreille, on l'entend extrêmement fort. Si ensuite on plonge dans l'eau du vase la baguette tenue contre l'oreille, pendant qu'on laisse tomber quelque chose dans la soucoupe, on entend de l'eau un bruit très fort et pur, tel qu'il est propre à la soucoupe, et beaucoup plus fort que celui qui est transmis par l'air. Dans ce cas, les ondes sonores passent de la soucoupe, ou du corps solide, à l'eau, puis de l'eau à la baguette, et ensuite de l'eau à l'organe auditif. On voit, d'après cela, non seulement que des corps solides qui résonnent transmettent leurs ondes sonores à l'eau avec une grande force, mais encore que l'eau les rend avec plus de force au corps solide, au bâton, par le moyen duquel on les entend. En tenant la baguette dans l'eau pendant l'expérience, ou touchant avec elle la paroi du vase extérieur, les conditions sont à peu près les mêmes. Le son passe de la soucoupe dans l'eau, et de celle-ci dans la baguette, soit immédiatement, soit par l'intermédiaire d'un second corps solide. Dans ce dernier cas, le son peut être un peu plus fort, parce qu'il faut alors faire entrer en ligne de compte la résonnance du vase extérieur.

II. Les ondes sonores de corps solides se transmettent avec plus de force à d'autres corps solides mis en communication avec ceux-ci, qu'à l'eau ; mais la transmission des ondes a bien plus d'intensité quand elle s'opère de corps solides à l'eau que quand elle s'accomplit de corps solides à l'air.

Ce théorème découle très facilement de l'expérience précédente; car le son n'est jamais plus fort que quand la baguette communiquant avec le bouchon de l'oreille touche à la soucoupe flottante pendant qu'on fait sonner celle-ci. Le son de l'eau qui environne la soucoupe, et dans laquelle on plonge la baguette, est déjà beaucoup plus faible. Mais l'air conduit le son bien plus faiblement encore, puisque celui qui arrive au bouchon de l'oreille par son seul intermédiaire est très faible proportionnellement au son qui, de la soucoupe elle-même ou de l'eau, vient à l'obturateur par le moyen de la baguette.

III. Les ondes sonores de l'air se transmettent très difficilement à l'eau, et avec bien plus de difficulté qu'elles ne marchent dans l'air; mais elles se communiquent très facilement à ce liquide par l'intermédiaire d'une membrane tendue.

Personne n'ignore qu'on entend dans l'eau les sons qui sont excités dans l'air. Mais un autre fait que j'ai observé me semble avoir un grand intérêt : c'est qu'une membrane tendue, en contact avec l'air et l'eau à la fois, facilite à un degré extraordinaire le passage des ondes aériennes dans l'eau. Si je fais souffler dans un sifflet de laiton ou de bois, long d'un pied, et sans trous latéraux, de telle ma

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