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montait à ré; à trente pouces et demi, il était retombé à ut#4, et il restait là jusqu'à quatre pieds.

Instruments de musique à anches membraneuses.

Les appareils dont il a été question jusqu'ici forment une section d'instruments à anche dont on n'a fait jusqu'ici aucun usage en musique. L'organe de la voix de l'homme et celui des oiseaux appartiennent, comme nous le verrons, à la même catégorie. Dans le premier, les ligaments inférieurs de la glotte sont des anches à deux lèvres; le corps de tuyau est l'espace qui s'étend depuis les cordes vocales jusqu'aux ouvertures buccale et nasale; la trachée-artère et les bronches sont le porte-vent. Dans le second, les cordes vocales du larynx inférieur, à la bifurcation de la trachée-artère et de chaque côté, constituent des anches; la colonne d'air du corps de tuyau est ici la masse d'air contenue dans la trachée-artère tout entière, depuis sa division jusqu'au larynx supérieur, et l'air de la cavité buccale; celle du porte-vent n'est que l'air des bronches, depuis la bifurcation de la trachée jusqu'aux poumons.

Mais les lèvres de l'homme peuvent aussi agir comme anches, lorsque la contraction des muscles les met à l'état de tension; dépourvues d'élasticité par ellesmêmes, elles en obtiennent un équivalent par la contraction de leur sphincter. Si l'on fait sortir l'air avec pression entre les lèvres tendues par leur muscle orbiculaire, il se produit des sons qui appartiennent à la classe de ceux des instruments à anche. La cavité buccale et les organes respiratoires font alors office de porte-vent. L'instrument est un instrument à anche avec porte-vent, sans corps de tuyau. Adapte-t-on aux lèvres un tuyau en carton ou en métal, non seulement le son devient plus plein, mais encore il peut être modifié par le tuyau.

La même chose arrive à l'anus. Le sphincter tend la peau de l'anus, et la fait agir comme une languette avec porte-vent (les gaz instestinaux), sans corps de tuyau.

Aux instruments à anche dont il a été question jusqu'ici tiennent de très près les trompettes et les cors, dans lesquels les lèvres sont mises en mouvement, comme anches membraneuses, par le souffle, tandis que la colonne d'air du tuyau résonne ainsi qu'elle fait dans les instruments à anches ordinaires. Dans ceuxci, l'anche est une pièce à part, qui, séparée de l'instrument, produit des sons à elle seule. Dans les cors, les trompettes, les trombones, il ne suffit pas de souffler dans ce qu'on appelle l'embouchure pour produire un son, il faut encore que les lèvres elle-mêmes fassent l'office d'anche, et elles sont effectivement les languettes membraneuses entre lesquelles le courant d'air se trouve refoulé. Le muscle orbiculaire remplace l'élasticité qui leur manque, par la réaction qu'il exerce sur le filet d'air qui les traverse; il se produit des sons d'une valeur déterminée, et d'autant plus aigus que les lèvres se contractent davantage. Il semble que la grandeur de l'ouverture influe sur le son de ces sortes d'anches, comme elle le fait quand on siffle, et, en effet, le sifflement avec la bouche, qui paraît ne point appartenir ici, devient plus grave quand l'ouverture des lèvres est plus grande. Cependant, comme une contraction plus forte du sphincter de la bouche a lieu quand on resserre l'ouverture des lèvres, l'étroitesse de cette ouverture, dans la position

que les lèvres affectent lorsqu'on soune de la trompette, produit absolument le même effet qu'une tension plus considérable sur les languettes membraneuses élastiques.

L'embouchure de la trompette est d'abord creusée en forme de godet; après quoi elle se rétrécit. Celui qui veut sonner de l'instrument applique le bord de cette excavation sur ses lèvres, et chasse l'air par une étroite ouverture de cellesci, aux bords desquelles le sphincter procure une tension déterminée. L'élévation du son doit croître avec la force de la tension que les lèvres acquièrent par la contraction de leur muscle orbiculaire. Il faut qu'un vide se trouve au-devant des lèvres, sans quoi leur bord tendu ne pourrait point agir comme anche: aussi, quand le godet de l'embouchure se trouve rempli au point qu'il ne reste plus qu'un étroit passage dans le milieu, on a beau souffler, aucun son ne se fait entendre, Ce qui prouve bien que telle est la cause essentielle du son de la trompette, c'est que, sans embouchure, avec les seules lèvres tendues par la contraction du sphincter, on peut produire un son semblable à celui de l'instrument. Une seule lèvre est même suffisante pour déterminer des tremblements qui sont perçus comme sons, par exemple, quand on porte la lèvre supérieure fort loin au-dessus de l'inférieure, et qu'ensuite on chasse l'air entre la lèvre supérieure vibrante et la surface ferme de l'inférieure. L'embouchure du cor diffère de celle de la trompette, en ce qu'au lieu d'un godet, elle présente une excavation conique; mais la manière d'y appliquer les lèvres est la même : il ne faut pas que les bords de celles-ci touchent.

Biot traite des trompettes et des cors en parlant des instruments à vent. Il attribue les différents sons que ces instruments donnent, à la différence de force avec laquelle le scuffle pousse la colonne d'air de la trompette, de même que la coloune d'air d'un sifflet donne, quand on souffle plus fort, les sons correspondants aux nombres 1, 2, 3, 4, 5 (ouverts), ou 1, 3, 5, 7 (fermés). Mais la force du souffle élève ici très peu le son, et ne fait que le rendre plus intense; la différence des sons dépend de la tension des lèvres. Il est plus exact de rapporter les trompettes et les cors aux instruments à anches, ainsi que l'a fait Muncke. Ce sont évidemment, comme il ressort de tout ce qui précède, des tuyaux à anches à languette membraneuse, dans lesquels le timbre du son est changé par le métal du corps de tuyau, et l'élévation de celui de l'embouchure par la colonne d'air de ce tuyau, qui entre simultanément en vibration sonore. Les sons de la trompette et du cor ne croissent pas non plus en élévation dans une proportion inverse de la longueur du tuyau, comme il arrive aux instruments à vent: on sait, au contraire, que, dans la trompette, la diminution ou l'accroissement de la longueur du tuyau n'a qu'une influence faible et subordonnée sur l'élévation du son, absolument comme dans les tuyaux à anche. Le changement de son que l'on cherche à obtenir ainsi est opéré, pour les trompettes et les cors, par la main introduite dans le pavillon, pour les trombones par les tractions exercées sur leurs tuyaux mobiles. Il y a dans les cors et les trompettes presque autant de positions à donner à la main, en l'introduisant dans le pavillon, que d'espèces de sons. Quant à l'élévation du son de ces instruments, on parvient à la changer par deux autres moyens, comme dans les instruments à anche; d'abord en variant la tension des lèvres, qui doit exercer à cet égard la même influence qu'une tension plus forte de la languette membra

neuse d'un tuyau d'anche; ensuite à l'aide de l'obturation, qui abaisse le son, précisément comme elle le fait dans les tuyaux d'anche à languette membra

neuse.

Le cor, entre les mains d'un artiste exercé, embrasse trois octaves, sans qu'on soit obligé d'introduire la main dans le pavillon, et voici quelle est la succession des sons:

Ut, sol, uta, mia, sol2, uts, rés, mis, solz, siz, uts. La succession entière des sons qu'on peut produire à l'aide de la main est ut, fa, sol, si, ute, réz, mi2, fɑ2, sole, laz, siz, uts, rés, mis, faz, sola, laz, siz, ut. Les lettres italiques indiquent les sons qui s'obtiennent avec la main introduite dans le pavillon; la exige qu'on bouche à moitié seulement. Les demi-tons peuvent aussi, en partie, être produits par la main bouchant à demi le pavillon. Comme le principal moyen est la tension des lèvres par la contraction musculaire, l'exécutant qui s'est fatigué à sonner du cor perd son aptitude pendant quelque temps. Ce sont surtout les sons élevés qui fatiguent, non par la force du souffle, mais par la tension des lèvres.

Les trous latéraux, fermés par des clefs, qu'on a ajoutés dans ces derniers temps aux trompettes et aux cors, ont ici les mêmes usages qu'à l'égard des autres instruments à anche, la clarinette, le hautbois et le basson.

Après avoir passé en revue les différentes espèces d'instruments à anche, tant ceux à languette élastique rigide que ceux à languette élastique membraneuse, convient de revenir sur la théorie des sons produits par les anches. Cependant il va être question, non des vibrations de l'air dans le corps du tuyau, mais de celles de l'anche elle-même.

Conclusions sur la théorie des sons produits par les anches.

Ayant appris à connaître, dans ces derniers temps, des sons qui sont produits par le simple choc de liquides, comme ceux de la sirène, ou par les chocs d'un corps solide se succédant avec rapidité, comme ceux qui résultent des secousses données par les dents d'une roue, on a été tenté d'admettre que les sons des auches dépendent aussi des chocs de l'air qu'à chaque vibration elles empêchent de sortir de leur châssis. Le défaut d'éclat des sons que les anches donnent par percussion ou par pincement, sans souffle, semble justifier cette théorie. Cependant elle n'est pas prouvée, et plusieurs arguments s'élèvent contre elle d'une manière formelle. La discussion de ce point est d'une grande importance pour la théorie de la voix humaine en effet, il s'agit ici surtout de savoir qui résonne primitivement, dans la voix, des ligaments de la glotte ou de l'air.

G. Weber, aux recherches classiques duquel nous devons une connaissance certaine des effets qui ont lieu dans les tuyaux d'anche, se prononce positivement en faveur de l'hypothèse dont je viens de parler. Voici comment il s'exprime Le son plein et fort que rend une plaque métallique qui vibre isolément dans son châssis, lorsqu'on souffle dessus, ne peut être produit par la plaque vibrante; car alors il ne serait pas nécessaire d'exciter le son de celle-ci par un courant d'air, et elle donnerait un son absolument pareil, quant à l'élévation et à la plénitude, lorsqu'elle viendrait à être mise d'une manière quelconque en vibration, sans subir

aucun changement dans sa situation et ses rapports, ce qui n'est pas. En effet, Weber a excité, au moyen d'un archet de violon, les plus violentes vibrations dans la plaque pendant qu'elle demeurait unie avec les autres parties de l'instrument, sans parvenir à lui faire rendre un son plein et fort, susceptible d'être comparé; cependant je trouve que le son d'une guimbarde qu'on tient à la bouche est le même par l'effet de la percussion et quand on aspire l'air. Cette preuve ne me paraît pas décisive, et néanmoins il me semble que, dans les anches membraneuses, l'interruption du courant d'air ou les chocs n'exercent qu'une influence subordonnée sur la production du son, qu'ils contribuent seulement à le rendre plus fort et plus plein, mais que leur effet n'est pas de lui donner naissance. Les motifs suivants me font regarder comme invraisemblable la théorie qui attribue les sons des anches membraneuses aux pulsations de l'air.

4° Il n'y a aucune raison d'admettre que les sons des anches simples proviennent des interruptions du courant d'air, puisque les sons que les anches ellesmêmes doivent donner quand elles vibrent, suffisent pour l'explication. A la vérité, les sons que les anches membraneuses produisent par percussion sont dépourvus d'éclat, et n'ont pas non plus le même timbre que les sons d'anche. Mais la première différence s'explique sans peine; car un choc qui ne se répète pas plus d'une fois ne suffit point pour entretenir les vibrations. Quant à celle du timbre, on ne peut la mettre en doute; cependant il y a d'autres instruments encore qui donnent des sons d'un timbre divers lorsqu'on les fait parler soit par une seule percussion, soit par une succession de chocs: c'est ce qui arrive, entre autres, à une corde lorsqu'on la pince ou qu'on fait passer dessus un archet de violon. La même chose a lieu pour les sons d'anche, suivant que l'impulsion est momentanée ou soutenue. A la vérité, il y a des membranes, comme les lèvres et le sphincter de l'anus, qui ne résonnent point par la percussion, et qui donnent des sons d'anche très forts par le souffle; mais il ne s'agit jamais, quant à ce qui regarde la manifestation d'un son, que du nombre de vibrations nécessaire pour le produire: or, l'expérience autorise seulement à conclure que, dans ces sortes de membranes, une succession régulière de vibrations n'est possible qu'autant qu'un certain état de tension persiste pendant qu'elles reçoivent le choc de l'air, et cette condition n'existe pas lorsqu'il s'agit d'une simple percussion.

2o Les sons que j'ai produits en soufflant avec un tube délié sur des languettes métalliques, et mieux encore sur des languettes membraneuses sans châssis, ne sauraient être expliqués par les seules interruptions du courant d'air; ils ressemblent parfaitement, pour le timbre, à ceux que ces languettes rendent lorsqu'elles vibrent dans un cadre et agissent comme de véritables anches. A la vérité, on pourrait dire que les vibrations rétrogrades de la languette gênent aussi jusqu'à un certain point le filet d'air sortant du tube; mais il serait difficile de voir là une interruption réelle, puisque le courant d'air change de direction à mesure que la languette recule. Le filet d'air, qui exerce une action soutenue, est bien plutôt comparable, en ceci, à l'archet de violon frottant une corde.

3. Il n'est pas non plus nécessaire, du moins, pour les languettes membraneuses, que le châssis se ferme périodiquement pendant les vibrations de la languette. Alors même que la fente présente une largeur constante d'une ligne, les languettes membraneuses donnent souvent encore des sons clairs, et ces sons ne diffèrent

pas, pour le timbre, de ceux que les mêmes languettes font entendre quand la fente est très étroite.

4o Si la théorie qui attribue les sons d'anche aux interruptions du courant d'air était exacte, les sons devraient croître en raison directe du nombre des interruptions, ce qui n'est nullement démontré. Il y a une position de la languette par rapport au châssis, dans laquelle elle détermine une fois autant d'interruptions du courant d'air qu'elle-même fait de vibrations; c'est celle dans laquelle elle bat à travers l'ouverture du châssis; car, en le traversant, puis en revenant sur elle-même, elle interrompt deux fois le courant d'air; le nombre des interruptions est au moins double de celui qui a lieu quand la languette ne fait que frapper juste dans l'ouverture du châssis et revient aussitôt sur elle-même. Le son d'une languette qui traverse son châssis devrait donc, toutes choses égales d'ailleurs, être plus aigu d'une octave que celui de la même languette exécutant des battements simples: or, cela n'a pas lieu. A la vérité, on pourrait objecter que, dans le premier cas, elle décrit des arcs entiers de vibration, tandis que dans le second elle ne décrit que des demi-arcs, étant retenue soit par le chassis luimême, soit par le courant d'air, de manière que, dans la seconde circonstance, elle vibre avec une fois plus de vitesse que dans la première, et qu'ainsi les interruptions du courant d'air sont égales de part et d'autre. Mais, en examinant la manière dont se comportent les languettes membraneuses, on rencontre encore des difficultés. Si j'applique une lame de carton ou de bois sur une languette membraneuse tendue à l'extrémité d'un porte-vent, le son demeure le même, que la plaque soit directement en face de la languette, c'est-à-dire sur le même plan, ou qu'elle s'enfonce de dehors en dedans du côté du porte-vent; dans les deux cas, la languette décrit également des arcs entiers. Mais, si j'applique la lame de manière que son bord dépasse le plan de la languette, le son produit en soufflant dans le porte-vent est beaucoup plus grave: il l'est souvent de l'intervalle compris entre ut et fa. Que la lame fasse saillie en avant ou en arrière de la languette, les arcs de vibration demeureront les mêmes, et cependant les sons seront différents. Mais la différence tient à la manière diverse dont l'air est poussé dans les deux cas, et à la résistance diverse que le courant continu de cet air oppose, dans les deux cas, aux vibrations récurrentes de la languette.

D'après ces motifs, il est vraisemblable que les languettes résonnent, non point par des interruptions du courant d'air, mais par leurs propres vibrations, et que les chocs donnés à l'air ne font que renforcer jusqu'à un certain point le son. A cet égard, les languettes métalliques se comportent, en général, comme les verges, les languettes membraneuses comme les cordes et les peaux tendues, et le son se produit d'autant plus facilement qu'un pareil corps possède encore plus d'élasticité malgré son peu de longueur. En étudiant les vibrations des corps élastiques tendus, on s'est trop attaché à une espèce de ces corps, aux cordes à boyau et autres analogues. Il est bien vrai que les cordes qu'on raccourcit beaucoup, en même temps qu'on diminue leur tension, perdent presque toute aptitude à produire des vibrations sonores; mais, si, après leur détente, elles couservaient encore de l'élasticité, quelque courtes qu'elles fussent, elles n'en seraient pas moins capables de donner des sons graves. Or, il y a d'autres corps qui, bien qu'étant très détendus, conservent assez d'élasticité pour pouvoir vibrer réguliè

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