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luques, etc.; celles-ci ont sans doute des harmonies lunaires qui leur sont propres.

Quoi qu'il en soit, on découvre facilement les trachées des plantes en cassant net des tendrons de vigne ou de jeunes branches de rosier, de tilleul, etc.: elles paraissent en forme de spirales de couleur argentée. Quand on déchire doucement une feuille, on en voit les trachées s'allonger, en écartant les portions de la feuille l'une de l'autre. Les trachées ont plus de diamètre que les autres vaisseaux des plantes; elles sont toujours placées autour des fibres ligneuses, et sont plus grandes dans les racines que dans les tiges. Il n'y a pas de doute que ces tuyaux élastiques ne soient des véhicules de l'air, et qu'ils ne l'aspirent et ne l'expirent. Leur ressort, mis en mouvement par celui du soleil, fait sans doute monter et circuler la sève par la médiation de la chaleur de l'air; et l'air luimême est peut-être composé de spirales élastiques comme les spires des trachées. Au reste, la plante aspire et expire l'air principalement par ses feuilles, criblées à cet effet d'une infinité de pores ou de petits trous: Leuwenhoek

en a compté plus de cent soixante-deux mille sur un seul côté d'une feuille de buis.

Les plantes cherchent à-la-fois l'air et la lumière: celles que l'on cultive dans les appartements se tournent toujours vers les fenêtres; les plantes privées d'air et de lumière, telles que celles qui végètent dans les souterrains, s'étiolent, c'est-à-dire blanchissent. Tels sont les cardons et les chicorées que l'on conserve l'hiver dans des caves, et les laitues romaines dont, l'été, on lie les feuilles pour les attendrir. Tous ces végétaux artificiels, privés d'air et des rayons du soleil, ont peu de substance et de vertu. Il en est de même de l'herbe qui croît à l'ombre des arbres; elle y devient longue et molle, et ce qu'on appelle, en Normandie, veule, c'est-àdire flasque les bestiaux refusent d'en manger: aussi on ne souffre point d'arbre, pas même de pommier, dans les riches pâturages de la Basse-Normandie. Il n'y a qu'un fort petit nombre de plantes qui prospèrent à l'ombre telles sont l'anémone des forêts, qui, au printemps, couvre le sol de ses réseaux; et la pervenche des beis, toujours

verte, qui donne en hiver ses fleurs bleues. On peut y joindre le framboisier du Canada, avec ses roses cramoisies; le grand convolvulus à cloches blanches, dont les fleurs éclatantes produisent de si charmants effets dans l'ombre; et le lierre sur-tout, qui couvre le sol des forêts humides d'un tapis toujours vert, au milieu même des neiges. Ce sont des beautés qui manquent souvent à nos jardins anglais, où les bosquets interceptent l'air et la lumière à la plupart des plantes.

Les végétaux sont si bien harmoniés avec l'atmosphère, qu'ils changent en air pur l'air méphitique, comme l'a fort bien prouvé le savant docteur Ingenhousz. Cette régénération est encore l'ouvrage du soleil; car des plantes, et sur-tout des fleurs, mises en grande quantité dans une chambre fermée, en méphitisent l'air au point de faire mourir les personnes qui le respirent, sur-tout la nuit. Des femmes ont péri pour avoir dormi dans une chambre où il y avait beaucoup de fleurs de lis. Nous ne saurions trop admirer l'influence de l'astre du jour sur tous les agents

de la nature toutes leurs harmonies sont suspendues ou troublées par son absence. Mais voyez comme l'Auteur de la nature a bien combiné lui-même leurs différents effets. Les animaux corrompent l'air par leur transpiration, et les plantes destinées à leur nourriture le rétablissent dans toute sa pureté : il y a plus, elles changent les odeurs les plus fétides en parfums délicieux. C'est sur des fumiers que croissent les roses les plus odorantes, et sur des couches de matière fécale que les jardiniers cultivent, l'hiver, à Paris, les tubéreuses si suaves.

Les végétaux ont des harmonies avec l'air extérieur par leurs tiges: d'abord, le côté qui est exposé au vent du midi est beaucoup plus dilaté que celui qui est frappé du vent du nord. Cette observation peut être utile pour s'orienter, si par hasard on se trouvait égaré dans un bois; car, en coupant une branche d'arbre, on connaîtrait le côté qui regarde le

midi, , parce qu'il y a plus de distance de ce côté-là, depuis la moelle de la branche jusqu'à son écorce. Les écorces mêmes des végétaux sont en harmonie avec les tempéra

tures de l'atmosphère; ce sont des espèces d'habits dont la nature les a revêtus, suivant les latitudes. Ceux des pays froids ont des écorces fort épaisses, et souvent enduites de résine, comme les sapins; ceux des pays chauds les ont légères; ceux qui ne vivent que le cours d'un été n'en ont presque point : telles sont les graminées, qui n'ont, pour ainsi dire, que des épidermes. On peut aussi connaître, par la dureté et la finesse des feuilles, les végétaux qui croissent dans les lieux battus des vents. Les pins, les sapins, les cèdres, les mélèzes, qui se plaisent sur le sommet des montagnes, ont des feuilles menues et ligneuses: il en est de même des giroflées jaunes, qui viennent sur le haut des murailles; leurs feuilles ne donnent point de prise aux vents. Les végétaux qui les ont grandes et tendres, tels que nos figuiers et les bananiers des Indes, aiment à croître sur les bords des ruisseaux, à l'abri des rochers; tous ont leurs tiges en rapport avec la force des vents auxquels ils sont exposés. Le figuier a un bois très-fragile, et le bananier n'est formé que d'un paquet de feuilles. Ce sont des habitants des humbles vallées.

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