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>> nisme : >> << Dieu s'est réservé le pouvoir suprême de » détacher les effets qu'il voudra des causes qu'il leur a » données dans l'ordre commun et de reproduire ces ou>> vrages extraordinaires que nous appelons des miracles, >> selon qu'il plaira à sa sagesse de les dispenser.» « On » passe sa vie, ajoute-t-il, dans des miracles continuels » qu'on ne remarque même pas. » Et si M. Chambolle, néanmoins, persiste à dire que Bossuet aurait traité de mensonge, de jonglerie, d'imposture ridicule un fait comme celui de Rimini, attesté par plusieurs évêques, par tout un clergé, par tout un peuple, nous nous contentons de répondre que M. Chambolle ne jouit pas de son bon sens.

M. Chambolle ignore sans doute que Bossuet a figuré comme témoin dans le procès de canonisation de saint Vincent de Paul, et qu'à ce titre il a attesté, par conséquent encouragé des miracles « comme ceux devant lesquels l'Univers s'ébahit. » Il a fait plus : il a attesté et glorifié d'autres miracles dont il n'avait pas été témoin. M. Chambolle a-t-il entendu parler de saint François de Paule? C'était un homme qui s'enlevait dans les airs, qui passait à travers les flammes sans en ressentir les atteintes, qui traversait la mer sur son manteau. Cela est sans doute aussi étonnant que le prodige de Rimini. Bossuet, « un des hommes les plus pieux, et qui n'avait pas fait divorce avec le sens commun, » a écrit et prononcé sans la moindre vergogne deux panégyriques de saint François de Paule. On y lit certains passages qui s'adressent tout particulièrement à M. Chambolle. Nous citons :

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Ce n'est pas en cette seule rencontre que Dieu a fait connaître à son serviteur qu'il écoutait ses désirs. Tous les peuples où il a passé

ont ressenti mille et mille fois les effets considérables de ses prières; et quatre de nos rois, successivement, lui ont rendu ce glorieux témoignage, que, dans leurs affaires très importantes, ils n'avaient point trouvé de secours plus prompts, ni de protection plus assurée. Presque toutes les créatures ont senti cette puissance si peu limitée que Dicu lui donnait sur ses biens; et je vous raconterais avec joie les miracles presque infinis que Dieu faisait par son ministère, non-seulement dans les grands besoins, mais encore, s'il se peut dire, sans nécessité, n'était que ce détail serait ennuyeux et apporterait peu de fruit. Mais comme de tels miracles, qui se font particulièrement hors des grands besoins, sont le sujet le plus ordinaire de la raillerie des incrédules, il faut qu'à l'occasion du grand saint François je tâche aujourd'hui de leur apprendre, par une doctrine solide, à parler plus révéremment des œuvres de Dieu. Voici donc ce que j'ai vu dans les Saintes Lettres, touchant ces sortes de miracles.

. Je trouve deux raisons principales pour lesquelles Dieu étend son bras à ses opérations miraculeuses: la première, c'est pour montrer sa grandeur et convaincre les hommes de sa puissance; la seconde, pour faire voir sa bonté, et combien il est indulgent à ses serviteurs. Or, je remarque cette différence dans ces deux espèces de miracles, que, lorsque Dieu veut faire un miracle pour montrer seulement sa toutepuissance, il choisit les occasions extraordinaires. Mais quand il veut faire encore sentir sa bonté, il ne néglige pas les occasions les plus communes! Cela vient de la différence de ces deux divins attributs. La toute-puissance semble surmonter de plus grands obstacles, la bonté descend à des soins plus particuliers. L'Ecriture nous le fait voir en deux chapitres consécutifs du quatrième livre des Rois. Elisée guérit Naaman le lépreux, capitaine général de la milice du roi de Syrie et chef des armées de tout son royaume. Voilà une occasion extraordinaire, où Dieu veut montrer son pouvoir aux nations infidèles : « Qu'il vienne à moi, dit

Elisée, qu'il sache qu'Israël n'est point sans prophète.» Mais, au chapitre suivant, comme les enfants des prophètes travaillaient sur le bord d'un fleuve, l'un d'eux laisse tomber sa cognée dans l'eau, et aussitôt crie à Elisée : « Hélas, cette cognée n'est pas à moi, je l'avais empruntée. » Et encore qu'une rencontre si peu importante semblat ne mériter pas un miracle, néanmoins Dieu, qui se plaît à faire connaître qu'il aime la simplicité de ses serviteurs et prévient leurs désirs dans les moindres choses, fit nager miraculeusement ce fer dans les

eaux, au commandement d'Elisée, et le rendit à celui qui l'avait perdu. Et d'où vient cela, Chrétiens, si ce n'est que notre grand Dieu, qui n'est pas moins bon que puissant, nous montrant sa toute-puissance dans les entreprises éclatantes, veut bien aussi, quand il lui plaît, montrer dans les moindres la facilité incroyable avec laquelle il s'abandonne à ses serviteurs, pour justifier cette parole: Omnia mea tua sunt! »

Voilà ce que dit Bossuet dans le premier panégyrique; voici comment il parle dans le second :

«Certes, je ne m'étonne pas qu'il (saint François) ait tant de fois passé au milieu des flammes sans en avoir été offensé, ni de ce que, domptant la fureur de ce terrible détroit de Sicile, fameux par tant de naufrages, il ait trouvé sur son seul manteau l'assurance que les plus adroits nautonniers ne pouvaient trouver dans leurs grands navires.

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Nous ne pouvons pas craindre de fatiguer M. Chambolle en lui faisant entendre Bossuet; nous lui offrirons donc encore ce petit morceau, pris au hasard entre mille, où il s'élève contre l'imbécillité (c'est son nom) des incrédules, qui veulent raisonner de Dieu.

Mais, hommes doctes et curieux, si vous voulez discuter la religion, apportez-y du moins et la gravité et le poids que la matière demande. Ne faites point les plaisants mal à propos dans des choses si sérieuses et si vénérables. Ces importantes questions ne se décident pas par vos demi-mots et par vos branlements de tête, par ces fines railleries que vous nous vantez et par ce dédaigneux sourire. Pour Dieu, comme disait cet ami de Job, ne pensez pas être les seuls hommes, et que toute la sagesse soit dans votre esprit, dont vous nous vantez la délicatesse. Vous qui voulez pénétrer les secrets de Dieu, venez en présence, développez les énigmes de la nature; choisissez ou ce qui est loin, ou ce qui est près, ou ce qui est à vos pieds, ou ce qui est bien haut suspendu sur vos têtes. Quoi! partout votre raison demeure arrêtée! Partout elle gauchit, ou elle s'égare, ou elle succombe! Cependant vous ne voulez pas que la foi Aveugle, chagrin et dédaignan et qu'on vous donne la

vous prescrive ce qu'il faut croire. vous ne voulez pas qu'on vous guide

voyageur égaré et présomptueux,

qui croyez savoir le chemin, qui vous refusez la conduite, que voulezvous qu'on vous fasse? Quoi! voulez-vous donc qu'on vous laisse errer? Mais vous vous irez engager dans des détours infinis, dans quelque chemin perdu; vous vous jetterez dans quelque précipice. Voulez-vous qu'on vous fasse entendre clairement les vérités divines? Mais considérez-vous où vous êtes et en quelle basse région du monde vous avez été relégués? Voyez cette nuit profonde, ces ténèbres épaisses qui vous environnent, la faiblesse, l'imbécillité, l'ignorance de votre raison. Concevez que ce n'est pas ici la région de l'intelligence. Pourquoi donc ne voulez-vous pas que, en attendant que Dieu se montre à découvert ce qu'il est, la foi vienne à votre secours et vous apprenne du moins ce qu'il en faut croire.»

(Sermon pour le deuxième dimanche de l'Avent.)

Nous connaissons notre Bossuet, et nous aurions d'autres pièces à faire passer sous les yeux de M. Chambolle. Nous pourrions lui dire, par exemple, ce que Bossuet pensait de ceux qui répandent des livres semblables aux primes que l'Ordre donne à ses abonnés. On voit là comment l'évêque de Meaux entend la polémique; mais c'est assez pour un jour. Et déjà M. Chambolle commence à trouver que Bossuet n'était qu'un petit esprit.

M. Chambolle nous fait, en terminant, un compliment dont nous le remercions de tout notre cœur : Un de « nos propres amis, » qui est aussi des siens, ce qui nous étonne, lui aurait dit que les rédacteurs de l'Univers se considèrent, et le disent eux-mêmes, comme l'élément grossier du catholicisme. Nous n'oserions pas nous vanter à ce point! Cependant, si l'élément grossier du catholicisme se compose de ceux qui acceptent et vénèrent toutes les lois de l'Eglise, qui ne rougissent d'aucun de ses dogmes, qui ne pactisent avec aucun de ses ennemis, qui lui ont voué toute leur vie et toute leur âme, et qui foulent aux pieds toute la tiède et pusillanime sagesse de

la politique et du respect humain, certainement, nous en sommes!... Et nous avouons qu'à nos yeux cet élément-là, cet élément grossier, c'est le bon.

IV.

A PROPOS DU PIEMONT.

12 août 1850.

I. Le Journal des Débats et l'Ordre brodent l'un et l'autre un thème qui semble leur avoir été expédié de Turin. Ils rapportent les dits héroïques de M. de Santa-Rosa sur son lit de mort, font la même peinture éloquente des douleurs de la famille de ce ministre et de la dureté fanatique du prêtre qui lui refuse l'absolution; ils déclament મે peu près dans les mêmes termes contre l'archevêque de Turin, et terminent tous deux en déclarant que, cependant, le grand coupable n'est pas l'archevêque, mais le Pape. Pie IX a ordonné, Mgr Fransoni n'a fait qu'obéir. Seulement, le Journal des Débats profite de l'occasion pour reprocher au Pape d'avoir, en d'autres temps, <«< contribué au déchaînement de l'esprit révolutionnaire. » L'Ordre se contente de lever vers le ciel ses mains innocentes et de s'écrier: « Ainsi, l'impulsion » viendrait de Rome! Le Pape soutiendrait hautement

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